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Grand débat "colonial"

Macron face aux élus d’ "Outre-Mer" : un air de colonialisme

Le 1er février dernier, Emmanuel Macron recevait une soixantaine d'élus d' "Outre-Mer" dans le cadre du Grand débat national. Chômage, pouvoir d'achat, sargasses, chlordécone... les nombreuses doléances exposées se sont confrontées au sempiternel mépris du président Macron, relevé pour l'occasion d'une pointe de relents colonialistes.

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Crédit photo : Michel Euler / POOL / AFP

Le 1er février dernier, Emmanuel Macron recevait les élus d’ "Outre-Mer" dans le cadre du Grand débat national. Une soixantaine d’élus de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Réunion, de Mayotte et de Saint-Pierre et Miquelon se sont donc rendus à l’Elysée pour exposer les difficultés auxquelles faisaient face leurs régions ultra-marines. Et la liste est malheureusement longue. Chômage, précarité, pouvoir d’achats, les doléances étaient nombreuses mais, c’est sur le plan sanitaire qu’elles ont suscité les plus vives tensions conduisant le président Macron à finalement couper court au débat.

Sur le plan économique, les élus ont rappelé les taux de chômage et de précarité record des colonies :"Apatou présente certainement le pire taux de chômage de France, plus de 60% chez les jeunes", explique Paul Dolianki, le maire. Ils ont également dénoncé le coût de la vie dans les colonies et les écarts de prix avec l’hexagone qui sont en constante augmentation.

Les questions sanitaires ont pour leur part occupé une grande partie du débat, montrant l’inquiétude grandissante suscitée par ces préoccupations. Il en fut ainsi des sargasses, algues envahissant les côtes antillaises et relâchant des substances toxiques pour les populations terrestres et sous-marines, et qui nécessitent des moyens financiers importants pour pouvoir s’en débarrasser. « Les gens s’en vont à cause des sargasses » a dit la maire de Capesterre de Marie-Galante, Mme Bourgeois Miraculeux, « je voudrais qu’on nous considère et qu’on nous accompagne comme n’importe quel citoyen de la France hexagonal qui se retrouve confronté à une catastrophe naturelle ».

Mais ce sont sûrement les interventions relatives au chlordécone qui ont suscité les plus vives tensions. Ce pesticide, interdit dès 1976 aux Etats-Unis, a été utilisé dans les bananeraies antillaises entre les années 70 et 90 empoisonnant les populations locales et contaminant les sols pour plusieurs centaines d’années. Des rapports faisaient d’ailleurs état de sa dangerosité dès les années 70.

Aujourd’hui, de nombreuses études dénoncent ce qu’elles considèrent comme un véritable scandale sanitaire et mettent en relation l’exposition de la population au chlordécone et l’occurrence record de cancers de la prostate en Martinique. Une relation remise en cause par le président Macron, non sans une pointe de mépris. « Il ne faut pas dire que c’est cancérigène parce qu’à la fois on dit quelque chose qui n’est pas vrai et on alimente les peurs" argue le président. Quand Victorin Lurel, sénateur de la Guadeloupe, met en exergue les résultats d’études des professeurs Luc Multigner, directeur de recherches à l’INSERM et Pascal Blanchet, professeur à l’université des Antilles et chef du service urologie du CHU de Pointe-à-Pitre, Emmanuel Macron remet en doute avec dédain leurs conclusions scientifiques. Interrogé dans le journal télévisé de Martinique la 1ère, le directeur de l’INSERM, Luc Multinger a depuis réaffirmé le caractère cancérigène du chlordécone. 

Mais le point d’orgue du mépris a été atteint à la fin du débat lorsque, comprenant qu’ils n’auraient pas tous le temps d’intervenir, les élus ont pris l’initiative de se passer le micro au lieu d’attendre qu’on leur donne la parole. Comme nombre de ses prédécesseurs avant lui, Macron a alors fait appel au bon vieux paternalisme colonial pour ramener l’ordre dans la salle : « Les enfants, asseyez vous, vous n’êtes pas dans une communauté auto-gérée, c’est moi qui donne le micro … […] La Réunion a déjà assez parlé, la Martinique aussi... ». Le débat était ainsi clos.

Encore une fois, Emmanuel Macron fait la démonstration de son mépris quand aux problèmes auxquels sont confrontés ceux d’en bas et ce n’est pas via un débat national, tout grand qu’il soit, que le rapport de forces pourra être inversé. D’autant plus que derrière ce débat avec les élus locaux, il y a la question de la colonistaion. En effet, la pauvreté et le chômage dans ces territoires sont entretenus par le système. Le fait que l’Etat ne daigne s’engager financièrement dans ces problèmes sanitaires et écologiques prouve que les habitants des colonies ne sont que des "français" de seconde zone et que leur santé importe peu à Macron tant qu’il peut aisément piller les ressources locales, vitales pour l’Hexagone.


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