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Intersexes

La justice française refuse de reconnaître l’existence du « sexe neutre »

Ce jeudi 4 mai, la Cour de cassation a refusé l’adoption de la mention « sexe neutre » sur l’état civil d’une personne intersexe. Ou comment les nécessités de « l'organisation sociale » priment sur la reconnaissance de l’existence des individus.

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« Quand je me regarde nu dans un miroir, le matin ou le soir, je vois bien que je n’appartiens pas au monde des hommes, ni à celui des femmes ». Ce sont les mots du premier concerné par l’affaire, Gaëtan, psychothérapeute de 65 ans, qui mène bataille depuis plusieurs années maintenant pour la simple reconnaissance de ce qu’il est, depuis sa naissance. Son prénom masculin, choisit par sa mère « qui voulait un garçon », est à l’image du reste : une obligation de choisir l’une des deux cases uniques qu’on lui propose, bien loin de sa réalité. Né « sans pénis, ni vagin », « Gaëtan n’est ni homme ni femme. Il ne se sent ni homme ni femme. Il ne peut devenir ni homme ni femme. Et il ne veut devenir ni homme ni femme » a plaidé son avocat Bertrand Périer.

En 2015, un juge des affaires familiales avait accepté la requête de Gaëtan de modifier son état civil en « sexe neutre » pour correspondre mieux à son identité. Mais c’était sans compter sur la Cour d’appel d’Orléans qui, en mars 2016, rejette la décision. Et à nouveau ce jeudi 7 mai 2017, c’est la Cour de cassation qui confirme le refus.

Un cas symbolique

Pour se justifier, la haute juridiction a déclaré que « la dualité des énonciations relatives au sexe dans les actes de l’état civil poursuit un but légitime en ce qu’elle est nécessaire à l’organisation sociale et juridique ». Des paroles qui viennent faire écho à celles déjà prononcées en 2016 par la Cour d’appel d’Orléans, qui avait expliqué son rejet de la décision par crainte de « reconnaître, sous couvert d’une simple rectification d’état civil, l’existence d’une autre catégorie sexuelle ».

Les raisons sont limpides : l’idéologie selon laquelle l’humanité est naturellement divisée en deux catégories bien distinctes, les hommes et les femmes, structurée par les catégories juridiques et indispensables à la bonne répartition des individus dans la société, se doit nécessairement de primer sur la vie des personnes qui ne parviendraient pas à rentrer dans ces cases mythiques.

Gaëtan, ainsi que l’ensemble des personnes nées « intersexes », font les frais de ces injonctions sociales à être homme ou femme, avec le lot de normes sexuelles et comportementales que cela sous-tend. Mais ce sont également l’ensemble des personnes transgenres, qui ne se reconnaissent pas dans le genre qu’on leur assigne à la naissance, peu importe l’apparence de leurs organes génitaux, qui doivent faire face à ces obligations. Ainsi, en dernière instance, l’ensemble des individus, quel que soit leur sexe ou leur genre, imposé ou revendiqué, se voit éduqué, modelé ou réprimé, pour qu’il corresponde à l’attitude sociale que l’on attend de telle ou telle catégorie.

Gaëtan doit donc obtenir la mention de « sexe neutre » sur son état civil pour vivre au plus proche de son identité. Mais sa bataille est aussi l’ouverture de la boîte de Pandore qu’est le genre et le sexe, et les injonctions sociales, physiques, comportementales qu’ils imposent.

Le monde, et la France

Si la vision d’une humanité divisée en deux catégories distinctes est quasi hégémonique à travers le monde, certains pays, comme l’Allemagne (premier d’Europe en 2013), l’Australie (2014) ou encore le Népal ont finalement reconnu l’existence d’un troisième sexe ou genre, diversement appelé « sexe neutre » ou « intersexualité ».

La France, ce fameux « pays des droits de l’Homme », est bien loin du minimum : accorder la reconnaissance de l’existence aux personnes qui le demandent. Elle a par ailleurs été condamnée à trois reprises par l’ONU pour des « opérations » pratiquées sur des enfants afin de leur attribuer un sexe masculin ou féminin. « Opérations » plus proches de la mutilation que du « remède ».


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