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Mobilisation contre le décret socle

Grève SNCF. Les perspectives du mouvement se jouent aujourd’hui !

A la fois date limite des signatures des accords SNCF et journée de grèves et de manifestation nationale à Paris, ce mardi 14 juin est un jour décisif pour les cheminots mais aussi pour l’ensemble du monde du travail et de la jeunesse qui se mobilise depuis le 9 mars contre la loi El Khomri et le gouvernement. Nicolas Rossel

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Refus des accords bidons SNCF ! Pour une convention collective de haut niveau !

Compte tenu des attaques que la direction de la SNCF et le gouvernement cherchent à imposer aux cheminots, ils ont raison de les rejeter et d’exiger au minimum le maintien des droits et conditions de travail de la convention collective actuelle. La date limite pour la signature de la nouvelle convention collective et de l’accord d’entreprise SNCF qui ont déclenché la colère des cheminots depuis plusieurs semaines expire aujourd’hui. Deux des syndicats représentatifs, la Cfdt et l’Unsa, ont d’ores et déjà annoncé qu’ils signeraient ces accords. La balle est donc dans le camp de Sud-rail et de la CGT qui pèsent, à toutes les deux, 51,5% des voix, ce qui donne la possibilité d’empêcher la mise en place des accords, malgré leur acceptation de la part de la CFDT et l’UNSA. En effet, le processus de validation est le suivant : il faut au moins 30% des voix pour valider ces accords, ce qui est déjà un acquis pour la direction de la SNCF qui peut compter sur les syndicats dit réformistes - la Cfdt, l’Unsa. Les syndicats qui ont signé ont alors 10 jours pour se rétracter et dénoncer les accords. Ceux qui ne signent pas peuvent faire valoir leur droit d’opposition les 23 et 24 juin prochains. Dans les deux cas, si les syndicats refusant les accords pèsent plus de 50% des voix, ceux-ci sont alors annulés. Avec 51,5% des voix, Sud-rail et la CGT ont donc la possibilité de rendre caduc la mascarade de négociations qui se déroule depuis des semaines.

Cependant, ces accords se situent à deux niveaux : la convention collective (CCN) qui fixe les droits et conditions de travail de l’ensemble des salariés du secteur ferroviaire, issus du privé comme de l’Entreprise publique ; et l’accord d’entreprise appliqué aux cheminots de la SNCF primant sur la convention collective. Si les syndicats dont la représentativité est d’au moins 50% dénoncent l’accord d’entreprise, alors c’est la convention collective qui est appliquée. Si c’est la convention collective qui est dénoncée, alors la base du régime salarial repose sur le décret socle imposé par le gouvernement. Autrement dit, respecter le mandat des AG de cheminots, ce serait réouvrir les négociations sur la convention collective nationale pour exiger pour le privé comme le public qu’elle soit au minimum au même niveau que la convention collective actuelle. Sud-rail a pour sa part exprimé une position correcte qui dénonce la convention nationale ferroviaire pour « réclamer que la réglementation en place à la SNCF soit étendue à l’ensemble des travailleurs du rail ». Tout en ne signant pas le seul volet aménagement du temps de travail de la CCN, la CGT reste floue quant à l’accord d’entreprise et a consulté sa base ces derniers jours pour rendre sa décision ce soir à priori. Les cheminots ont raison de se demander quelle sera l’attitude de la CGT face au chantage du gouvernement. Plusieurs sections CGT locales, ainsi que des AG de grévistes, telles que celles de Paris Austerlitz, Trappes, Nîmes, Chartres, Paris Nord, Paris Saint Lazare, Versailles et bien d’autres, ont adopté des motions qui interpellent la fédération CGT cheminots et le reste des organisations syndicales, en leur demandant non seulement de ne pas signer, mais également de faire opposition aux accords.

Où va la CGT ?

Alors que la direction de la CGT, poussée par sa base, a appelé à la grève reconductible depuis le 1er juin, rejeté ces accords, et mis en avant une convention collective de haut niveau au moins égale à celle en vigueur actuellement, pourquoi hésite-t-elle à signer et/ou s’opposer aujourd’hui aux accords qu’elle a combattus ? Elle semble ainsi sensible au chantage du gouvernement et de la SNCF : « Si vous voulez rester en lice dans les négociations futures et peser, signez ! » Or que signifie « rester dans les négociations » dans le cadre d’une convention collective et accord d’entreprise qui auront éclaté le statut cheminot et tiré vers le bas leurs conditions de travail, si ce n’est négocier la « misère ». Signer les accords, un seul ou les deux, seraient ne pas appliquer le mandat des cheminots entrés en grève reconductible, appelée par la CGT depuis le 1er juin. D’un autre côté, ne rien signer mais ne pas s’opposer non plus reviendrait à laisser ces accords être validés. Prise entre les revendications des cheminots qu’elle a elle-même portées d’un côté, et le chantage du gouvernement de l’autre, à quelques heures de l’ultimatum, la position de la direction de la CGT reste totalement floue.

C’est maintenant qu’il faut faire plier le gouvernement par la grève reconductible et les manifestations !

Si cette question d’un positionnement clair des directions syndicales joue un rôle important dans la bataille, c’est bien la capacité des cheminots à poursuivre le mouvement qui peut déterminer le réel rapport de force au bout du compte. La victoire n’est pas uniquement tributaire du jeu des négociations et des signatures. Mais il est clair qu’une annulation des accords aiderait à poursuivre les grèves et les amplifier pour imposer une convention collective et un décret socle de haut niveau. Car l’annulation de ces accords ne constituerait qu’une demi-victoire dans la mesure où il n’y aurait plus aucune convention collective et le fonctionnement de la SNCF reposerait sur le décret socle de base revu à la baisse par le gouvernement. Cette annulation serait en fait une première étape qui impliquerait de poursuivre et amplifier le mouvement pour obtenir satisfaction des revendications concernant non seulement la convention collective de la branche ferroviaire, mais également pour faire plier le gouvernement avec sa loi travail que combattent aussi les cheminots.

Actuellement les travailleurs des déchetteries et les cheminots sont les secteurs en pointe de la mobilisation contre la loi El Khomri qui dure depuis le 9 mars. Une première victoire contre les accords SNCF affaiblirait le gouvernement déjà fébrile et ouvrirait la possibilité de faire tomber la loi travail également. C’est pourquoi la détermination et la poursuite de la grève reconductible au sein de ce secteur stratégique pourrait montrer la voie à d’autres secteurs en lutte. Pour cela, il faudra œuvrer à rompre l’isolement dans lequel le gouvernement et la SNCF tentent de l’enfermer.

Les AG, comités de grève, et coordinations d’AG : des cadres nécessaires pour construire un mouvement démocratique et puissant

Si des AG se tiennent tous les jours dans la plupart des gares et technicentres mobilisés, elles ne sont pas encore assez investies par l’ensemble des grévistes, et manquent souvent de coordination entre elles à l’échelle régionale et nationale.

Les AG constituent le cadre démocratique de base qui permet de regrouper les collègues syndiqués et non syndiqués, afin que les grévistes, par-delà les étiquettes syndicales et politiques, puissent décider ensemble de la reconduction de la grève, de leur programme et de leurs actions. Elles offrent donc un cadre qui permet d’unifier les cheminots et massifier le mouvement face à des ennemis qui sont très organisés.

Par ailleurs, plus les AG sont massives et plus le mouvement se renforce dans son auto-organisation et la confiance dans ses propres forces, plus cela freine les directions syndicales qui seraient enclines à trahir le mouvement ou à le contrôler, et les incite à prendre part aux AG et au mouvement dans son ensemble tout en restant à leur place d’organisations au service des intérêts des cheminots. Les assemblées générales peuvent également se donner la tâche de mettre en place des organismes tels que les comités de grève - comme c’est le cas à Paris Austerlitz - qui regroupent les cheminots et cheminotes qui souhaitent s’impliquer dans l’organisation de leur propre grève. Ces comités de grève, qui rassemblent syndiqués et non-syndiqués, ont comme objectif d’organiser les grévistes autour des tâches nécessaires à l’élargissement et la consolidation de la grève, telles que les tournées dans les services, un éventuel journal de la grève afin de communiquer avec les collègues non-grévistes et les usagers sur les perspectives, les avancées et les suites du mouvement, la mise en place d’une caisse de grève afin que les cheminots puissent tenir malgré les retraits sur salaire, etc.

Enfin, les coordinations des AG de cheminots à l’échelle régionale et nationale, comme avec le mouvement étudiant, permettrait d’unifier encore plus le mouvement dans son programme et ses actions face au gouvernement organisé, lui, à l’échelle nationale. Il existe une AG intergares sur Paris qui a pour vocation de regrouper les cheminots des AG de la région parisienne. Même si ce cadre reste encore limité et a comme défi de s’étendre à l’ensemble de gares et technicentres de la région parisienne, il pose néanmoins les bases d’une coordination nécessaire entre les cheminots.

C’est en construisant des cadres d’auto-organisation à différentes échelles que le mouvement pourra se donner les meilleurs moyens de se poursuivre, se renforcer et s’amplifier, incluant la participation des syndicats et des non syndiqués.


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