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Trop couvertes ou pas assez, aux femmes de décider !

Contre l’interdiction du burkini, le NPA se jette à l’eau

Sarah Carah Comme chaque année, le Nouveau Parti Anticapitaliste organise son université d'été au bord de la Méditerranée, dans la ville de Leucate. Pour tous les militants et militantes, cet événement est un moment important de rencontre, de partage et d'élaboration collective sur le bilan de l'année écoulée, et les perspectives pour la rentrée. Mais cette année, c'est jusque sur la plage du camp de vacances où l'Université d'été est organisée que la politique est venue chercher les militants estivaux : le maire de Leucate, à la suite de nombreux maires de la Côte d'Azur, venait en effet de publier un arrêté contre le port du burkini. Pas question de laisser passer sans rien dire cette nouvelle mesure islamophobe sur nos plages !

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Alors que les arrêtés « anti-burkini » se sont multipliés ces dernières semaines, et que l’application concrète de ces mesures a déjà conduit à des scènes scandaleuses de déshabillage forcé de femmes par les forces de police, il apparaissait résolument impossible pour tous les camarades du NPA présents à l’Université d’été de ne pas réagir, au moins symboliquement, au fait que le lieu même de notre rencontre estivale était marqué par cette offensive islamophobe du gouvernement et de la droite. Contre les faux prétextes de l’état d’urgence, contre la stigmatisation des populations musulmanes ou immigrées, il fallait exprimer notre solidarité avec les femmes qui subissent de plein fouet cette forme de répression xénophobe.

Il a donc été décidé une action collective en deux étapes successives, où tous les camarades du NPA ou sympathisants présents à l’Université d’été, étaient conviés. Après une courte manifestation sur la plage, le cortège qui comptait entre 200 et 250 personnes s’est dirigé vers la mer, où les manifestants se sont jetés à l’eau, habillés ou non, aux cris de « Trop couvertes ou pas assez : c’est aux femmes de décider ! », sous les regards étonnés des vacanciers.

Le cortège a ensuite pris le chemin de la mairie, en traversant le centre-ville. « Qu’elles soient de droite ou socialistes : abrogation de toutes les lois racistes ! », « C’est pas le burkini qui ruine la société, mais la loi El Khomri et l’Etat policier ! » criaient les manifestants. Après une courte intervention de Christine Poupin, porte-parole du NPA, le cortège a poursuivi son chemin pour revenir au lieu de l’Université d’été pour reprendre les débats. De quoi témoigner que même en vacances, les militants anticapitalistes et révolutionnaires ne mettent pas de côté leurs revendications antiracistes !

Une première réaction... qui appelle à une réponse plus complète

Après de nombreuses années où l’extrême-gauche a pu être divisée sur la question de l’interdiction du port du voile, cette réaction immédiate d’opposition au contexte réactionnaire que les classes dirigeantes essayent d’imposer est salutaire. Si elle n’est pour l’instant que symbolique, elle marque néanmoins une première étape dans notre refus de voir les droits des femmes instrumentalisés à des fins réactionnaires, et notre opposition à la construction de cet « ennemi intérieur » musulman qui vise à diviser notre classe face aux attaques du patronat.

Mais pour répondre réellement à cette nouvelle offensive réactionnaire, il va nous falloir dépasser le débat que cherche à nous imposer le gouvernement. Car contrairement à ce que disent à longueur de journée politiciens et éditorialistes, la question qui est soulevée aujourd’hui n’est pas de savoir comment l’Etat français peut ou non combattre les courants islamistes réactionnaires, qui voudraient imposer aux femmes leurs comportements, tenues et pratiques. Cet Etat n’a fait que créer les conditions pour que ces courants se construisent, par les guerres qu’il a mené aux quatre coins du globe pour maintenir ses intérêts de grande puissance impérialiste, et celles qu’il mène au quotidien dans les quartiers populaires où le seul avenir proposé aux jeunes est un avenir de chômage, de misère et de violences policières. C’est bien au contraire de notre camp social, de tous les travailleurs, travailleuses et jeunes qui subissent la violence du système capitaliste, que la réponse doit venir.

En ce sens, nous ne pouvons nous arrêter à une riposte uniquement sur le terrain de l’anti-racisme et de la lutte contre l’état d’urgence. Il nous faudra marcher sur nos deux jambes, contre toutes les forces qui veulent dicter aux femmes leurs tenues et leurs comportements. Notre opposition à la politique répressive du gouvernement ne peut nous conduire à être indulgent envers le sexisme exprimé par les courants religieux – qu’ils soient d’ailleurs musulmans, catholique, ou autre. Pour cela, il ne suffira pas de dire que les femmes « trop couvertes ou pas assez » doivent décider. C’est d’un programme résolument féministe que les travailleurs, travailleuses et jeunes solidaires des femmes voilées victimes de la répression doivent se doter. Ce n’est ni à l’Etat, ni à nos pères, frères ou conjoints de décider pour les femmes !

Après de nombreuses années à avoir soutenu ou accompagné tacitement les mesures anti-voiles, une partie du mouvement féministe réagi aujourd’hui en s’opposant à l’interdiction, comme si cette goutte avait fait déborder le vase de l’adaptation aux institutions étatiques. Quoique bien tardif, ce revirement doit nous donner pour tâche de chercher à recomposer un mouvement féministe, ou au moins une de ses franges, sur des bases désormais résolument anti-racistes. Un mouvement qui regroupe et s’organise par et avec toutes les femmes, et en premier lieu, les femmes travailleuses, précaires, des quartiers populaires, qui ont été exclues de fait de ce mouvement, depuis bien trop longtemps. Pour cela, il nous faut construire un mouvement féministe qui lutte contre la sur-exploitation au travail, et contre les impositions patriarcales dans la famille, le couple, la rue et les lieux de travail. Ces revendications doivent être portées de la même manière, en solidarité, par le mouvement ouvrier, par l’ensemble des travailleurs, travailleuses et jeunes qui veulent s’opposer à la vague réactionnaire : c’est ainsi, en marchant sur nos deux jambes, que nous pourrons la faire reculer !


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