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10 points clés pour comprendre la mobilisation au Mexique contre la hausse de l’essence

Hausse des prix des carburants, de électricité et des biens de consommation. La hausse du prix de l’essence a canalisé la grogne populaire à l’encontre du gouvernement Peña Nieto, faisant au moins 3 morts ce jeudi 5 janvier dont un policier. 10 points clés pour comprendre la mobilisation. Barbara Funes

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Selon plusieurs analystes, la décision prise d’augmenter les prix des carburants est la pire erreur qu’ait pu commettre le gouvernement de Peña Nieto. Depuis le premier jour de cette année, les augmentations ont été de 14,2 % du prix du SP98, 20,1 % du SP95 et 16,5 % pour le Gasoil, par rapport au prix maximal de décembre 2016. Ces augmentations seront stabilisées jusqu’au 3 février pour reprendre ensuite.
Ci-dessous, les clés de cette crise qui risque fort d’être difficile à clore pour le gouvernement mexicain.

1. Peña Nieto avait affirmé le 4 janvier 2015 qu’il n’y aurait plus d’augmentation des prix des carburants. Mais c’est l’exact contraire qui vient d’arriver après cette annonce triomphale. La hausse s’est déclenchée après des augmentations successives qui se sont imposées depuis 2015 et qui ont commencé avec la libéralisation des pris des carburants, qui seront réglés en fonction des fluctuations du marché.

2. Depuis le début du gouvernement Peña Nieto, le pays a enregistré des hausses du 32 % de l’essence SP98, 38,1 % de la SP95 et presque 37 % du Gasoil, qui coûtait en moyenne 12,49 pesos (0,56 centimes) en 2013. En 2017, le SMIC journalier est de 80,04 pesos (3,56 €) et le prix moyen de la SP98 est de 15,99 pesos (0,71 centimes) le litre. Seulement cinq litres d’essence peuvent être achetés avec le salaire minimum d’un jour de salaire,, contre quasiment 30 litres en 1979.

3. Les prix des carburants seront désormais liés au dollar US, qui n’a pas arrêté de grimper (il est quasiment à 1 $ US pour 22 pesos mexicain) depuis que Donald Trump a commencé sa campagne contre les migrants et le Traites de Libre Echange des Amériques, en menaçant de sortir les Etats-Unis de cet accord. Le risque d’inflation se rajoute à la situation : la hausse des prix des carburants a fait augmenter les prix de l’électricité et des produits de première nécessité, ce qui frappe de plein fouet les ménages des classes travailleuses. Avant ces annonces, les prévisions de croissance économique étaient déjà très sombres. Elles se sont réduites jusqu’à un maigre 1,3 % et 1 % pour cette année. Cela se rajoute à la dette externe, qui est de plus de 50 % du produit intérieur brut.

4. Selon une carte élaborée pas la US Energy Information Administration, les prix de référence de l’essence dans la côte du golfe des Etats-Unis sont de 2,08 dollars pas galon (3,78 litres). Par rapport au type d’échange actuel, le litre d’essence dans les Etats-Unis est 22 % mois cher qu’au Mexique.

5. Pour l’instant, le gouvernement (avec la complicité de la bureaucratie syndicale pétrolière présidée par Carlos Romero Deschamps) a avancé dans le démantèlement de l’entreprise d’Etat Petroleos Mexicanos (Pemex), comme avec la mise aux enchères de ses installations et champs pétroliers au profit de grandes multinationales. Ces privatisations sont la mise en application de la réforme énergétique, mise sur pied par l’équipe de Hilary Clinton quand elle était secrétaire d’Etat. Le gouvernement et les médias ont fait campagne pour une soi-disant crise de Pemex, dans le but de rendre au capital privé l’exploitation des hydrocarbures, en faisant des coupes budgétaires sur l’exploitation et la maintenance. Ils ont ainsi réalisé des milliers des suppressions d’emplois, ce pour abaisser la production et accélérer la reprise par des capitaux privés. Une des conséquences a été de transformer le Mexique en un importateur d’hydrocarbures et d’ouvrir au capital privé sa distribution et commercialisation. C’est ainsi que les entreprises comme Oxxo-Gas et Petro-7, entre autres, sont les principales bénéficiaires de la hausse des prix du pétrole.

6. Mais il n’y a pas que les chiffres. Le gouvernement Nieto porte encore les stigmates de la disparition forcée des 43 étudiants d’Ayotzinapa et du massacre d’Iguala, suite à quoi il a cessé d’être encensé par la presse internationale et a commencé à entamer sa chute libre. Apres Ayotzinapa, la tentative de faire passer en force la réforme du système éducatif s’est vue confronter à une résistance des enseignants dans plusieurs villes du pays, jusque dans la capitale. La réponse a été le massacre, en juin 2016, de Nochixtlan, qui reste encore impuni à l’heure actuelle. Les enseignants ont reçu le soutien d’un large mouvement démocratique contre la répression. La lutte s’est étendue jusque dans la capitale du pays, à l’image du printemps des enseignants de 1988-1989. Néanmoins, malgré la dynamique combative des enseignants, la direction de la Coordination nationale des travailleurs de l’éducation (CNTE) a priorisé la négociation et le dialogue avec le gouvernement, et les enseignants ont fini par se replier, sans arriver à entrainer avec eux l’ensemble des travailleurs.

7. Pour le Mexique, l’arrivée du candidat du parti républicain, Donald Trump, aux élections présidentielles des Etats-Unis, ouvre un nouveau chapitre dans la crise du gouvernement d’Enrique Peña Nieto. Trump a été reçu comme un chef d’Etat alors qu’il ne l’était pas encore, faisant la démonstration de la soumission caractéristique de cette « caste politique », toujours disposée à s’agenouiller devant leur « maître ». Ce maître qui n’est aujourd’hui personne d’autre qu’un magnat xénophobe, qui a basé sa campagne électorale sur une rhétorique insultante envers les migrants mexicains, et qui est amplement détesté au Mexique.

8. Dans les 32 Etats du pays ont eu lieu des manifestations, des barrages routiers et des pompes à essence contre la hausse du pétrole. Chauffeurs routiers, automobilistes, agriculteurs, jeunes et enseignants ont participé aux blocages. L’indignation fait rage dans différents secteurs de travailleurs, comme dans les télécommunications. Pour l’instant, le gouvernement, les entrepreneurs, les multinationales et les médias veulent semer la panique avec des rumeurs « d’émeutes » pour pouvoir déplier un dispositif répressif avec la police et l’armée. Ils craignent l’entrée dans l’arène politique des classes travailleuses, des femmes et de la jeunesse.

9. Le rejet qu’a suscité la hausse des prix du pétrole met objectivement en question la subordination du Mexique vis-à-vis de l’impérialisme Etats-unien. Andres Manuel Lopez Obrador, leader national du parti Mouvement et régénération nationale (Morena), a signalé que ses députés et sénateurs n’ont pas voté la reforme énergétique. Dans la crise actuelle, ils soutiennent une politique de « résistance civile et pacifique » (c’est-à-dire attendre les élections de 2018 pour sortir le PRI par les urnes et éviter ainsi que le mouvement ne se radicalise). Des mesures impuissantes devant une lutte qui pour obtenir victoire doit rompre les chaînes économiques, politiques, militaires et diplomatiques qu’imposent les Etats-Unis au Mexique.

10. Les travailleurs et les classes populaires sont ceux qui peuvent mettre en échec le gouvernement, par les méthodes de lutte de l’industrie et des services, en reprenant les revendications légitimes des autres secteurs de la société, et en se mettant à la tête des mobilisations avec un programme ouvrier contre la crise, dans lequel mettre à bas la reforme énergétique et la re-nationalisation des entreprises privées de Pemex, soit partie prenante d’une politique de rupture avec la dépendance du pays vis-à-vis du gouvernement Trump et en défense de la souveraineté nationale. Que la crise soit payée par les capitalistes !


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