Le 21 mai à l’université du Mirail de Toulouse, auraient dû se tenir les examens d’anglais de niveaux A2 et B1, qui correspondent à l’anglais élémentaire et l’anglais pré-intermédiaire. Les quelques 3000 étudiants convoqués à cette date ont pu découvrir la veille au soir (le 20 mai, vers 20h30), sur le portail numérique de l’université, un message laconique signé de la responsable du département, leur annonçant l’annulation des examens en raison d’un problème « indépendant de la volonté de l’équipe enseignante ».
Les messages se sont ensuite succédés sur le portail, pour établir de nouvelles modalités d’évaluation. Dans un premier temps, les étudiants ont été avertis qu’ils se verraient tous attribuer la note de 10 sur 20, avec une possibilité de se rendre aux rattrapages en cas d’insatisfaction. Cette décision désavantage gravement les anglicistes dans l’incapacité de se rendre à la deuxième session d’examens à la fin du mois de juin, ainsi que ceux pour qui la mention « rattrapage » sur un dossier peut être un élément rédhibitoire lors de la demande d’intégration d’une école.
A la suite d’une pression des syndicats étudiants, la direction du département d’anglais a finalement opté pour une autre solution. Ils ont fait le choix de reporter la note obtenue au premier semestre par les étudiants sur leur relevé du deuxième semestre, à l’exception de ceux qui n’avaient pas obtenu la moyenne ou n’étudiaient pas encore au Mirail. Ces derniers obtiennent la note de 10, comme le prévoyait le premier message et chacun est libre de se présenter aux deuxièmes sessions d’examen s’il le souhaite. Pourtant, la mention « rattrapage » sera visible sur les dossiers des étudiants s’ils s’y rendent et aucune compensation financière n’a été pensée pour dédommager les personnes qui ont parfois fait plus de cinq heures de voyage avant d’apprendre que leur examen était annulé.
Cet événement est révélateur de nombreuses incohérences dans le système éducatif en général, et au Mirail en particulier. Il est affligeant, tout d’abord, de voir à quel point le système de notation est vide de sens. Ou plutôt, il a un sens pour ceux qui cherchent à nous sélectionner, nous mettre en compétition. Un sens qui, avec l’austérité sur les facs, tourne en plus à l’absurde en distribuant des notes arbitraires par exemple. Le laconisme des messages d’annulation est la preuve du peu de considération porté aux étudiants aujourd’hui, dans le système français. L’importance donné à ce fait par les enseignants et les étudiants nous montre à quel point l’évaluation est centrale dans ce système universitaire de plus en plus méritocratique. Si on nous apprend bien une chose à la fac, c’est à nous mettre en concurrence entre nous, comme cela nous attend dans le monde du travail, au dépend d’un enseignement auquel tout le monde devrait pouvoir prétendre.
Il faut également savoir que le problème à l’origine de cette annulation est l’attribution informatique de mêmes salles à deux sessions d’examensdifférentes : l’anglais et le DAEU (diplôme équivalent au baccalauréat). Les problèmes d’attribution de salles sont monnaie courante au Mirail depuis quelques mois. Ils sont engendrés pour la plupart par les travaux menés par Vinci dans le cadre de la reconstruction du campus. Ainsi, l’annulation d’un examen concernant plusieurs milliers d’étudiants ne fait que couronner une série de dysfonctionnements dans l’organisation générale de l’université. Au cours du second semestre de cette année, de nombreux professeurs ont été amenés à annuler des cours, à changer de salle au milieu d’un TD, en quelques mots : à travailler dans des conditions déplorables. A titre d’exemple, les professeurs et étudiants des licences en Communication et Art du Spectacle, créées il y a moins de quatre ans, se sont vus renvoyés de salles en salles à de nombreuses reprises et cela n’est pas près de se terminer pour la simple et bonne raison que lorsque les plans du nouveau campus ont été dessinés, ladite licence n’existait pas.
Face à cette dynamique, le Mirail, qui reste une fac avec une forte tradition de lutte comme on l’a encore vu en novembre, pourrait sur cette base apporter la seule réponse possible à ces absurdités, c’est-à-dire une réponse des étudiants, enseignants et personnels, qui ensemble, peuvent lutter non seulement contre la casse de l’Université et les coupes budgétaires, mais aussi pour des universités non-compétitives, émancipatrices et ouvertes à toutes et tous.
03/06/2015{{}}
