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Le profit toujours le profit …

Mort d’un nourrisson suite à la prise d’Uvestérol D, la commercialisation momentanément suspendue

Le 21 décembre dernier, un nouveau-né âgé d’une dizaine de jours, est décédé suite à un arrêt cardio-respiratoire après avoir reçu une dose d’Uvestérol D, médicament produit par les laboratoires Crinex à base de vitamine D et administré régulièrement aux jeunes nourrissons pour contrer les carences en vitamine D. Ce tragique décès ravive la polémique vieille de plus d’une quinzaine d’année à propos de la commercialisation de ce médicament. En effet, sa mise en vente suscite depuis longtemps de nombreuses oppositions dans le milieu médical et pharmaceutique, de nombreux professionnels et organismes de santé alertant sur les effets secondaires que peut engendrer la prise de ce médicament chez les nourrissons, tels que des malaises et des troubles vagaux, aux conséquences parfois dangereuses.

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Ainsi, l’Uvestérol D est sous surveillance depuis 2006 et fait l’objet d’un plan de gestion des risques depuis 2011. Mais il a fallu attendre le décès de ce nourrisson pour que les autorités de la santé aillent plus loin que ces demi-mesures inefficaces et mettent en place des mesures de suspension de commercialisation, temporaires pour le moment.

En effet, aujourd’hui, suite au décès de ce nourrisson, une suspension temporaire de la commercialisation de ce médicament a été mise en place. Selon Marisol Touraine, ministre de la Santé, cette procédure de suspension a été déclenchée par « mesure de précaution ». Mesure de précaution prise par l’ANSM, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, qui déclare que les «  conclusions des investigations disponibles à ce jour mettent en évidence un lien probable entre le décès et l’administration de l’Uvestérol D  ».

Dans l’attente de la décision définitive de l’ANSM concernant la mise sur le marché du médicament, Marisol Touraine « appelle, par mesure de précaution, les parents à ne plus administrer l’Uvestérol D à leurs enfants », appelant « les familles à se rapprocher de leur professionnel de santé, qui leur proposera de la vitamine D sous une autre forme », puisque c’est le mode d’administration du médicament, par pipette, et non sa substance, en l’occurrence de la vitamine D, qui présente des risques de complications médicales.

À cela, elle promet de garantir « une information transparente, objective et fiable. Et je mets tout en œuvre pour leur proposer, en lien avec les professionnels de santé, une solution alternative », précisant que les recommandations pour les professionnels de santé leur seront adressées dans la journée et qu’un numéro vert d’information sera mis en place dans la matinée : 0800 636 636.

Mais pourquoi cette « information transparente, objective et fiable », ainsi que la nécessité de donner des « solutions alternatives » n’ont-elles pas émergées avant ? Pourquoi a-t-on laissé sur le marché ce médicament alors que les autorités de santé, alertées par plusieurs professionnels et organismes, avaient connaissance des effets secondaires que pouvait engendrer l’Uvestérol D ? Sachant que d’autres alternatives existent ? Faut-il attendre la mort d’un nourrisson pour que des mesures à la hauteur des risques encourus soient prises ?

En effet, même si « une dizaine de millions d’enfants ont été traités grâce à l’Uvestérol D depuis sa commercialisation en 1990, sans aucun décès à déplorer  », comme le souligne l’entreprise Crinex ainsi que l’ANSM, celui-ci a été à l’origine de nombreuses complications médicales, aux conséquences parfois graves.

De 2006 à aujourd’hui, plus d’une centaine de cas d’effets secondaires ont été enregistrés.

Ces dernières années, des responsables de la pharmacovigilance ont réclamé la suspension de l’Uvestérol D du marché. Mais, face à cela, seules des demi-mesures, pour le moins inefficaces, ont été mises en place par les autorités et par l’entreprise Crinex. Parmi celles-ci : mise sous surveillance renforcée du médicament de la part des autorités sanitaires, plan de gestion des risques de la part de l’ANSM qui « rappelle les modalités d’administration et réfléchit à de nouvelles mesures de minimisation du risque », nouvelles pipettes, fiches de conseils…

Mais comme le mentionne la revue indépendante Prescrire, ces mesures ont été insuffisantes et inefficaces. Les cas de malaises, et plus généralement de complications médicales, n’ont pas cessé.

Face à ces demi-mesures, qui témoignent du manque de prise en charge sérieuse du problème par les autorités sanitaires, la solution la plus sensée et efficace aurait été alors de suspendre la commercialisation de ce produit. Mais la commission d’autorisation de mise sur le marché, qui est décisionnaire, en a décidé autrement ! Et ce malgré toutes les demandes effectuées par des responsables de santé. Celle-ci a juste adressé une demande de minimisation des risques auprès des laboratoires, préférant de fait que les doutes quant au bien-fondé de la mise sur le marché de l’Uvestérol D bénéficient au médicament, à l’entreprise Crinex, pour qui la vente d’Uvestérol D représente environ 10 % de son chiffre d’affaires, plutôt qu’aux patients, aux nourrissons, qu’elle laisse exposés à des risques graves, quand bien même ces derniers soient « rares ».

Suite à ce décès, les responsables de plusieurs centres régionaux de pharmacologie ont à nouveau demandé la suspension définitive de la commercialisation de l’Uvestérol D. Du côté des pédiatres, l’incompréhension est également présente. Selon Edwige Antier, «  à partir du moment où il y a des accidents de ce type et qu’il existe une autre présentation, on ne comprend pas, nous praticiens, pourquoi on ne les supprime pas du marché. On devrait le retirer, surtout quand il y a un autre médicament. De plus, ça nous met en insécurité dans nos prescriptions car on fait confiance aux autorités mises sur le marché ».

Avec cette énième complication médicale, cette fois-ci mortelle, c’est une nouvelle fois la logique du profit et de la rentabilité qui a primé au service de l’industrie pharmaceutique.


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