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Déconfinement

11 mai. Un déconfinement à deux vitesses : les classes populaires en première ligne

C’est la « boule au ventre » que plusieurs centaines de milliers de salariés sont retournés au travail ce lundi. Cependant, dans l'ensemble, ce premier jour de déconfinement n’a pas été la catastrophe annoncée. Mais ce n’est aucunement lié à la politique du gouvernement mais bien à des raisons objectives : le retour à l’activité tant espéré par gouvernement et patronat n’a été que relatif. En réalité, ce premier jour de déconfinement a touché ceux qui n’ont jamais arrêtés ou ceux obligés à reprendre : les salariés les plus précaires et ceux des quartiers populaires.

Damien Bernard

12 mai 2020

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« Des bugs », c’est en ces termes qu’Olivier Véran, ministre de la Santé, a qualifié l’incident survenu sur la ligne 13 tôt ce matin. Un « bug » qui a eu comme conséquence d’imposer à des centaines de travailleurs un trajet dans des rames bondées où toute distanciation sociale était impossible. « C’est vraiment dommage » a surenchéri le ministre de la Santé : une insulte à l’ensemble des travailleurs qui ont dû, forcés par le déconfinement gouvernemental, prendre le risque d’être infectés par le Covid-19 pour se rendre au travail. Et c’est un « bug » à répétition puisque qu’il s’est reproduit sur plusieurs lignes de RER ce lundi 11 mai comme le souligne l’AFP : « A Châtelet-Les Halles, l’affluence était à 06H00 quasiment celle des jours d’avant le confinement. Les RER A et B arrivaient bien remplis, tandis qu’une voix douce venue des haut-parleurs demandait, en vain, de garder "un mètre de distance" ». Un déconfinement loin d’assurer les conditions de distanciation sociale censées être garanties par les directions de la RATP et de la SNCF et leur donneur d’ordre le gouvernement.

« Mais la situation s’est rapidement stabilisée », précise l’AFP. C’est ce que précise un porte-parole de la SNCF qui annonce que si certains RER B et D étaient (trop) chargés au début du service, « plus de 97% de nos trains de ce matin avaient une affluence faible ou très faible ». Bien que l’on puisse douter de la direction de la SNCF, on ne peut que constater que dans l’ensemble la fréquentation des transports en commun n’est qu’en légère augmentation. En ce qui concerne la RATP qui a fermé 60 stations du métro parisien, la fréquentation ce lundi matin avoisinait selon la direction de la RATP 15% à 20% de la moyenne, contre 4% pendant le confinement. Un chiffre qui montre en réalité que la reprise de l’activité pour ce premier jour de déconfinement n’est que très progressive. C’est ce que pointe le journal Les Echos : « de nombreux Français, notamment commerçants, ont repris le chemin du travail ce lundi. Mais pas tous, loin de là. »

Les injonctions de Bruno Le Maire à la reprise de l’économie n’auraient-elles pas eu l’effet escompté ? Le journal Les Echos pointe premièrement que « les secteurs de l’hébergement et de la restauration, entre autres, restent sous le coup d’une fermeture administrative ». Des secteurs qui pèsent un poids important puisqu’ils embauchent plus de 700.000 salariés. Mais cela n’explique pas tout, puisque ce sont près de 400.000 entreprises, représentant 875.000 emplois, qui peuvent légalement rouvrir cette semaine. Des entreprises qui « ne le feront pas tout de suite », pointe le journal. « L’activité risque d’être ralentie pendant encore quelques semaines en raison de différents problèmes comme les gardes d’enfants dont les écoles sont fermées, la situation de certains salariés médicalement fragiles ou encore une demande qui pourrait rester en berne encore quelque temps » explique un économiste de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Derrière ce premier jour de déconfinement se cache en réalité un mauvais signal sur le plan économique avec une reprise à marche forcée de l’économie qui ne va pas au rythme voulu par le gouvernement et le MEDEF.

Ce déconfinement repose en fait, comme depuis le début du confinement, sur ceux que la « crise sanitaire » a rendu visible. « Ceux d’en bas » qu’on a vu crever l’écran sur BFM TV ce matin dans les rames bondées de la ligne 13 et des lignes de RER A, B et D. Des lignes que prennent les travailleurs les plus précaires se rendant de leurs lieux de résidence, des quartiers populaires ; vers leur lieux de travail. Et ce « bug » survenu sur la ligne 13 n’est lui aussi pas un hasard. Celui-ci serait en effet lié à des « infiltrations d’eaux aux stations Carrefour Pleyel et Mairie de Saint-Ouen », qui ne sont que le résultat du manque d’entretien d’une ligne de métro considérée comme « la ligne de l’enfer ». En première ligne du déconfinement et du risque sanitaire, ce sont donc les travailleurs précaires, ceux qui n’ont jamais cessé de travailler et qui n’ont plus le choix que de bosser, qie l’on retrouve. Une réalité que Les Echos sont à nouveau obligés de constater : « Pour ce premier jour du déconfinement, à une station de là, gare de Lyon, les passagers en transit dans le vaste échangeur entre les trains, les RER et le métro sont aussi rares. "Il y a quand même plus de monde que la semaine dernière", constatent Mohamed et Amin. Pour ces deux agents de sécurité, la levée du confinement ne change pas grand-chose : ils n’ont pas arrêté de travailler. Ils appartiennent à cette première ligne, célébrée tous les soirs à 20 heures, mais font un métier auquel on ne pense pas forcément. »

Un premier jour de déconfinement qui montre en revanche que, pour l’heure, nos droits démocratiques, eux, restent confinés comme en témoigne l’arrestation de Gilets jaunes place de la République pour s’être rassemblés ou la nasse du rassemblement contre les violences policières à L’Île-Saint-Denis. Et là encore, ceux qui sont en première ligne ce sont les classes les plus précaires et les quartiers populaires.


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