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Quand les loups se déguisent en agneaux

L’hypocrisie de la SNCF et des « enquêtes sur la qualité de vie au travail »

Coup de gueule d'un cheminot qui raconte l'hypocrise des "enquêtes sur la qualité de vie au travail" à la SNCF. Quand les loups se déguisent en agneaux ...

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Crédit photo : MEHDI FEDOUACHE / AFP

C’est une technique connue et vieille comme le monde que le coupable tente de masquer son crime en se faisant passer pour la victime…

En effet, comment font les patrouilles de police en cas de bavure ? Le suspect, le plus souvent d’origine étrangère, s’est rué seul contre 4 ou 5 agents des forces de l’ordre pour tenter de les agresser sauvagement avant que la réalité ne lui rappelle la vanité de son acte en l’envoyant à l’hôpital avec des blessures plus ou moins graves, si l’on en croit la plainte des forces de l’ordre en question !

De la même façon, l’entreprise prend la posture de la victime (au même titre que les agents) de la souffrance au travail, puisque des cadres de direction dans leur immense humanité, sollicitent des réunions avec les représentants du personnel, durant lesquelles le rôle du partenaire social affecté et volontaire est joué jusqu’à la lie. Ce type de comportement visant à masquer ses crimes se pratique couramment, avec plus ou moins de bonheur et à tous les niveaux de la société. Et il n’y a qu’à se souvenir de la présentation du plan pauvreté par le Président des riches pour constater que l’exemple vient de haut. Dans la même veine, on a le racisme anti-français par exemple, ou les capitalistes forcenés qui se disent boycottés par les médias, etc, en cherchant, on en trouve plein.

Le patronat suit le troupeau et pour le coup, celui des loups travestis en agneaux. Les entreprises n’ont que des avantages à jouer ce jeu pour ce qui est du risque professionnel :

  • Déjà, remplir une obligation légale, celle de prévenir les risques, au moins en apparence
  • L’opportunité de documents sur lesquels faire figurer une pseudo volonté de réduire la souffrance au travail, peut paraitre assez protecteur pour permettre de l’accentuer.

Sur un plan général, la quasi-totalité des entreprises, avant de faire acte de prévention de la souffrance au travail ou SCOT (Souffrances Causées par l’Organisation du Travail), fait avant tout acte de création de cette souffrance. Cela parait une évidence, mais s’il existe des SCOT, c’est bien l’organisation du travail qui les génère et ce malgré l’obligation légale de prévention. Et encore plus quand des gains de productivité sont exigés ou des restructurations pour satisfaire les actionnaires, ou l’Etat dans le cas d’un service public.

Dans cette veine, la transformation actuelle de la SNCF est exemplaire en termes de création de SCOT et de postures de victime. Si les contraintes de service public en elles-mêmes portent, de fait, les germes incontournables de SCOT, (par l’obligation de fonctionner en permanence notamment, ou par le contact avec les usagers) il est clair qu’à cet instant, la SNCF en rajoute une quantité plus que nécessaire.

La transformation de l’entreprise qui ne valorise pas ses agents par la fierté du service public, qu’elle conspue, pousse l’encadrement à traiter ses salariés comme des coupables et des moins que rien, dans le but avoué de rattraper un pseudo avantage avec le privé, dégradant ainsi les rapports avec les agents et leurs représentants.

La mode est aux pressions sur les agents en arrêts auxquels on propose des ruptures conventionnelles pendant les périodes d’arrêt par exemple, ou discriminations au déroulement de carrière. L’entreprise pousse à bout les agents en reclassement (attente de poste suite à inaptitude) et licencie en procédure disciplinaire ceux qui craquent, même avec le statut RQTH (travailleurs handicapés). De plus, les multiples réorganisations empêchent les cheminots d’avoir une vision de leur avenir et sont sources d’une inquiétude dangereuse.

L’entreprise est parfaitement consciente des risques liés à cette mutation forcée, d’autant plus que la réglementation prévoit un accompagnement (à minima) en cas de réorganisation, pour « une réduction des risques médicaux et sociaux qui peuvent découler de la mobilité ». L’entreprise est donc totalement informée que sa démarche actuelle soutenue par ce gouvernement, est bien créatrice, génératrice, source plus qu’abondante, de RPS, comprenez SCOT ou souffrance au travail, et avec une croissance qui la fait passer de tueuse du dimanche à criminelle de guerre, type France Télécom.

La discrimination syndicale actuelle avec la répression injustifiée des grévistes est une souffrance au travail et la direction d’entreprise l’applique sans remord, dans le but de faire des exemples avec ceux qui se sont opposés à cette réforme du ferroviaire qui va créer toujours plus de souffrance justement. Et dans le même temps, à coup de réunions et d’enquêtes QVT (qualité de vie au travail), l’entreprise souhaite faire croire qu’elle travaille à réduire la souffrance au travail ?!

Donc, on peut se poser la question d’une telle démarche dans un contexte où, de toutes façons, un nombre de victimes, voire de pertes, est déjà acquis et accepté par la direction. A nouveau, ça ne peut être que pour déguiser le bourreau en victime.

Souffrance et destruction dans un gant de dialogue social constructif.

L’exemple de France Télécom est passé par là, et il vaut mieux prévoir, en cas de dégâts collatéraux probables, une parade aux futures poursuites. Une charge de travail trop lourde, un manque d’autonomie, les manques de soutien, de reconnaissance, de sens au travail, les agressions externes, l’absence d’information sur les changements, les difficultés à concilier travail et vie privée, et pour finir la violence. Voilà les 9 familles de risques, de SCOT, vécues par les salariés, répertoriées par l’INRS et que l’on retrouve toutes très présentes dans les services publics en général et à la SNCF en particulier.

La SNCF est une entreprise particulièrement propice à ce genre de SCOT (à nouveau, d’après les études, comme la plupart des services public) et seule la solidarité ouvrière permet de remettre un peu d’humain dans une mécanique très froide et déshumanisée. En effet, un encadrant en responsabilité dans une entreprise publique n’est jamais comptable de ses méfaits, ne risque pas un licenciement, au pire un léger frein à son déroulement de carrière. Et en cas de poursuites judiciaires, les responsabilités sont totalement diluées et c’est l’Etat qui paie. Le sport d’entreprise est justement de renvoyer la responsabilité vers d’autres sphères inatteignables avec des gens mal identifiés…

Des cadres chargés de la prévention responsables de harcèlement raciste à la SNCF

Donc à la SNCF, on se retrouve certaines fois avec des situations ubuesques où des cadres ayant participé auparavant à des pratiques extrêmement graves, sont ensuite amenés à organiser la prévention dans la suite de leur carrière. Un exemple récent, est Mme Laurence M. qui est aujourd’hui RH dans un grand établissement de la région parisienne et qui organise des réunions de prévention des SCOT.

Et ce alors que, jusqu’en 2013, son adjointe, Mme Anne-Sophie B., avec l’indifférence de Laurence M., si ce n’est son assentiment, aurait eu un comportement, qualifié de discriminatoire envers les agents identifiés, à tort ou à raison comme musulmans.

L’un d’eux, Bilel*, expliquait à l’époque, sur un CERFA, que Anne-Sophie B. avait été très avenante avec lui avant de comprendre que sa barbe qui grandissait, était en fait la conséquence d’une conversion à l’Islam, ce qui lui avait valu d’être poussé à la démission en le laissant travailler pendant des mois au contact d’un voyageur qui l’avait menacé de mort avec une machette, refusant toute mutation.

Un autre Akim* est tombé malade pendant des mois, profondément affecté suite à cette atmosphère fétide et quasi généralisée dans l’encadrement qui le traitait de « Caliméro », sous le regard bienveillant de cette Laurence M. et a quitté l’entreprise.
Slimane*, avec un licenciement demandé pour des prétendues traces d’étranglement constatées par Laurence M., sur le cou d’un collègue que ni la police, ni les urgences, pourtant habitués (et qui avaient examiné Slimane avant elle), n’avaient repérées.
Un 4ème, Khaled* regardait son déroulement de carrière et ses demandes de mutations et constatait un retard considérable, et il n’était pas le seul…

Et à la marge de cette insidieuse pathologie, désignée par le code du travail comme discrimination « en raison de convictions religieuses (et qui fait partie, bien entendu, de la catégorie de souffrance au travail des violences dans l’entreprise), Mme Laurence M. est passée très très près de faire vivre aux cheminots, un suicide, avec une tentative d’Antoine*, qui malgré un prénom « français » avait un lieu de naissance en Algérie (suffisant pour s’attirer les foudres de l’équipe encadrante donc…). Cet agent SNCF n’a plus jamais été le même après sa tentative de suicide en septembre 2009, suite à laquelle, il a été reconnu RQTH.

Et quand Antoine a tenté de reprendre le travail, après 2 ans et demi d’absence, il a été accueilli très rapidement par une procédure disciplinaire injustifiée, afin de lui faire comprendre que les objectifs et pratiques de Laurence M n’avaient guère changés en 30 mois. Le médecin d’Antoine avait été obligé de l’arrêter à nouveau pour préserver sa santé.

Et pourtant, à la suite d’un tel bilan, cette personne qui appartient à ces bourreaux se présente comme victime, et est en situation de lutter contre des situations qu’elle a suscitées !!! En réalité, ce type de démarche de réunion sur les SCOT/RPS ne représente pas plus qu’un plan de prévention avec un sous-traitant, soit une démarche visant à absoudre l’entreprise de toute responsabilité envers l’ensemble des agents du périmètre concerné. A nouveau, le seul moyen de faire baisser les SCOT, la souffrance au travail, dans l’ensemble du monde du travail, c’est en participant massivement aux prochaines échéances de grève contre cette gouvernance absurde et malveillante ! La lutte continue et c’est ensemble que nous gagnerons !

*Par souci de préserver la vie privée, les prénoms ont été modifiés


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