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"Grand débat" : comment Macron compte essayer d’endormir les Gilets Jaunes

Pour tenter d’endiguer tant bien que mal le mouvement des Gilets Jaunes qui a ouvert une crise sans précédent depuis le début de son quinquennat, bien loin d’être refermé, Macron joue actuellement sur plusieurs fronts.

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Crédits photos : AFP/Thibault Camus

Tandis que sa police réprime brutalement, dans les centres-villes comme sur les ronds-points, le gouvernement a lâché quelques concessions pour appeler à arrêter la mobilisation. Obligé de reculer face au mouvement parti sur un rejet de la vie chère et de la précarité, le gouvernement a dû lâcher du lest sur le terrain économique, en accordant quelques mesurettes, qui n’en demeurent pas moins le premier recul de Macron depuis le début de son quinquennat.

Comment répondre cependant au principal mot d’ordre des Gilets Jaunes et des lycéens, scandé à chaque coin de rue ces dernières semaines : « Macron démission » ? On assiste aujourd’hui à une délégitimation profonde des institutions de la Vème République et à des aspirations démocratiques à une échelle de masse. Pour répondre à cette lame de fond, la proposition d’un « grand débat » pour consulter la population suite aux mouvements des Gilets Jaunes a été lancée par Macron lors de son allocution du 10 décembre.

On ne peut plus vaseux, concrétiser la proposition présidentielle ne s’annonce pas non plus de tout repos pour l’exécutif ; comme le notent plusieurs articles, au sein du gouvernement comme de la majorité LREM on peine à voir les modalités d’organisation de ce grand débat citoyen. « On a sous-estimé l’ingénierie que nécessite l’organisation de ce type de débat et la complexité de sa mise en place », admet un proche du chef de l’État, cité par Le Figaro. En témoigne pour commencer, le report d’ores-et-déjà annoncé de l’échéance, que Macron avait initialement annoncée pour le 15 décembre, à la mi-janvier. Pour faire passer le temps, Macron a encouragé les maires à récolter les doléances des administrés pour les faire remonter au pouvoir central. Proposition qui s’inscrit dans la volonté affichée du gouvernement de renouer avec les corps intermédiaires, dont les élites ont amèrement déploré l’absence au cours du mouvement des Gilets Jaunes, de la même manière que Macron veut replacer les syndicats au centre du « dialogue social ».

Pourtant ne serait-ce que cette première phase, dans toute sa vacuité, ne semble pas si aisée à réaliser. Ainsi l’Association des Maires de France a déjà exprimé dans un communiqué ses réserves sur la démarche. Un cadre de l’organisation interrogé par Le Monde déclare : « Nous serons bien sûr des acteurs du débat mais pas les organisateurs. . Il ne faudrait pas que l’Etat se défausse de ses responsabilités sur les communes », sur la crise entre l’exécutif et les collectivités locales.

Au sein de l’administration on a bien conscience que l’exercice du « Grand débat » est périlleux et loin de garantir les résultats escomptés, bien au contraire. Dans une note adressée à Matignon que se sont procurée France Info et Le Monde, la Commission nationale du débat public (CNDP) alerte l’exécutif : « La défiance à l’égard de la sincérité du gouvernement dans ses démarches participatives (…) est forte ». Il y a « trop de consultations, concertations, dont les participants ont le sentiment qu’elles n’ont servi à rien et que les décisions du gouvernement n’en ont pas tenu compte ».
La CNDP engage ainsi les ministres et parlementaires à « ne jamais prononcer de discours en ouverture, en clôture ou depuis une estrade ».

Parmi les simulacres démocratiques que le gouvernement pourrait égrainer au cours de ce grand débat, on compte la limitation du nombre de mandats, la baisse du nombre de députés parlementaires, la reconnaissance du vote blanc, voire même une plus large proportionnelle, ainsi qu’un assouplissement des conditions du référendum pour répondre à la revendication du RIC, comme le montre Jérome Jaffré, interrogé par Le Figaro Avec des réformes populaires de ce type, il tenterait d’apparaître comme celui qui a écouté le peuple et lui permet de s’exprimer davantage.

Ces propositions, qui ne visent qu’à éteindre le brasier social, sont à mille lieues de répondre aux aspirations radicales des Gilets Jaunes, qui pour certains demandent l’abolition du Sénat, le paiement des parlementaires à un salaire moyen et leur révocabilité. Dans ce contexte, entre nécessité de ne pas trop céder pour tenir le cap et ne pas donner confiance aux masses, et de céder assez pour ne pas voir s’embraser à nouveau le mouvement, le Grand débat, qui s’annonce déjà difficile à tenir, pourrait devenir une pente extrêmement glissante pour le gouvernement.
Comme l’écrit Laurent Joffrin : « La vérité, c’est que ce gouvernement est dans une noire panique. Il a déclenché un incendie et ne sait pas comment l’éteindre, jette des seaux entiers sur les flammes pour s’apercevoir qu’ils contenaient de l’huile. C’est le sort des apprentis pompiers. »


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