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Élections Catalogne

Le OUI à la république catalane remporte les élections imposées par le 155

Malgré le coup institutionnel du 155 et l'escalade répressive, l'indépendantisme catalan est majoritaire aux élections du 21 décembre. Ciudadanos (parti libéral de droite) arrive en tête face au naufrage du parti de Rajoy, le PP (droite traditionnelle). Les « comunes » et la CUP perdent des sièges, ce qui réouvre le débat sur la gauche dont nous avons besoin pour affronter l'offensive réactionnaire et défendre le résultat du référendum du 1er octobre.

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Traduction de Léo Valadim

Crédits photo : Antonio Litov / ID.es

Avec un taux de participation de 84,2%, tous les médias soulignent la victoire de Ciudadanos en tant que première force, avec 36 députés, et à la fois le maintien de la majorité absolue de l’indépendantisme au parlement qui totalisent 70 sièges. Un paradoxe qui s’explique par le phénomène d’effondrement du PP qui se retrouve dans une position quasi extraparlementaire avec seulement 4 députés, et par le résultat historiquement bas du PSC de 2015, avec 17 sièges.

Dans le bloc souverainiste, le vote a été divisé entre les deux principales candidatures, ERC et PDeCAT, qui ensemble grossissent de 4 députés le résultat de la coalition Junts pel Si de 2015 (qui regroupait alors 8 partis), pour atteindre 66 députés. La CUP perd 6 sièges, pour retomber à seulement 4. Catalunya en Comun-Podem passe de son côté de 11 en 2015 à 8 aujourd’hui. Quelles premières conclusions peut-on tirer de ces résultats ?

155 : un coup institutionnel qui n’atteint pas son objectif : écraser l’indépendantisme

Malgré les célébrations de Ciudadanos, l’objectif maximal du bloc monarchique n’a pas été atteint. Ni en stoppant le Govern, ni en dissolvant le parlement, ni en faisant des prisonniers politiques, ni en engageant des poursuites contre plus de 800 fonctionnaires et activistes, ni avec une commission électorale qui a systématiquement violé la liberté d’information et d’expression, qui a empêché les candidats emprisonnés ou exilés de participer... avec rien de tout cela le bloc monarchique n’est parvenu à insuffler la peur parmi les millions de catalans aspirant à la constitution d’une république en rupture avec la couronne et le régime de 78.

Si l’État central est parvenu, aux moyens de l’escalade répressive, à imposer le recul des dirigeants de ERC et PDeCAT, lesquels ont montré leur volonté de « retour à la normale », celui-ci n’a pas réussi à convaincre, par ses méthodes inquisitoires , les millions de personnes qui ont à nouveau donné la victoire au bloc indépendantiste.

Le résultat du référendum du 1er octobre à nouveau validé en faveur de la république catalane

47,5% des catalans ont voté pour des formations indépendantistes, un résultat quasi identique à celui de 2015 (47,74%), qui plus est avec une participation historique dépassant les 80%, contre 77,44% antérieurement. Face à ce bloc, les votants du « bloc du 155 » ont réalisé un score de 43,5%, en progression depuis 2015 où ils avaient obtenu 39,17%. Les « comunes », avec leurs 7,3% ne peuvent pas être inclus dans le camp du « oui » ou du « non ». La volonté majoritaire du peuple catalan qui s’était exprimée lors du référendum du 1er octobre et des journées de grève du 3 octobre et du 8 novembre est clairement à nouveau validée.

Un renouveau dans la droite espagnoliste ?

Un des éléments les plus importants sur l’échiquier politique est l’effondrement du PP et la progression de Ciudadanos, qui consolide son image de nouvelle droite, avec un discours plus démagogique sur les questions sociales et dans sa posture de dénonciation de la corruption. En Catalogne le parti d’Ines Arrimadas a su se positionner comme le meilleur pari pour combattre le mouvement indépendantiste, réclamant le 155 avant même son application et se prononçant ouvertement contre l’immersion linguistique. Le PP a tenté de contrer cette progression en radicalisant toujours plus son discours ; développant ses idées lepénisantes vis à vis des immigrés , le parti a tenté de se présenter comme l’initiateur de l’emprisonnement et de l’exil du gouvernement catalan.

Reste encore à voir les conséquences qu’auront ce différend interne dans l’aile droite du bloc monarchique, pour le PP, au niveau de l’État ainsi que sur la stabilité du gouvernement Rajoy. Mais ce qui est sûr c’est qu’il s’agit d’un véritable catalyseur pour le tournant à droite du régime de 78. Rajoy, pour ne pas continuer à perdre du terrain, va maintenir à pleine puissance l’escalade répressive et tentera d’imposer la recentralisation de l’État grâce aux juges, aux procureurs et à la police.

Le recul des « comunes » et de la CUP, et le défi de construire une gauche se battant pour un programme anticapitaliste et une république des travailleurs

La candidature de CECP, conduite par Xavier Domenech, fait également partie des grandes perdantes, avec 3 députés en moins par rapport aux élections de 2015. D’un côté, la non-prise de position des « comunes » sur le 155 et sur la déclaration unilatérale d’indépendance , et de l’autre son discours appelant à « tourner la page » lui a coûté cher et a surtout mis a nu son programme de gauche domestiquée et toujours plus intégrée au régime de 78.

La CUP de son côté est tombée de 10 à 4 députés. Une chute qui ne peut pas s’expliquer seulement par le « vote utile » bénéficiant à l’ERC. Sa politique de « main tendue » et sa subordination à la stratégie des directions de l’ERC et du PDeCAT, qui ont fini par abandonner la défense de la république, ne lui ont pas permis d’apparaître comme une alternative politique.

Ni la politique de conciliation avec le régime de 78, ni la subordination à Junqueras et Puigdemont, ne sont utiles pour préparer l’affrontement des mois à venir. D’un côté, il est grandement possible que les directions de l’ERC et de PDeCAT – qui sortent renforcées par les élections - reviennent sur le chemin de l’autonomie relative et de la négociation avec l’État. De l’autre, la nécessité toujours présente d’affronter l’offensive répressive de l’État central, d’obtenir la liberté des prisonniers politiques, la fin des poursuites, et de combattre le projet de restauration réactionnaire du régime de 78 du bloc monarchiste.

Face à ces enjeux, il est indispensable et urgent d’avancer dans la construction d’une gauche indépendante des partis qui ont déjà démontré ne pas vouloir porter jusqu’au bout la lutte pour la république, et qui se fixe l’objectif de sa conquête aux moyens des mobilisations sociales, en liant cette bataille à la mise en place d’un programme pour que ce soit les capitalistes qui aient à payer leur crise.


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