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« S'ils cherchent un responsable, c'est moi et moi seul ! »

Le coup de poker de Macron pour éteindre l’incendie

Mis sur la défensive depuis l’éclatement de l’affaire Benalla, Emmanuel Macron est finalement sorti de son silence. A l’épreuve de la première crise politique majeure du quinquennat, l’Elysée tente un coup de poker pour éteindre l’incendie avant qu’il ne se propage.

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Depuis le début de l’affaire Benalla, nombreux ont été les commentaires des éditorialistes à s’étonner de la stratégie de communication « catastrophique » d’Emmanuel Macron. Par son silence, celui qui se voulait le « maître des horloges » a fini par produire le contraire des effets espérés, et réussir à tourner l’ensemble des regards vers lui - comme l’illustre un sondage, sorti ce mardi, révélant que près de 75% de la population souhaite que Macron s’exprime. Acculé, presque une semaine après le début de l’affaire Benalla, Emmanuel Macron est finalement sorti de son silence.

« S’ils cherchent un responsable, c’est moi et moi seul ! », a-t-il ainsi déclaré d’un ton offensif devant une assemblée de parlementaires LREM réunis lors d’un pot de session parlementaire en la présence de Collomb, Philippe et Ferrand. Comme un signal pour ressouder sa majorité parlementaire, peu expérimentée, qui a pu apparaitre divisée ou du moins tétanisée. Il a fustigé « la République des fusibles (et) la République de la haine » s’adressant ainsi à l’opposition politique qui est à l’offensive depuis le début de l’affaire Benalla. Ces derniers se sont pourtant pris les pieds dans les fusibles qui n’ont eu de cesse d’être mis en exergue, et qui se sont avérés factices.

« Qu’ils viennent me chercher ! » a-t-il encore lancé, mettant ainsi au défi, ceux, dans l’opposition, qui exigent qu’Emmanuel Macron soit entendu en audition - comme l’ont été notamment Gérard Collomb, le premier flic de France au courant de rien, ou encore Patrick Strzoda, le directeur de cabinet de Macron qui assume tout. Après la sortie fracassante de Macron, la commission d’enquête s’est exécutée du tac-o-tac, en répondant dans les minutes suivantes à Macron, par la voix de Guillaume Larrivé, co-rapporteur, qu’« il n’appartient pas à [la] commission d’enquête de convoquer le président de la république ».

« Ce qui s’est passé le 1er mai a été pour moi une trahison », a lancé le président, plaçant ainsi l’affaire sur le seul terrain moral, celui d’une relation d’« homme à homme », d’une confiance trahie. Une façon de montrer que Jupiter n’est pas si déconnecté, qu’il est aussi humain et prêt à reconnaître ses erreurs - une nouveauté. Dans la matinée, le premier ministre avait préparé le terrain en dénonçant « une dérive individuelle de la part de ce chargé de mission ». « Rien n’a été masqué, rien n’a été omis », avait insisté l’ancien maire du Havre. En assumant l’intégralité de la responsabilité, Macron tente le coup de la « transparence » pour réhabiliter le récit du « nouveau monde ».

En effet, depuis l’affaire Benalla, c’est bien la « moralisation de la vie politique » sur laquelle s’est fondé le récit macroniste qui apparaît plus qu’ébranlée. « Une chose est sûre : le mythe du nouveau monde s’est effondré, le symbole du Louvre vient de se fracasser sur la Contrescarpe », affirme de façon tranchée Gérard Larcher, président du Sénat. Tandis que « les vaincus de l’affaire Fillon » essayaient d’obtenir « leur revanche », comme le titre un article de Mediapart, Macron tente un contre-pied en avouant ses « péchés », contrairement à Fillon qui a nié jusqu’au bout.

Mais ce coup politique exprime autre chose encore. Comme l’exprime Christophe De Voogd, historien qui n’est pas connu pour être à gauche, « une affaire de cette ampleur - encore une fois davantage par ce qu’elle dit du pouvoir que par sa gravité factuelle - ne peut que marquer un quinquennat ; d’ores et déjà, la réforme constitutionnelle est reportée et sera pour le moins amendée ; et comment faire passer désormais la loi sur les "fake news" ? Tout l’enjeu est que cette affaire ne devienne pas le sparadrap du capitaine Haddock et ne transforme Emmanuel Macron en "Gulliver entravé" ».

Avec ce coup de poker, Macron tente une sortie par le haut de cette première crise majeure du quinquennat. A défaut, celle-ci pourrait entamer encore un peu plus sa « capacité réformatrice », déjà échaudée par une grève des cheminots, dans laquelle il a, certes, globalement atteint ses objectifs, mais à travers laquelle il a aussi montré qu’il n’est pas Margaret Thatcher. L’épuisement prématuré du macronisme est-il en marche ? La suite au prochain épisode.


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