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Université

Coup anti-démocratique de l’UNEF au Mirail lors des élections étudiantes

Au Mirail, les organisations étudiantes ne disposent pas d’une liste de diffusion pour communiquer avec les étudiants. L’envoi par l’UNEF de milliers de mails jeudi dernier, par des moyens inaccessibles aux autres, crée une inégalité entre les listes, et souligne l’adaptation d’une machine électorale à l’anti-démocratie universitaire. Pour éviter ce genre de manœuvres bureaucratiques, nous revendiquons la mise en place d’une liste de diffusion pour tous les élus et candidats à l’université.

Le Poing Levé Mirail

17 février 2021

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A l’université du Mirail, la semaine passée a été rythmée par la campagne électorale pour les élections étudiantes aux conseils centraux de l’université. La liste d’alliance entre l’UNEF et l’UET est arrivée en tête avec 608 voix (2 élus au CA, 5 à la CFVU), suivie par la liste du Poing Levé avec 515 voix (2 élus au CA, 4 à la CFVU). Les Étudiants progressistes récoltent 378 voix et la Fage 140. Une élection qui a marginalisé la liste macron-friendly de la FAGE tout en permettant d’entamer un débat parmi les organisations du mouvement étudiant sur les perspectives à proposer quant à une perspective purement syndicale ou davantage politique à l’université.

Lors de cette campagne, avec le Poing Levé, nous avons sans arrêt dénoncé l’anti-démocratie des conseils et de l’université. Le déroulement même de la campagne a été ponctué d’un incident, qui aurait pu les faire annuler pour fraude (au sens d’une inégalité entre les listes), et qui vient appuyer ce que nous avions martelé.

Dans l’après-midi et la soirée du jeudi 11 février, la veille de la clôture des votes, de nombreux étudiants ont reçu sans avoir communiqué leur adresse, un mail sur leur boîte universitaire leur appelant à voter pour la liste UNEF/UET. Ces mails étaient envoyés par plusieurs adresses portant le nom de domaine @unef.

Il semble très probable que ces adresses aient été récupérées à partir des listes électorales. Les adresses universitaires étant établies sur une base de « prénom.nom » suivi d’un nom de domaine propre à l’université, identique pour toutes et tous. L’utilisation de plusieurs adresses (des mails de commission de l’UNEF, l’adresse de l’UNEF Toulouse et celles de deux membres du Bureau National de l’UNEF, Hugo Pierson étudiant à Créteil, et Imane Ouelhadj étudiante à Nanterre) pour expédier ce mail, permettant de répartir les noms des étudiants selon l’ordre alphabétique, va dans le sens de l’hypothèse d’un « copier-coller » des listes électorales plutôt que d’une laborieuse récolte des mails sur des listes de promo. Envoyer, en potentiel, 30.000 mails demande une certaine organisation et des moyens conséquents : la plupart des boîtes mails standards ne permettent d’envoyer qu’un nombre limité de mails quotidiennement, et un envoi massif entraîne souvent l’arrivée desdits mail dans les spams.

Dans un contexte de vote électronique, alors qu’une infime minorité des étudiants sont présents sur l’université, un envoi de cette ampleur (qu’il faut encore déterminer, mais il est d’ores et déjà évident qu’il s’agit a minima de centaines de personnes, s’il ne s’agit de la quasi-intégralité des 30.000 étudiants de l’université) pose un problème important d’égalité entre les listes.

Une magouille symptôme de l’anti-démocratie universitaire

L’université a annoncé avoir lancé une enquête pour déterminer qui avait pu faire fuiter les listes électorales à des personnes extérieures à l’université, pour déterminer l’ampleur de la diffusion, et éventuellement entamer des poursuites judiciaires si le soupçon de fraude est avéré. En réalité, sa première préoccupation a été de se blanchir pour nier toute responsabilité dans l’inégalité de fait créée entre les listes. Si les listes étudiantes qui se présentent aux élections et les élus disposaient du droit démocratique de communiquer à l’ensemble des étudiants au moyen d’une liste de diffusion (qui garantirait l’anonymat de chacun), ce genre de manœuvre bureaucratique qui peuvent seulement se permettre des appareils comme l’UNEF ne se produirait pas ! C’est ce droit qu’il faut revendiquer aujourd’hui, un droit qui existe pour les syndicats du personnel administratif ou enseignant. En revanche, à l’adresse des étudiants, c’est la présidence et son équipe qui dispose du monopole de la communication !

Le genre de magouilles par courrier électronique auxquelles nous avons assistées est le produit de ce système anti-démocratique. C’est parce que les candidats aux élections ne peuvent pas communiquer, hormis par le dépôt de leur profession de foi, à l’ensemble des étudiants, qu’une inégalité de fait se crée. Seule une organisation avec des moyens financiers importants peut se permettre d’avoir recours à un service de mailing de masse.

Déjà, au Conseil d’Administration du 8 décembre 2020, nous prenions position contre l’inscription dans les statuts de l’université, de la possibilité d’un vote électronique, non comme simple dérogation en période de pandémie mais comme possibilité normalisée en cas de « force majeure »... Nous rappelions à ce sujet la fuite de données de 100.000 étudiants et 10.000 personnels provoquées par le prestataire d’organisation du vote en ligne de l’université fédérale en février 2020 tout en soulignant l’avantage qu’une campagne dématérialisée pouvait conférer à des grosses organisations, plus machines électorales qu’organisation de terrain réellement existantes à l’université. La présidente et sa majorité n’avaient évidemment aucunement tenu compte du désaccord des organisations étudiantes (dont celui de l’UNEF).

C’est finalement ce qu’il s’est passé lors de ces élections. Pour compenser son absence de forces militantes et garantir sa place dans les instances universitaires, l’UNEF a, comme à son habitude, fait descendre une dizaine de militants d’autres villes qui font le tour des campagnes électorales universitaires dans toute la France, tout en ne se gênant pas d’user de ce genre de combines bureaucratiques. Une pratique qui témoigne de leur manque d’existence militante au Mirail, mais aussi d’une aptitude décomplexée vis-à-vis de ces pratiques, puisque ce sont des étudiants extérieurs à l’université qui ont dû envoyer ces mails. Un résultat qui ne s’est pas avéré particulièrement payant (mais peut-être nécessaire), la liste UNEF/UET arrivant en tête par seulement 93 voix sur 1800 votants.

Pour l’heure, les autres organisations étudiantes n’ont pas encore communiqué sur le sujet. L’UET qui faisait alliance avec l’UNEF ne s’est pas exprimé non plus à propos de ces manœuvres bureaucratiques bafouant la participation égalitaire des listes aux élections. Au lieu de s’opposer à une mesure anti-démocratique, aux côtés des autres listes, l’équipe électorale de l’UNEF a préféré profiter par la bande de cet anti-démocratisme pour assurer leur position dans les conseils. Une attitude absolument adaptée au système universitaire, incapable d’accorder les droits démocratiques les plus élémentaires tant l’ensemble de leur « vie démocratique » n’est que de la poudre aux yeux.

L’unité pour lutter contre l’anti-démocratie universitaire, pas pour maintenir des appareils de co-gestion de la misère

Les militants de l’UET nous ont interpelé à plusieurs reprises sur notre refus de « faire l’unité » avec l’UNEF. Cet épisode nous semble précisément être une des raisons pour lesquelles nous avons refusé une telle alliance électorale. Nous parlons d’une organisation qui refuse de dénoncer l’anti-démocratie des conseils et joue un rôle de partenaire social avec les institutions universitaires et l’Etat, et déploie toutes ses ressources d’appareil dans les élections alors que leur nombre de militants se compte sur les doigts d’une main dans notre université. Bien qu’il y ait eu des précédents bureaucratiques bien pires lors de mobilisations étudiantes (comme l’invention de faux mandats issus d’AG fantômes pour obtenir plus de places dans les coordinations étudiantes, la négociation ouverte avec des gouvernements), cela vient s’ajouter à une longue liste de magouilles pour assurer une présence institutionnelle malgré un déclin militant indiscutable. Par ailleurs, la mobilisation de tout l’appareil de l’UNEF pour ces élections contredit l’argument, avancé par l’UET pour justifier ce partenariat, d’une alliance locale avec une section toulousaine plus à gauche. Ou alors faut-il assumer une alliance avec l’UNEF en général, mais les faits vont à l’encontre de l’argument du localisme. Ce sont bien les membres du Bureau National, issus de la tendance majoritaire (ouvertement co-gestionnaire et bureaucratique, opposée à l’auto-organisation des étudiants, héritière des pires trahisons à l’encontre mouvement étudiant) qui ont mené la campagne et envoyé ces mails.

La seule solution pour éviter de telles méthodes anti-démocratiques à l’avenir est la mise en place d’une liste de diffusion pour les organisations élues à l’université et les listes candidates, pour communiquer avec l’ensemble des étudiants. Nous ne croyons pas qu’une enquête de l’université, par ailleurs menée à huis clos hors du regard des étudiants (les principaux concernés dans l’histoire) règle le problème. Le monopole de la présidence qui peut raconter sa version des faits sur ce qu’il se passe à l’université est un signe de plus, s’il en fallait, de l’anti-démocratie qui y règne. Une telle liste de diffusion permettrait au moins aux élus, et aux candidats lors des élections, de communiquer en toute égalité avec les étudiants et empecherait que des appareils comme l’UNEF puissent profiter de l’anti-democratisme à l’université pour son propre bénéfice électoraliste. Nous revendiquons à ce titre qu’une telle liste soit mise en place à l’université Toulouse-II-Jean Jaurès / Le Mirail. Une revendication que les organisations étudiantes pourraient porter de front plutôt que de faire jouer les appareils pour tirer des avantages pour soi-même de l’anti-démocratie universitaire.

Au Poing Levé, nous affirmons que n’est pas dans les conseils centraux que nous obtiendrons de quoi améliorer la situation de la jeunesse étudiante, que nous obtiendrons un revenu à la hauteur du SMIC pour en finir avec la précarité, que nous obtiendrons les embauches et la mise à disposition de locaux nécessaire à la réouverture des facs, tout cela nous l’obtiendrons par des mobilisations massives. Mais dans une telle perspective et alors que la grande majorité des étudiants se retrouvent dans une situation d’isolement avec peu de capacités pour s’organiser et communiquer, nous insistons sur la nécessité de l’obtention de ce droit démocratique qui existe dans d’autres facs mais pas au Mirail.


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