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Soutien à Dominique Henry, militante de la confédération paysanne qui risque la prison

Affaire des « mille vaches » : l’acharnement judiciaire se poursuit

Dominique Henry est une ancienne institutrice et agricultrice en retraite dans le Haut Doubs, militante de la Confédération Paysanne. A l’occasion de la mobilisation initiée en 2013 contre le projet de la « ferme » des 1000 vaches, elle a été condamnée, comme neuf de ses camarades à de la prison avec sursis en 2014. Mais elle n’en n’a visiblement pas terminé avec la justice : elle est convoquée le 12 janvier prochain au tribunal correctionnel de Montbéliard, pour refus de prélèvement ADN, ce qui constitue un délit depuis que cette procédure a été étendue largement. Elle risque la prison. Sael Bison

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Retour sur les faits


Le 28 mai 2014, une cinquantaine de militants de la Confédération paysanne de toute la France sont allés sur le site de la future ferme-usine des 1000 vaches pour démonter symboliquement quelques pièces de la salle de traite. L’objectif de cette action de jour à visage découvert : ramener les pièces sur Paris pour les rendre à Stéphane Le Foll (Ministre de l’agriculture) et Ségolène Royal (Ministre de l’écologie et du développement durable) alors qu’ils inauguraient le « printemps bio » au parc de la Villette. Dominique Henry participe à cette action qu’elle présente elle-même ainsi : « Démonter, dévisser, déboulonner, ne rien casser bien sûr. » Pour ce simple fait, elle est interpellée puis gardée à vue pendant plus de 2 jours, avec 3 autres militants, car elle a refusé le prélèvement d’ADN exigé par la police. En septembre 2014, elle est donc jugée par le tribunal d’Amiens avec neuf de ses camarades, condamnés en première instance pour des faits allant du « refus de prélèvement ADN » à la « dégradation en réunion ». Elle écopera d’une peine de prison avec sursis. La condamnation est confirmée en appel mais sa peine se verra qualifiée de « symbolique », en raison de la reconnaissance de son statut de lanceuse d’alerte.

Mais Dominique n’est pas au bout de ses peines : le 24 décembre 2015, la gendarmerie du Russey la convoque. Un nouveau prélèvement d’ADN lui est réclamé. Elle le refuse une deuxième fois. Pour cette raison, elle comparaîtra le 12 janvier prochain devant le tribunal de Montbéliard. Elle risque jusqu’à 1 an de prison et 15 000 euros d’amende.

La « ferme » des mille vaches : de l’industrialisation massive de l’élevage bovin à la défense des intérêts du grand patronat

Cette action s’inscrit dans le contexte plus large de lutte contre l’industrialisation de l’élevage, jusqu’à alors limitée aux volailles. La « ferme » des mille vaches incarne l’une des premières tentatives de développer l’élevage bovin à grande échelle à l’image des énormes complexes industriels qui existent déjà aux Etats Unis. Conséquence : alors que les plus grosses exploitations de la région disposent d’une cinquantaine de vaches laitières, M.Ramery, entrepreneur en BTP patron de 3500 salariés et 365ème fortune de France, stocke aujourd’hui plus de 700 animaux et compte encore augmenter son effectif. Pourtant, le tribunal administratif lui avait imposé un quota de 500 vaches et limité l’étendue du permis de construire. Aucune de ces exigences n’a été respectée par l’industriel sans qu’évidemment il ne soit inquiété par la justice.

Et pour cause, son projet relève d’un dispositif bien rodé : « Le projet de M.Ramery, subventionné par la PAC, prévoit de produire de l’électricité à partir d’un immense méthaniseur alimenté par le lisier, le fumier, des résidus de céréales et autres végétaux. Le méthane libéré par la fermentation alimente un générateur électrique d’une puissance équivalente à 25 éoliennes. Le courant sera racheté par EDF. Encouragé par les primes, le méthane agricole est un nouvel agro-business. Le lait n’est qu’un sous-produit du lisier, du lait « low cost », vendu à moins 20% du prix du marché » explique Dominique Henry. Il s’agit là bien évidemment d’une concurrence intenable pour les petits paysans, synonyme d’une détérioration radicale de leurs conditions de vie, comme de celles des ouvriers à la chaine de cette future ferme-usine.

Ainsi, depuis l’annonce du projet en 2013, les habitants de la région se sont massivement mobilisés, organisés notamment autour de l’association NOVISSEN (NOs VIllages Se Soucient de leur ENvironnement) et d’autres collectifs écologistes.

Répression des actions syndicales et criminalisation des militants


Dans ce contexte, l’extension du prélèvement ADN, procédure initialement prévue à l’encontre des « délinquants sexuels » est loin d’être anodine.

Dominique Henry, interviewée par France 3, raconte : « En 98, au départ, ce fichier est créé pour les délinquants sexuels puis étendu par Nicolas Sarkozy en 2003 pour toutes les personnes gardées à vue et reconnues coupables. Ce qui est mon cas. Mais sont exclues celles qui sont coupables d’abus de confiance ou de biens sociaux, de favoritisme, de corruption ou trafic d’influence, bref on le comprend, tous les délinquants en col blanc... »

Si vous êtes dans ce fichier, c’est pour 40 ans. Pendant 40 ans, vous êtes un suspect permanent. Dans mon ADN, il y a des caractéristiques personnelles, sur le groupe ethnique ou encore des informations sur ma santé ou des maladies génétiques. Je pense à mes enfants, mes petits-enfants. On est tous concerné. Je fais le parallèle avec la seconde Guerre Mondiale : dans l’histoire, on a vu des fichiers utilisés à mauvais escient. »

Le procès de Dominique doit se comprendre à l’aune du processus de répression aigue des militants politiques et syndicaux : qu’il s’agisse des Goodyear, des militants de la loi Travail des frères Traoré ou encore de Cédric Herrou, les condamnations pleuvent et nombreuses sont les victimes d’une justice de classe qui libère dans le même temps Christine Lagarde et blanchit les policiers qui tuent impunément.

De Montbéliard à Amiens : les 11 et 12 janvier, tous ensemble contre la répression et la justice de classe !

En effet, le procès de Dominique Henry se déroulera le lendemain du rendu du jugement faisant suite à l’audience du 19 octobre 2016 à Amiens pour les 8 Goodyear. Le 19 octobre, une mobilisation d’ampleur en soutien aux Goodyear a permis de faire tomber la réquisition du parquet à de la prison ferme. Face à ce tournant autoritaire et liberticide, il est nécessaire de lutter ensemble pour la défense de nos libertés politiques et syndicales et mettre un coup d’arrêt à la criminalisation de l’action militante.

Alors, d’Amiens à Montbéliard, en passant par Nice et Bobigny, soyons nombreux pour exiger la relaxe de tous les inculpés et l’arrêt immédiat des poursuites contre nos camarades militants et militantes.

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