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Brésil

La police arrête l’ancien président Lula, soupçonné de corruption

Hier, tôt dans la matinée, la Police Fédérale est venue arrêter à son domicile l’ancien président Lula, figure emblématique de la vie politique brésilienne. À la suite des aveux de Delcídio Amaral, sénateur du Parti des Travailleurs, le parti de Lula, ce dernier est clairement la cible du juge en charge de l’affaire « Lava-Jato », (« Lavage Express ») qui éclabousse autant l’ancien président que Dilma Rousseff, sa dauphine, actuellement au pouvoir, et ce sur fond de crise économique et d’offensive de l’opposition de droite Rédaction de Esquerda Diàrio, Sao Paulo

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Dans l’œil du cyclone, on retrouve ainsi Lula et 43 de ses proches, collaborateurs et membres de sa famille. Le vingt-quatrième volet de l’instruction du scandale « Lava Jato », appelé Alètheia (« vérité », en grec) avait pour objectif l’ancien président, l’Institut Lula, qui porte son nom, ainsi que d’anciens collaborateurs. Derrière le juge en charge de l’affaire, Sérgio Moro, les analystes voient la main de la droite brésilienne et du PSDB (opposition).

L’ancien président et ses proches ont pour l’instant simplement été interpellés pour être auditionnés (« convocation coercitive ») et aucun d’entre eux ne s’est vu notifié une mise en détention provisoire. Mais ce nouveau rebondissement est étroitement lié au crescendo d’accusations qui pèsent contre l’actuelle présidente, Dilma Rousseff, 11% d’opinion favorables dans les sondages et ancienne protégée de Lula. On ne peut que constater l’étrange coïncidence de calendrier entre cette opération et la manifestation anti-Dilma du 13 mars, appelée par l’opposition de droite.

L’impact de l’arrestation spectaculaire de Lula peut être à double tranchant pour l’opposition. Son audition par les juges pourrait soit accélérer le processus de destitution qui menace Dilma Rousseff, soit mettre en péril l’architecture de la campagne anti-PT de la droite brésilienne, tant Lula et Dilma sont au centre de l’offensive, l’attention étant déviée des scandales de corruption liés à l’entreprise nationale Petrobras pour se focaliser sur l’ancienne chef de l’exécutif et l’actuelle présidente. C’est en effet l’achat par le couple Lula d’un triplex à Guaruja, la station balnéaire de la bourgeoisie de Sao Paulo, ou le fait qu’il serait propriétaire d’une luxueuse villa à la campagne, à Atibaia, qui seraient au centre du volet actuel de l’enquête.

Si les aveux du sénateur Delcídio Amaral devaient se confirmer, alors l’étau pourrait se resserrer encore davantage sur Lula puisqu’il serait démontré que ce dernier et les siens ont tout fait pour faire obstacle à la justice, versant des pots de vin au PDG de Petrobras, Nestor Ceveró, alors que Dilma Rousseff faisait tout son possible pour que le Tribunal Suprême de Justice n’enquête pas à fond sur les entreprises de BTP impliquées dans l’affaire « Lava Jato ». Amaral, par ailleurs, est également revenu sur le scandale du « mensalao » (achat de voix au Congrès par le Parti des Travailleurs au pouvoir) qui avait scandalisé la société brésilienne en 2005.

Le rebondissement en cours polarise les discussions dans le monde du travail, chez les classes populaires et dans la jeunesse. L’attitude que devrait prendre le PT n’est pas encore défini, tout comme celle de ses courroies de transmission dans le mouvement social à l’image de la Centrale Unique des Travailleurs (CUT) et le l’Union Nationale des Étudiants (UNE).

Le monde du travail n’a aucun intérêt à couvrir des affaires de corruption et de détournement d’argent public dont seraient coupables les dirigeants du PT, à commencer par un Lula qui a quitté le pouvoir avec 80% d’opinions favorables après deux mandats (2003-2010) et qui reste encore crédité de 20% d’intentions de vote (au coude à coude avec les candidats de la droite et des verts) s’il venait à se représenter en 2018.

Le monde du travail n’a pas non plus davantage d’intérêt à faire le jeu du processus de destitution en cours contre la présidente Dilma Rousseff. L’objectif de l’opposition est de mettre en place un gouvernement qui, en cas de destitution de Rousseff, attaquerait plus encore les travailleurs et les jeunes que le gouvernement actuel. Par ailleurs, l’opération « d’impeachment » est pilotée par une droite brésilienne qui est tout aussi corrompue que la gauche actuellement au pouvoir.

Mais pour battre en brèche ce projet réactionnaire, il faut également lutter contre la politique de Dilma Rousseff et du PT, contre l’austérité et contre la mise en vente par le gouvernement des ressources naturelles du pays.

Voir également la déclaration politique du Movimento Revolucionário de Trabalhadores (MRT) du Brésil au sujet de l’arrestation de Lula et son audition par un juge.


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