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Nos vies pas leur profits !

Après Pfizer et Moderna, AstraZeneca revoit ses livraisons à la baisse. D’où vient la pénurie ?

La logique du profit et de la propriété privée est en train d’accroître un problème qui commence à toucher fortement les pays impérialistes : les limites des capacités de production des laboratoires rattrapent en forme de pénurie les pays qui se croyaient à l’abri après avoir accaparé les doses.

Pepe Balanyà

3 février 2021

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Pénurie du vaccin : les impasses de la gestion capitaliste de la crise

Le démarrage de la campagne de vaccination, guidée par la concurrence économique entre puissances et les intérêts des laboratoires détenant les brevets du vaccin, a dévoilé l’hypocrisie des beaux discours sur la « distribution abordable et équitable du vaccin », prônés notamment par les dirigeants des principaux pays de l’Union Européenne. La réalité de la gestion capitaliste de la crise sanitaire s’impose de plus en plus face aux mensonges des différents gouvernements, et s’exprime par des limites particulières dans chaque pays et des inégalités profondes dans l’accès au vaccin à l’échelle internationale. 82% de la production de Pfizer et 78% de la production de Moderna sont ainsi détenus par les premières puissances mondiales. A titre d’exemple l’Union Européenne s’est engagé à l’achat de presque 2,6 milliards de doses pour une population totale de 600 millions d’habitants.

Cependant, la logique du profit et de la propriété privée est en train d’accroître un problème qui commence à toucher fortement les pays impérialistes : les limites des capacités de production des laboratoires rattrapent les pays qui se croyaient à l’abri après avoir accaparé les doses, et fait plâner le spectre de la pénurie. En effet le refus de partager les brevets avec d’autres laboratoires ou avec les pays dominés par l’impérialisme, tel que l’ont demandé l’Inde et l’Afrique du Sud, réduit les capacités de production mondiales de doses du vaccin, y compris ceux commandés par les États occidentaux comme la France, l’Espagne, l’Allemagne ou le Royaume Uni.

Les exemples ne manquent pas et les impasses de la gestion capitaliste de la campagne vaccinale s’accumulent. Encore récemment le laboratoire suédo-britannique AstraZeneca a déclaré ne pas pouvoir garantir 60% des doses initialement promises, tandis que les autorités sanitaires en France, en Allemagne ou encore en Espagne conseillent de ne pas recourir à ce produit pour vaciner les plus de 65 ans faute de données suffisantes concernant ses effets sur une population âgées. Une claque pour l’UE, puisque la commission européenne avait débloqué 336 millions d’euros pour aider le laboratoire a développer son vaccin et accroître ses capacités de production. En effet, de par son prix et ses facilités de stockage et de transport, le vaccin du goupe suédo-britannique était censé être, comme l’expliquait Sandra Gallina (directrice générale de la Santé au sein de l’exécutif européen) « le vaccin de masse pour le premier trimestre » 2021. Ces annonces, qui s’ajoutent au fait que Moderna ne peut pas honorer plus de 25% des commandes faites par l’Union Européenne et que Pfizer doit reporter d’un mois les nouvelles livraisons, ont brisé les espoirs d’un plan vaccinal massif et rapide au sein de l’UE.

Le chacun pour soi : les réponses des gouvernements face à la pénurie

Alors que de nombreux États avaient attribué des aides financières aux grands laboratoires en échange de contrats leur donnant la primauté sur les doses produites, la contraction de la production a exacerbé ce « nationalisme du vaccin ». L’enjeu pour les pays est de taille, car au-delà de l’aspect sanitaire, l’enjeu est également économique : le pays qui recevra le plus de doses des vaccins pour immuniser sa population pourra prétendre à relancer son économie au plus vite et ainsi gagner un avantage par rapport aux capitalistes des autres pays.

Sous ces fortes pressions à la concurrence, la volonté de l’UE et de son tandem dirigeant Merkel-Macron d’afficher une démarche unitaire et un accès libre au vaccin commence à s’estomper. Le 29 janvier l’Union Européenne a mis en place des mesures extraordinaires pour bloquer la sortie des vaccins du territoire communautaire vers d’autres pays afin de conserver la priorité sur les doses. Ces tendances nationalistes ont récemment connu leur point culminant avec le Royaume-Uni, où AstraZeneca possède des usines de production de vaccins. Après les annonces concernant la baisse brutale de livraisons prévues, l’UE a accusé le Royaume-Uni de retenir des doses qui étaient censé lui parvenir.

Dans la continuation de ces tensions la Commission européenne a annoncé ce lundi 1er février sa volonté de se tourner désormais vers les vaccins BioNTech-Pfizer et Johnson & Johnson pour prendre ses distances avec le laboratoire AstraZeneca. Si elle se réalise, cette menace serait un coup dur pour le groupe suédo-britannique qui verrait un de ses principaux marchés s’envoler. 

Contre la gestion capitaliste de la crise sanitaire : imposons le partage des brevets et la nationalisation sous contrôle ouvrier des laboratoires privés

Les contrats secrets, la propriété privé des brevets, le soutien financier des États à ces laboratoires à des fins privés ou encore les mesures protectionnistes vont à l’encontre de la santé la majorité de la population, notamment la plus précaire et faisant partie des pays dépendants. Même l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), qui est au service des intérêts des premières puissances mondiales, avait alerté du fait que le nationalisme et la concurrence entre pays risquait de prolonger la pandémie. En effet, la forte contagiosité de la Covid-19 par delà les frontières et le développement de variants font qu’aucune solution nationale à la crise sanitaire n’est possible.

Les salaries de Sanofi en grève avaient dénoncé récemment les conséquences de cette gestion irrationnelle de la crise sanitaire. Alors que les lignes de production de Sanofi étaient à l’arrêt faute de brevets à exploiter, les grévistes nous expliquaient que « rien n’empêcherait de produire ces vaccins qu’on connaît, qui fonctionnent et les produire chez Sanofi. Le seul problème, c’est l’ego des dirigeants : il ne veulent pas admettre qu’ils se sont trompés ». « On a beau être en guerre, on est pas capable de mettre la pression sur les entreprises capitalistes pour qu’elles produisent plus de doses. Si on était en guerre, en cas « d’effort de guerre », on y arriverait. Nous on est pour prendre les moyens de production chez Sanofi, et faire l’un des trois vaccins qui est aujourd’hui sur le marché. »

La production du vaccin et sa distribution ne peuvent pas dépendre des intérêts du poignet de capitalistes qui possèdent les grands groupes pharmaceutiques. Pour mettre l’ensemble des ressources disponibles au service de la résolution de la crise sanitaire et sortir de l’impasse de la gestion capitaliste de la pandémie, il est nécessaire de lutter pour imposer le partage des brevets et la nationalisation sous contrôle des salariés des laboratoires privés.


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