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Marseille. Les éboueurs en grève face au harcèlement de leur direction

Depuis jeudi 17 décembre, 230 éboueurs marseillais sont en grève contre les licenciements et le harcèlement quotidien de leur direction.

Alex Simonin

25 décembre 2020

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Un mouvement de grève perdure depuis une semaine, suivi par 100% des salariés de Derichebourg Polyceo, branche de l’entreprise chargée entre autres du ramassage des ordures et de la propreté dans les 2e, 15e et 16e arrondissements de Marseille. Les 230 grévistes exigent que leur directeur et son adjoint soient mutés ailleurs, dénonçant le « harcèlement quotidien » qu’ils exercent sur les salariés.

Un travailleurs témoigne que depuis l’arrivée de ce directeur en 2017, l’entreprise a connu une quarantaine de licenciements. Ces méthodes de la direction, que relatent les salariés, font largement échos aux politiques patronales menées depuis des mois : des licenciement massifs qui précarisent l’ensemble des travailleurs, et en premier lieu ceux qui étaient en première ligne face à la pandémie, les « héros » du Covid. C’est d’ailleurs les licenciements à tour de bras qui avaient poussé un éboueur au suicide, licencé après avoir été mobilisé pendant le covid.

La grève des éboueurs marseillais fait écho à la colère exprimée à Paris, où des agents de nettoyage exigeaient déjà il y a quelques semaines des conditions de travail décentes avec le matériel sanitaire nécessaire pour ceux qui brassent les ordures et les bactéries qui s’y trouvent indéniablement.

Ce service public et essentiel connaît une privatisation croissante, avec un recours massif à des entreprises de sous-traitance donc le seul objectif est d’accumuler du profit en faisant payer la crise aux travailleurs. « Il agit en dictateur, met la pression et harcèle les salariés » témoigne un salarié à propos du directeur. En ce sens, et en période de crise économique qui fait gonfler le chômage et favorise le chantage à l’emploi, ces méthodes visent à imposer des conditions de travail toujours plus dégradées. 

Mais depuis une semaine les grévistes ne cèdent pas à la pression. La direction a proposé de « réviser le règlement intérieur et à remettre à zéro les dossiers disciplinaires ». Une proposition méprisante envers les travailleurs qui savent très bien que les sanctions et les pressions augmenteront si le rapport de forces retombe, dans ce contexte de crise. L’un d’eux témoigne sur le piquet : « On ne peut pas reprendre avec une direction avec laquelle on travaille avec la peur au ventre d’être licencié. Les licenciements, c’est une simple formalité pour eux et c’est la destruction d’une vie pour d’autres ».

Ayant d’abord considéré les éboueurs comme des héros, la métropole s’est rapidement alignée sur la direction de Derichebourg en se plaignant des grévistes. Une tentative de casser la grève par le biais d’un illusoire dialogue social a vu le jour ce mardi en « réunissant syndicats et représentants de la direction de l’entreprise », mais aucun accord n’en est sorti.

Plus significatif encore du mépris porté aux grévistes, selon Emmanuel Brun, directeur général de Poly-Environnement, maison mère de Polyceo, le problème serait surtout « la volonté de certains salariés de ne pas se soumettre à certaines règles ». On ne saurait mieux résumer le cynisme d’un patronat décomplexé qui compte faire payer la crise aux travailleurs coûte que coûte.

Aussi la Métropole n’ayant pas réussi à faire plier les travailleurs par un accord, a décidé de faire appel aux forces de répression pour lever les blocages des sites de tri. Encore une fois les institutions qui privatisent leurs services et les patrons qui en tirent profits s’entendent sur des intérêts communs, utilisant leur bras armé pour mater toute contestation. A l’instar des autres secteurs qui ont relevé la tête contre la privatisation et pour défendre leurs intérêts et ceux des usagers, comme la SNCF, la RATP, ou plus récemment les hospitaliers la seule réponse est celle de la matraque. 

Il s’agit donc, au delà de revendiquer le départ de deux membres de la direction, d’exiger l’arrêt de la privatisation et du recours à la sous-traitance au sein de ces secteurs essentiels. Des services qui ne peuvent être assurés convenablement et avec des conditions de travail dignes que par un contrôle des travailleurs eux-mêmes en étroit lien avec la population. 

Une solidarité semble se nouer autour des grévistes au grand dam de la direction qui dénonce « des interventions extérieures à l’entreprise ; on a bien vu pendant ce mouvement qu’un certain nombre de ceux qui sont dans les piquets de grève n’appartiennent pas à l’entreprise ». C’est de cette solidarité entre les agents et la population et les autres secteurs du monde du travail dont il faut se nourrir pour construire un rapport de force contre le patronat qui cherche à nous faire payer la crise.


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