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Qui sont les vrais assistés ?

Billet d’humeur. Chômage : de quel côté est la honte ?

De quoi au juste sont coupables les chômeur·euse·s pour ainsi éprouver de la honte ?

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C’est que l’expérience de l’injustice dont ils·elles sont victimes est sans cesse transformée par les discours dominants en une défaillance morale de leur part. Non seulement les chômeur·euse·s seraient responsables de leurs propres maux, mais ils seraient de surcroît coupables de nombreux autres : fainéants, paresseux, assistés etc – quand ils ne se taillent pas carrément au Bahamas.

Je ne souhaite sérieusement à personne de souffrir les affres du chômage : désocialisation, perte d’identité sociale, précarité socio-économique accrue. Sa réalité, loin de relever de « l’assistanat », a tout du calvaire. Sans compter que le chômage et la précarité touche en particulier des populations déjà fragilisées : femmes, jeunes, populations racisées...

Car la stigmatisation accrue dont sont victimes les chômeur·euse·s, en plus d’être abjecte dans ses présupposés moraux, est totalement infondée économiquement.

Le premier point que je veux évoquer est celui-ci : le chômage est un problème structurellement induit par la nature même du capitalisme. Rien de neuf ici, Marx l’expliquait déjà : plonger une armée de gens dans la misère sociale est inscrit dans la tendance même du capitalisme – et le meilleur moyen d’accroître la pression sur les travailleurs pour leur faire accepter des conditions de travail de plus en plus ignominieuses.

Tout.e chômeur·euse a déjà fait l’expérience de cette réalité pourtant déniée par les théoriciens bourgeois de l’économie : tu refuses de travailler plus que prévu ? Pas grave, un·e autre chômeur·euse est prêt.e à faire plus, et à moindre coût.

On appelle ça tantôt « le marché du travail », tantôt, plus sobrement, « la réalité. »

Ce point appelle le second : moraliser et individualiser le problème du chômage constitue un déni de réalité. Le chômage est un problème structurellement induit par la nature même du système capitaliste – et ceci il faut le marteler. Le contrôle n’y changera rien. Tout ceci relève de la propagande patronale adoptée par un gouvernement au service des intérêts bourgeois.

Les chiffres l’indiquent : même si tous les emplois étaient pourvus, le nombre de chômeur·euse·s seraient encore légion. Donc l’argument de la fainéantise, en plus d’être moralement ignoble, ne tient pas économiquement.

De quoi accuse-t-on exactement les chômeur·euse·s, de ne pas assez « se bouger le cul » pour chercher un travail qui n’existe pas ?

Et quand on parle de travail, de quel travail parle-t-on ?

Car il est nécessaire de rappeler encore une fois le genre de travail qui est proposé aux personnes aux chômages – du moins celles et ceux peu qualifié·e·s : horaires de travail indécents, conditions inqualifiables, pressions de la direction, salaires ridicules…

Ces « emplois » sont en réalité des machines à fabriquer de la précarité – et des individus brisés par la violence économique. Alors quand un·e chomeur·euse refuse – légitimement – d’accepter un travail ignominieux et indécent économiquement, le·la voilà immédiatement culpabilisé·e : « t’as pas honte de refuser un boulot ? »

Non. Il ne faut pas avoir honte de refuser un travail indécent.

Alors de quel côté est la honte ?

Du côté de ces moralisateurs petits-bourgeois arrogants qui fustigent les chômeur·euse·s, du côté des patrons et des politiques qui ne proposent aux hommes et aux femmes que des conditions de travail inhumaines relevant de l’exploitation – mieux, qui gèrent l’exploitation – ou du côté des chômeur·euse·s qui subissent de plein fouet la violence de l’exploitation capitaliste ?

Ce qui me mène au dernier point : qui sont les vrais assistés ?

La fraude au RSA coûte 800 MILLIONS d’euros par an, celle sur l’impôt sur les sociétés 27 MILLIARDS.

La fraude aux allocations chômage coûte 39 MILLIONS d’euros, celle sur la fraude fiscale 60 MILLIARDS.

L’ISF a été supprimé, faisant économiser 68.000 euros à la Ministre du travail – par ailleurs coupable de 671 infractions au Code du travail du temps où elle dirigeait Business France - et pendant ce temps le Gouvernement supprime les APL et stigmatise les personnes au chômage.


Qui ne respecte pas la loi ?

Qui sont les vrais parasites ?

Qui sont les vrais fainéants qui vivent de l’exploitation des travailleurs ?

La classe bourgeoisie est, a toujours été, et restera toujours une classe parasitaire qui prospère par l’exploitation la plus crue, la plus violente, la plus immorale qui soit.

Alors, qui doit avoir honte ?

Le « marché du travail », pas plus que le chômage, ne constitue une « réalité ». C’est le produit d’un rapport de forces qu’il faut savoir poser – afin de s’y opposer. Ce qu’il faut, c’est rendre cette « réalité » inacceptable – car inacceptable, elle l’est au plus haut point.

Chômeurs, chômeuses : n’ayez plus honte, car la honte n’est pas de votre côté.


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