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Edito

Macron à Saint-Martin : changer la com’ pour maintenir le cap ?

Changer la com pour maintenir le cap, ainsi pourrait-on résumer l’inflexion que tente d’opérer Emmanuel Macron en cette rentrée. Malheureusement pour le président, son nouveau discours peine encore aujourd’hui à couvrir la réalité de sa politique Surtout la recherche d’une communication plus proche de la population, contre-nature pour le président des riches, peut rapidement tourner à la farce comme ce fut le cas ce week-end en Guadeloupe.

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Dans le journal Le Monde, Cédric Pietralunga voit dans l’opération d’Emmanuel Macron en Guadeloupe le « pari d’une présidence du ‘’quotidien’’ ». Et de fait, multipliant les embrassades et les accolades, Macron veut se montrer proche et à l’écoute du peuple. Dans un entretien au JDD il explique ainsi ce dimanche : « j’ai une volonté de retourner à un terrain qui peut être difficile, mais qui ne tolère aucune dérobade. Il faut aller au contact des gens. »  En effet, la proximité affichée va de pair avec une fermeté sur la ligne, le cap ne déviera « pas d’un pouce » explique le président. De façon nette, Macron cherche ainsi à conjurer l’épuisement qui affecte son pouvoir depuis la rentrée, à changer la forme pour faire passer le fond. 

Toutefois la meilleure communication ne saurait transformer le contenu anti-social des mesures portées par le gouvernement. Ainsi la réalité des 6 milliards d’euros de baisse d’impôt mise en avant par le gouvernement dans le cadre du Budget 2019 est non seulement douteuse, mais le chiffre fait pâle figure face aux 18,8 milliards d’euros de cadeaux fiscaux, faits parallèlement aux entreprises . De même, dans le « Plan Pauvreté » il ne suffit pas d’appeler « Revenu Universel d’Activité » une mesure injuste visant à soumettre de nouvelles aides sociales à l’acceptation d’un travail, pour la rendre vertueuse. Enfin, celui qui aime à se présenter comme un « progressiste » à l’échelle européenne refuse que la France accueille les 58 migrants de l’Aquarius.

Le « virage » de la com se heurte ainsi au maintien du cap et à l’absence de résultat économique probant de ses contre-réformes, à même de « justifier » les « efforts » à faire, autant qu’à l’impossibilité de s’adresser à des couches disparates de la société. En tentant avec la dégressivité des allocations chômages pour les hauts-salaires d’équilibrer sa réforme de l’assurance-chômage, Macron s’aliène les cadres, que la CFE-CGC l’accuse de « stigmatiser ». Pour satisfaire les patrons, il doit porter un discours sur le travail qui heurte un refus de la précarité, bien ancré dans le monde du travail. Voulant réduire les charges sociales des salariés pour tenter de faire illusion sur leur pouvoir d’achat il augmente d’abord la CSG des retraités, finit par exonérer 300 000 d’entre eux, mais abandonne finalement le projet de revalorisation des petites retraites. La situation inextricable reflète les faiblesses des fondamentaux du macronisme, notamment l’étroitesse du bloc social sur lequel il s’appuie pour mener ses contre-réformes. 

Par ailleurs, la communication « proche du peuple », si éloignée du mépris naturel du président des riches pour la population, n’est pas sans causer de problème. A Saint-Martin, après avoir rejoué le paternalisme envers un jeune, il se retrouve en mauvaise posture, aux côtés d’un jeune homme torse nu qui fait un doigt d’honneur. Là où, dans le premier cas, il énervait à gauche, c’est alors la droite qui fait feu de tout bois pour essayer de capitaliser sur la crise du macronisme. Macron se voit ainsi accusé de « ruiner la fonction présidentielle » et de « donner une image déplorable pour les Antillais » par les Républicains et le Rassemblement National. 

Beaucoup d’efforts et peu de résultats pour un gouvernement dont le temps semble compté. Dans Le Monde un conseiller de l’Elysée note ainsi : « une fois que les présidents se voient accoler une étiquette, ils ont du mal à s’en défaire. Hollande a été catalogué indécis, Sarkozy était l’agité et Chirac le roi fainéant. Emmanuel Macron a pris la mesure de ce risque, même s’il est moins grave d’être jugé distant et arrogant qu’indécis ou fainéant ». Alors qu’il y a déjà « une ambiance de fin de règne » à l’Elysée comme le titrait Médiapart, il est clair que pour se départir de son image de « président des riches » la course contre la montre est lancée pour Macron. 

Pour autant, si une telle "réforme" du Macronisme semble nécessaire, il est clair que la communication ne peut résoudre à elle seule les contradictions du macronisme. Au mieux peut-elle permettre de contenir un temps la colère en attendant des jours meilleurs, mais dans un contexte économique international explosif rien n’indique que ceux-ci sont à venir.

Crédit : Eliot Blondet / AFP / POOL


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