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Pour en finir avec le chômage de masse

Contre la loi travail et son monde, la CGT doit défendre un programme d’urgence !

Après bientôt trois mois de mobilisation, des secteurs stratégiques du monde du travail sont entrés dans la bataille contre la loi travail, se mettant notamment en grève reconductible.

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Ivan Matewan

Aux grèves dans les raffineries, les centrales nucléaires, dans les ports ou encore chez les routiers, pourraient très bien s’ajouter des grèves à la SNCF, à la RATP et dans l’industrie automobile. Dans beaucoup de secteurs, c’est notamment la CGT qui se trouve derrière cette nouvelle impulsion du mouvement pour le retrait total de la loi travail. Il s’agirait désormais d’amplifier la dynamique en généralisant la grève, pour construire un rapport de force vraiment capable d’en finir avec la loi travail. Pour en finir avec son monde qui nous condamne au chômage de masse, la CGT, et notamment Martinez, devrait au lieu de « négocier » des amendements à la loi travail, maintenir non seulement le retrait total mais proposer un programme d’urgence à destination de l’ensemble des travailleurs, précaires, chômeurs, jeunes et quartiers populaires.

L’entrée en grève des secteurs-clés de l’économie française a considérablement redistribué les cartes. À l’image du jeune « casseur » s’est substituée en l’espace de quelques jours celle du travailleur « bloqueur ». Dans les médias on ne cesse d’entendre parler de la « prise d’otage » qui serait actuellement en cours par « des minoritaires » qui « ne [feraient] pas la loi dans ce pays ». Pas de bol, l’offensive médiatique et idéologique à l’encontre des grévistes, de la CGT et du mouvement contre la loi travail ne semble pas jusque-là influencer vraiment l’opinion publique face à un gouvernement largement délégitimé par son propre autoritarisme.

Alors que la dynamique de la grève générale s’était vue empêchée après le 31 mars, elle semble progressivement se débloquer au fur et à mesure que des secteurs significatifs et stratégiques du monde du travail se mettent en grève à la suite de l’usage autoritaire de l’article 49.3 par le gouvernement pour faire passer sa loi en force. Dans ce contexte la possibilité d’une victoire, du retrait de la loi travail, se dessine de plus en plus pour la première fois depuis le début du mouvement, même s’il faudrait encore œuvrer à la généralisation de la grève afin de concrétiser cette possibilité.

Renouer le dialogue ou exiger le retrait total de la loi travail ?

Malgré la multiplication des appels à la grève reconductible dans de nouveaux secteurs comme le rail, les transports en commun parisiens ou le secteur aérien (contrôleurs, pilotes...), notamment de la part de la CGT, les déclarations récentes de Philippe Martinez peuvent laisser planer un doute sur sa volonté d’aller jusqu’au bout du bras de fer avec le gouvernement. L’heure n’est cependant pas à la tergiversation. S’enliser dans des négociations avec le gouvernement mènerait sans doute le mouvement dans l’impasse. Et la modification à la marge de quelques articles, aussi centraux soient-ils, ne constituerait qu’un recul très partiel, alors que les centaines de milliers de jeunes et de travailleurs mobilisés réclament haut et fort le retrait total de la loi. C’est cette revendication principale et unificatrice qu’il faut réaffirmer à l’heure actuelle.

Un programme d’urgence pour défendre et unifier le monde du travail

Cette revendication ne saurait de toute évidence suffire pour construire un mouvement d’ensemble capable d’obtenir le retrait de la loi travail, mais aussi d’en finir avec son monde. Les jeunes restent en partie mobilisés en dépit de la fin des cours dans les universités et des examens dans les lycées. Les précaires et chômeurs sont largement absents de la mobilisation, certains considérant peut-être que la lutte contre la loi travail n’est pas encore exactement la leur. Les travailleurs et jeunes des quartiers populaires qui subissent des taux de chômage et de précarité outranciers, la misère sociale ambiante, le racisme, l’islamophobie d’État et les violences policières au quotidien ne se sont pas encore joints à la mobilisation non plus. La condition pour cela, c’est que les secteurs en pointe de la mobilisation, notamment la CGT, doit se doter d’un programme capable de s’adresser aux précaires, aux chômeurs et aux jeunes des quartiers populaires, qui en souffrent le plus, pour en finir définitivement avec le chômage de masse et la précarité.

Pour cela, il faut commencer à revendiquer des mesures d’urgence contre la précarité et le chômage de masse. Le patron des patrons Pierre Gattaz accuse la CGT d’être « égal à chômage ». Pourtant, c’est lui qui propose la précarité généralisée comme solution aux problèmes de chômage. Martinez, la CGT, et toutes les équipes syndicales combatives doivent lui opposer l’exigence d’un travail et d’un salaire décent pour tous ! Ce n’est que par le partage de tout le travail existant et sans baisse de salaire que le chômage pourra être véritablement combattu. Augmenter le salaire minimum et l’indexer directement sur l’inflation sortirait des pans entiers des classes populaires de la pauvreté. Imposer un vrai CDI comme seule et unique norme du contrat de travail permettrait de lutter contre la précarité et d’en finir avec les divisions liées aux différents statuts (CDI, CDD, intérim...) qui existent parmi les salariés. Il faudrait également exiger l’abrogation de toutes les lois racistes, qui ne font que créer et entretenir la division de notre classe au profit total de la classe capitaliste. Cet ensemble de mesures s’avère d’autant plus nécessaire qu’il s’agit du seul moyen efficace de défendre les intérêts de l’ensemble de travailleurs, de chômeurs et de précaires et pour lutter contre les divisions de notre camp social sous la pression de la misère sociale généralisée.

Un programme démocratique contre l’autoritarisme et la répression

L’usage de l’article 49.3 a eu l’effet d’une étincelle dans le mouvement ouvrier. Le passage en force du gouvernement leur semble d’autant plus illégitime que 70 % de la population continue à s’opposer à sa loi travail. Le gouvernement réprime depuis des mois les lycéens et étudiants mobilisés à coup de gaz lacrymogènes, de matraques et de procès montés de toutes pièces. Maintenant il envoie ses forces répressives pour briser violemment des piquets de grève comme à Fos-sur-Mer mardi dernier et faire reprendre le travail de force.

La CGT, les syndicats dits « contestataires », et les équipes syndicales combatives, ne peuvent pas rester indifférents devant la surenchère répressive du gouvernement. Au Havre, les dockers de la CGT ont déclaré courant avril que si les CRS touchaient à un seul cheveu d’un seul étudiant mobilisé contre la loi travail, ils bloqueraient d’emblée le port. Cette logique doit se généraliser à travers le pays : à un seul opposant à la loi réprimé, à un seul travailleur gréviste violenté, à un seul piquet de grève brisé, la CGT doit répondre par l’amplification et l’extension de la grève et en musclant les piquets de grèves pour l’auto-défense, condition même de l’amplification. Aux tentatives des forces répressives d’encadrer ou de diviser nos cortèges dans la rue, la réponse doit être un refus ferme et définitif.

Devant l’ampleur du discrédit de la caste politicienne et une crise politique latente, il pourrait également exister des possibilités de faire tomber ce gouvernement au service du MEDEF. La question de savoir qui ou quoi remplacerait le gouvernement Valls reste entièrement ouverte. S’agirait-il d’un gouvernement un peu plus ouvert au dialogue, mais issu de la même majorité parlementaire, ou un gouvernement de droite issu des élections anticipées et prêt à aller encore plus loin ? Loin du « dialogue social », seul le développement des cadres d’auto-organisation dans les grèves – les assemblées générales, les comités de grève, les piquets à travers lesquels les travailleurs prennent eux-mêmes en main leur lutte – pourra poser à terme une alternative crédible et capable de remporter une victoire contre la loi travail et son monde !


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