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Réussissez bordel !

Macron peine à se racheter une popularité sur TF1

Dimanche soir Macron, pour la première fois de son mandat, se prêtait au jeu du grand entretien télévisé. Dans un contexte où le rejet de ses contre-réformes est majoritaire dans la population, le président a tenté de « faire de la pédagogie » et renouer le contact avec ceux qui le perçoivent comme le président des hyper riches. Exercice raté. Selon un sondage, 61 % des personnes ayant assisté à l’interview, ne se disent pas convaincues par son discours. Et pour cause, il faudra plus de quelques explications pour nous convaincre que la vie de précarité que nous prépare Macron devrait nous satisfaire. Qui plus est quand, loin de changer de ton, Macron réaffirme son mépris de classe éhonté.

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Un président des riches…

Déjà candidat, et a fortiori depuis son élection, on ne peut pas dire qu’Emmanuel Macron ait multiplié les efforts pour apparaitre « populaire » envers le monde du travail et la jeunesse. De ses propos aux ouvriers de Whirlpool menacés de licenciement, leur expliquant qu’il n’était pas le père Noël, aux injonctions aux salariés de GM&S de chercher du boulot plutôt que « foutre le bordel », en passant par sa diatribe sur les « fainéants, les cyniques et les extrêmes » pour parler des opposants aux ordonnances, il ne se prive pas d’exprimer régulièrement son mépris pour le monde du travail, la classe ouvrière. Élu par une base sociale minoritaire, sa politique anti-ouvrière et sociale n’a cessé d’approfondir le fossé avec les classes populaires. Il n’a jamais cherché à élargir son assise sociale. Sa campagne, contrairement à celles des présidents de droite qui l’ont précédé, ne faisait même plus semblant de s’adresser aux classes populaires : pas de théories sur la fracture sociale comme Chirac, ou de discours donnant espoir de « gagner plus » en « travaillant plus » comme le très bling-bling Sarkozy.

Depuis son élection, s’abattent les réformes toujours plus ostensiblement anti-populaire : baisse des APL de cinq euros pour tous et de 60 euros pour les locataires HLM, suppression des contrats aidés, hausse de la CSG, sans compensation pour les retraités, suppression de la prime d’activité pour les handicapés, gel du point d’indice des fonctionnaires, etc. À l’inverse, ses politiques sont ouvertement pro-patronales et pro-riches. Dans les mêmes semaines, Macron n’a pas eu peur de prendre cinq euros dans la poche de ceux qui ne mangent pas toujours à leur faim, et de diminuer l’impôt sur la fortune (ISF) – ouvrant une brèche pouvant conduire à sa suppression.

… à la popularité en chute libre

Toutes ces politiques et son mépris de classe ostentatoire ont fini par porter leurs fruits : le taux de popularité de Macron – autour de 30% – est historiquement bas pour un président à ce stade de son mandat. Déjà détesté d’une grande partie de la population, il commence également à être rejeté par une partie de sa base électorale. Et si les mobilisations en cours ne sont pas à la hauteur de l’ampleur des attaques, en grande partie du fait de l’attentisme des directions syndicales, elles expriment néanmoins une colère qui ne s’éteint pas. Les journées de mobilisations nationales, bien qu’isolées, continuent depuis un mois à réunir à chaque fois des centaines de milliers de personnes.

Dans ce contexte, le « grand entretien » donné par Macron à TF1 et LCI se donnait bien pour but de tenter de rattraper le tir, et apaiser le climat de polarisation croissante, créé par son image de président pour les riches. Les médias dominants le soulignaient eux aussi, Macron a pensé un moment qu’il pouvait s’abstenir de s’adresser aux masses. C’était donc la première fois depuis son élection, qu’il se prêtait à l’adresse aux français à la télévision, dans ce quel’Opinionqualifiait « d’exercice de rattrapage ».

61% des téléspectateurs pas convaincus

Pour cette première, le public a été au rendez-vous. L’interview d’une heure a été regardée par neuf millions de téléspectateurs, un succès. C’est ce que mettent d’ailleurs en valeur la majorité des médias en ce lundi. Et si l’entretien peut être considéré comme une performance réussie d’un point de vue formel, le président se montrant alerte et à propos ; à regarder les sondages, Emmanuel Macron n’est pas parvenu à inverser la balance, et même à minima de montrer meilleur visage. Se contentant de réaffirmer sa politique sans introduire de nouveaux éléments, tout son discours a consisté en une longue justification, en réalité assez sur la défensive, comme le soulignait à nouveau l’Opinion.

L’ISF, expression de la « jalousie française »

L’objectif central dans cette adresse directe aux français était certainement de casser l’image qui colle à la peau de Macron de président des riches. Il n’aura pourtant réussi qu’à la rasseoir. Interrogé par les trois journalistes sur la réforme de l’ISF qui apparaît à juste titre comme un cadeau aux riches, Macron répond « je n’aime pas cette opposition de la société, quand je vous regarde je ne vois pas des riches, pourtant statistiquement vous l’êtes ». « Tout de suite ça crée quelque chose… dans le vocabulaire » ! Pour Macron, la richesse ne serait pas une réalité matérielle mais un distinction linguistique superflue. Entre Pierre Gattaz et un ouvrier licencié de GM&S, quelle différence après tout. ll poursuit : « Ce sont ce que j’appelle les passions tristes de la France[…] je ne crois pas à cette jalousie française qui consiste à dire il y a des gens qui réussissent, taxons-les, nous nous porterons mieux », rappelant son fameux mot sur les gares, « ces lieux où il y a des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien ».

Les « premiers de la cordée » et « les multirécidivistes »

"Je crois à la cordée, il y a des hommes et des femmes qui réussissent parce qu’ils ont des talents, je veux qu’on les célèbre [...] Si l’on commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordée, c’est toute la cordée qui dégringole", a t-il plaidé ensuite. Métaphore fallacieuse qui consiste d’abord à nier toute considération de classe, prétendant que ceux qui nous dominent ne seraient arrivés là que par les efforts et le mérite, et qu’il ne tiendrait qu’à chacun d’entre nous de faire de même. Mais surtout cette théorie du ruissellement réinventée, repose sur l’idée – que tous les salariés savent grotesque – qu’il y aurait un quelconque partenariat et intérêt commun entre le patron et eux. Inversant le rapport réel, selon Macron et sa cordée il s’agirait d’un système d’entre-aide dans lequel les riches soutiendraient, porteraient les plus faibles. Tout au contraire, ce sont les patrons qui ne vivent que grâce au travail de leurs salariés.

Si Macron tentait d’apparaitre pour autre chose que le « président des riches », qu’il affirme ne pas être, c’est bien raté. À eux toutes les expressions élogieuses, les autres étant taxés de délinquants. Pour le président en effet, les chômeurs refusant des emplois ne sont pas moins que des « multirécidivistes ».

Sur les GM&S : « J’assume totalement ce qui a été dit »

Quant à toutes ses déclarations, notamment à propos des ouvriers de GM&S ayant suscité un tollé, Macron a refusé de les retirer. Début octobre il avait en effet engagé les ouvriers en lutte « au lieu de foutre le bordel », à aller « regarder s’ils ne [pouvaient] pas avoir des postes » ailleurs. Loin de revenir sur ses mots, Macron a persisté : « J’assume totalement ce qui a été dit[…] lorsque certains bloquent tout, se mêlent à des activistes violents, font tout, non pas pour trouver un emploi, mais pour toucher la supra légale [une indemnité supérieure de licenciement, ndlr] ... eh bien je dis les choses comme elles sont. » « Quand on s’approche de la vérité on s’y brûle » appuie-t-il.

Les GM&S ont répondu à ces propos dans une vidéo (voir ci-dessous),on les voit regarder, amers le discours jupitérien sur TF1. « C’est politiquement bien joué, mais humainement c’est pitoyable ».


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