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Baisse de l’indemnisation, renforcement des contrôles…

Après la loi travail, Macron s’attaque à l’assurance-chômage

Le coup d’envoi des négociations sur la réforme de l’assurance-chômage vient de s’ouvrir ce mercredi avec la réception au ministère du Travail des partenaires sociaux syndicaux et patronaux. Au menu de ce chantier, l’ouverture d’une indemnisation aux indépendants qui pourrait bien masquer une baisse des indemnisations, le renforcement des contrôles des chômeurs par Pôle Emploi mais aussi la reprise en main, par l’Etat, des caisses d’assurances, qui fait grincer des dents les représentants syndicaux et patronaux.

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crédits photo : PHOTOPQR/« L’ALSACE »/JEAN-FRANCOIS FREY

Macron veut en finir avec le modèle assurantiel

Une fois n’est pas coutume, les organisations syndicales (CFDT, CFTC, CFE-CGC, FO et la CGT) et patronales (Medef et la CPME) ont signé conjointement un texte d’interpellation au gouvernement dans lequel ils affirment leur attachement au modèle de cogestion des caisses de l’Unedic. En effet, actuellement et depuis 1950, syndicats et patronats gèrent ensemble l’assurance-chômage et négocient ensemble les conventions Unedics sur les modalités d’indemnisation des chômeurs. L’Etat lui, ne faisait jusque là que valider leurs ententes. Or, dans ses promesses de campagne, Emmanuel Macron avait bien fait savoir qu’il voulait reprendre la main sur les caisses de l’assurance chômage, assurant ainsi à l’Etat un contrôle plus étroit de l’Etat sur la gestion et les modalités d’indemnisations des 6.3 millions d’inscrits à Pôle Emploi.
Cette voie contre laquelle les partenaires sociaux font front est cependant déjà partiellement engagée : en effet, la suppression des cotisations sociales salariées prévue pour janvier 2018 et partiellement compensée par une hausse de la CSG, décision du gouvernement, est une façon de réduire de manière significative les fonds des organismes paritaires Unedic. Au même titre que le budget de la Sécurité Sociale, l’Unedic est dans le viseur du gouvernement qui cherche avant tout à liquider la logique assurantielle de protection sociale. En étouffant les différentes caisses (retraites, maladie, chômage) par le manque de moyen, en générant des déficits qui justifient des baisses dans les montants d’indemnisations, Macron un peu plus vite que ses prédécesseurs, créait aujourd’hui les conditions d’un consentement à la liquidation de la Sécurité Sociale. Reprendre la main sur les caisses de l’Unedic, c’est également ouvrir la possibilité du passage d’un modèle assurantiel d’assurance chômage, basé sur le principe de cotisation mais ouvrant droit à des indemnisations élevées, à un modèle universel, à l’anglo-saxonne, où le versement de prestations minimales est conditionnée au niveau de revenus. En cela, l’opposition conjointe des organisations syndicales associée à celle du patronat, sous la forme d’un texte, parait bien timorée.

L’assurance-chômage « universelle » et rabotée

Promesse de campagne, le gouvernement souhaite également élargir l’assurance chômage aux indépendants qui aujourd’hui ne cotisent pas dans les caisses de l’Unedic. Une mesure très ambiguë car d’une part, elle a un aspect social et se présente comme un élargissement « universel », à tous des droits à l’assurance chômage. En effet, elle protégerait contre les risques de chômage, et de chute de l’activité tout un pan de petits patrons et de travailleurs ubérisés dont le nombre n’a cessé d’exploser depuis la création du statut d’auto-entrepreneur en 2008 par Nicolas Sarkozy, et qui font face, sans protection, aux aléas de l’activité et du climat des affaires.

Cependant, tandis que les contours techniques de son application ne sont toujours pas donnés, on peut se poser des questions quant à sa modalité de financement. Ainsi l’universalisation des prestations chômages pourrait en effet couvrir un abaissement universel et généralisé du montant des indemnités chômages, soit de manière transitoire, avec l’instauration d’un plafonnement, soit de manière directe avec l’application d’un minimum pour tous. Là encore, l’axe de présentation de la réforme est finement pensé puisqu’elle opposerait de fait les intérêts des indépendants à celle des salariés.

Le renforcement du contrôle des chômeurs

Autre axe de la réforme, et dont les contours ne sont pas encore fixés, c’est le renforcement du contrôle des chômeurs inscrits à Pôle Emploi. C’est bien la petite musique qui est jouée depuis que le gouvernement Macron et qui, dans la bouche de Christophe Castaner, précisait que « la liberté, ce n’est pas de bénéficier des allocations chômage pour partir deux ans en vacances » ou encore du député LREM Damien Adam qui parlait des chômeurs qui « partent en vacances aux Bahamas grâce à l’assurance-chômage ».

La méthode de la carotte et du bâton

Voilà les grands champs de la réforme à venir et dont les négociations s’ouvrent sur ce mois de décembre. Aucun texte n’a été pour l’instant distribué à aucun des partenaires syndicaux, ni patronaux. A première vue, la méthode de l’occultation, de la divulgation des projets et des mesures envisagées par le gouvernement, qui avait valu lors de la « négociation » sur les ordonnances de la loi travail cet été, semble partie remise. Tout comme celle consistant à annoncer non officiellement le pire, le non envisageable, pour laisser des marges de manœuvres à l’exécutif : lors de la négociation des ordonnances de cet été, la suppression des accords de branche, dont y compris le patronat ne voulait pas avait été brandie comme une épée de Damoclès, pour faire passer la fusion des instances de représentations, la facilitation des licenciements, la possibilité de recours au référendum et à la négociation au niveau de l’entreprise. A ce petit jeu de dupe, Force Ouvrière avait largement coopérer, justifiant ainsi le résultat des ordonnances par un « on a évité le pire ». Aujourd’hui, il se pourrait bien que ce soit cette suppression du paritarisme de l’Unedic, dont ni le patronat, ni les syndicats ne veulent qui serve à la fois de bâton et de carotte pour offrir aux bureaucraties syndicales, les plus conciliantes, de quoi calmer leurs bases. En attendant, et alors que c’est dans la rue que devraient s’organiser la lutte contre la destruction de l’assurance chômage, les directions syndicales continuent à jouer le jeu de dupe du gouvernement au ministère du Travail.


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