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Vers une reprise de la mobilisation étudiante ?

Mouvement étudiant. Echos de la rentrée sur plusieurs facs

Guillaume Loic Au printemps et jusque début juillet, des milliers et des milliers d'étudiants ont pris le chemin des AGs, des manifestations et de leurs différents cortèges, des comités de mobilisation et des coordinations qui se sont montées pour que ce soit celles et ceux qui luttent qui décident de l'orientation du mouvement. Si la mobilisation n'a pas été aussi massive que des combats comme le CPE (2006), elle est néanmoins particulièrement marquante par sa profondeur politique, avec une nouvelle génération de militants, étudiants de licence dans leur quasi totalité, sur qui ne pèsent pas les défaites précédentes et qui incarnent une grande radicalité politique à travers une rupture consommée avec le part socialiste. Il y a dix jours, nous soulignions le potentiel de ce nouveau secteur militant pour renouveler et refonder les organisations étudiantes, et proposions les axes de ce qui nous semblait être une orientation à même de relancer les hostilités en cette rentrée, en contrant le climat réactionnaire imposé par les classes dominantes. Depuis, les prérentrées et les cours ont commencé à reprendre sur plusieurs universités...mais, aussi, les activités militantes, des comités de mobilisation, des initiatives. Nous donnons donc la parole aux militantes et militants de terrain, de Révolution permanente et d'ailleurs.

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Pour compléter cette première compilation avec les échos de la rentrée sur vos universités ou vos lycées, écrivez nous : [email protected]

Arthur et Thabitha, Paris 1 (NPA - RévolutionPermanente) :
A : « Comme souvent, c’est surtout à Tolbiac qu’est en train de se relancer la dynamique. Et on est tous plutôt positivement surpris de ce qu’on voit ré-émerger. A la fin du mois d’août, la boucle mail du comité de mobilisation a commencé à se réveiller, et l’on a prévu une diff dès le 1er septembre, quand commençaient les prérentrées, pour proposer une réunion de ce cadre d’auto-organisation où peuvent se retrouver tous les gens qui veulent s’investir. Tolbiac, c’est trois grandes tours et un petit espace au sol, « la fosse », où tout le milieu militant se retrouve au coude à coude dans ce genre de moment. En l’occurrence, nous qui étions une grosse poignée à préparer le premier « comob’ » de la rentrée, et on a été pas mal surpris par le dispositif prévu par la direction de l’Unef, qui avait amené beaucoup de ses militants permanents pour tenir des tables et encarter des étudiants. A vrai dire, je trouve positif que les gens s’organisent, on en a bien besoin, mais je pense que cette décision de l’Unef visait surtout à chercher à se refaire une santé après un moment qui les a débordé, voir carrément laissés de côté, car les étudiants ne veulent plus d’organisations inféodés à un parti dominant comme le PS. C’est d’autre chose qu’on a besoin, d’un mouvement étudiant indépendant, qui parte de la défense des intérêts des étudiants mais ne s’y limite pas, parce que de toutes façons les différentes attaques font système et que gagner contre la loi travail et son monde implique de construire l’alliance au delà de nos facs ».
T : « On a donc bataillé pour que la réunion du comob soit une réussite, et là, bonne surprise : quarante personnes dont une quinzaine de nouvelles têtes jeudi dernier. Cela nous a permis de faire un plan assez offensif pour tenter de relancer le mouvement et répondre à la situation. D’abord, on a décidé de faire une AG ce mercredi 14 à 17h, pour que tous les étudiants, profs et personnels de Paris 1 puissent discuter largement de tout ça. Depuis lundi la fac est recouverte de cette info, et on est nombreux à diffuser le tract issu de cette première réunion. On y appelle aussi à la manifestation du 15 à 14h à Bastille, avec un départ commun des étudiants de Paris 1 depuis Tolbiac. Ensuite, dans le sens de ce que je disais, on a décidé d’apporter une réponse forte à la déferlante raciste et islamophobe de l’été, en lançant le projet d’un meeting avec Assa Traoré, la sœur d’Adama, qui a été assassiné par la police cet été. Celle-ci a accepté, et viendront aussi des portes parole de collectifs contre l’islamophobie, c’était important après l’affaire du burkini. Le meeting aura lieu le jeudi 29 septembre au soir, retenez déjà la date ! On espère que ce sera un outil pour que les étudiants et les jeunes racisés, des quartiers, commencent à tisser les liens nécessaires à un combat commun contre la loi travail et tout ce qui va avec : les contrôles au faciès, les violences policières, le chômage, etc ».

Tamara, Paris 6 (membre du comité de mobilisation) :
« Pour commencer par un petit retour en arrière, comme dans beaucoup d’universités, la mobilisation a débuté à Jussieu par une Assemblée Générale le 9 Mars à la suite de laquelle s’est tout de suite formé un comité de mobilisation. La première tâche que nous nous sommes fixés en tant que tel a été d’informer les gens. En effet contrairement à certains autres endroits, une grande partie des étudiant-e-s de P6 ne se sentent pas concerné-e-s par la politique et ne se tiennent pas au courant de l’actualité. Tout au long de la mobilisation, nous avons ainsi en particulier lutté contre cette non-politisation dont nous souffrons doublement en tant que fac de sciences (domaines assimilés comme neutres vis-à-vis de la politique, formations avec des TPs obligatoires, emplois du temps chargés, etc.) et « lieu de formation d’élite ». Nous avons cependant réussi à organiser plusieurs événements au sein de campus qui ont très bien fonctionné (tables d’information, diff de tracts, pique-nique avec des invendus de supermarché, projections de film). Notre comité de mobilisation est toujours resté actif et avec un nombre de membres constant. C’est grâce à tout cela à mon avis que notre rentrée s’est bien passée avec une réunion du comité de mobilisation aussi importante que pendant le mouvement. Nous étions présent-e-s lors de la « Welcome Week » (événement de présentation de la fac et de ses associations) où nous avons eu d’assez bons retours des étudiant-e-s dont certain-e-s sont motivé-e-s pour prendre part au mouvement qu’ils et elles ont suivi de près ou de loin avant les vacances. Cependant, beaucoup de gens s’étonnent aussi de nous revoir : « qu’est-ce que vous faites là ? C’est fini, la loi elle est passée. » Nous nous armons donc de patience pour expliquer à tout le monde l’importance de la mobilisation ».

Olivia, Paris 7 (NPA - RévolutionPermanente) :
« Les échos ici sont très enthousiasmants. Sur un premier plan, voilà maintenant un peu plus d’une semaine que je suis tous les jours sur l’université pour tenir une table politique avec du matériel du NPA jeunes et des articles de Révolution Permanente. Que les étudiants qui viennent nous parler connaissent ou non notre journal, et qu’ils aient ou non été militants du mouvement, ils ont tous un point commun : la conscience que les revendications du printemps dernier se devaient d’être bien plus larges que le simple retrait de la loi travail, car la police n’était pas parmi nous pour protéger les manifestants, car le meurtre d’Adama Traoré est un scandale qui témoigne du racisme d’Etat, tout comme l’affaire du burkini. Autrement dit, une conscience politique bien plus lucide qu’elle ne pouvait l’être chez les étudiants il y a un an jour pour jour ! Puis, juste avant le week-end s’est réuni pour la première fois depuis la rentrée le comité de mobilisation qui a regroupé un peu plus d’une vingtaine de personnes. Phénomène très prometteur sachant que les cours n’avaient pas encore repris, et que nombreux étaient les militants du mouvement encore en vacances. A donc émergé de ce cadre plusieurs initiatives, notamment faire un collage d’affiches, des banderoles pour la manifestation, un départ commun depuis l’université jeudi, et surtout une assemblée générale qui sera suivie de la projection du film ‘Alors c’est qui les casseurs ?’. Et pour distribuer le tract appelant à cette échéance depuis lundi dernier, je dois dire tout laisse présager que la flamme politique née sur les universités au printemps dernier est loin de s’éteindre ». 

Mar, Paris 8 (NPA - RévolutionPermanente) :
« Pendant les quatre mois de mobilisation contre la loi travail et son monde, Paris 8 a été un des bastions du mouvement, avec des AG à plus de six cent personnes et des dizaines de militant.e.s au quotidien. Ils et elles ont non-seulement travaillé à élargir la mobilisation sur l’université, mais également a faire le lien avec les travailleurs de la ville via l’interpro de Saint-Denis ou le soutien aux cheminots du Landy, et se sont affronté avec courage à une répression dure, sur la fac comme dans la rue. Après une telle expérience, c’était difficile pour beaucoup d’étudiants mobilisés de reprendre le chemin des cours, et de faire comme si rien ne s’était passé. D’ailleurs, on voit déjà que la direction de l’université est restée dans la même logique : renforcement des contrôles des vigiles a l’entrée, interdiction de tenir des tables militantes sans autorisation... C’est pour cela que nous avons travaillé au redémarrage du comité de mobilisation comme première espace auto-organisé de discussion collective pour cette rentrée. Nous avons relancé la dynamique à travers les réseaux sociaux autant que par des diffs quotidiennes sur la fac avec d’autres militantes et militants de la mobilisation également convaincus de cette nécessité. A Paris 8 les cours n’ont pas encore repris, mais on était quand même une quarantaine à ce rendez-vous. Des têtes bien connues après des moments de lutte commune, comme des nouveaux arrivants sur la fac qui eux aussi on combattu dans leur lycée ou ancienne fac. On a également eu la bonne surprise de la venue d’un cheminot, rencontré a travers le soutien à ce secteur en grève qui avait vu l’événement sur facebook ! Pour la manif du 15, on a décidé de continuer à bien la préparer sur la fac, et le jour même on prévoit un départ commun en cortège, en proposant aux autres universités parisiennes de se retrouver pour manifester ensemble, pour montrer que les étudiants sont toujours là. On a proposé aussi qu’une AG interfacs se réunisse le soir même du 15, pour qu’on puisse réfléchir collectivement à la suite. Sur Paris 8, il y a déjà pas mal d’idées qui ont été évoquées : soutien aux travailleurs contre les plans d’applications de la loi Travail, soutien aux Goodyear contre la répression, "libération" de salle pour pouvoir se réunir, participation à des débats organisés sur la fac, soutien à la famille d’Adama Traoré... bref, comme le disait notre tract de rentrée : ...ʺc’est pas fini !ʺ ».

Maude, Montpellier 3 (NPA - RévolutionPermanente) :
« A Montpellier, c’est dès la fin août que des étudiants mobilisés au printemps dernier ont relancé l’activité. Les réunions de prérentrée ont été l’occasion de tenir une table info et d’appeler à une AG le 13 septembre pour préparer l’échéance du 15 qui, localement, a un double enjeu : lutter contre la loi travail et soutenir Cassandre, manifestante réprimée et qui passe en procès ce jour-là. Une cinquantaine d’étudiants, anciens et nouveaux, a répondu présent et a tenu tête à l’administration qui a tenté d’empêcher la tenue de l’AG : parcours du combattant pour faire ouvrir l’amphi et pression pour le libérer au plus vite. L’AG a acté la reprise de la lutte contre la loi travail et son monde, et a affirmé la volonté d’élargir les revendications face à l’offensive sécuritaire et islamophobe du gouvernement. Le comité de mobilisation tenu dans la foulée a réuni une quarantaine de personnes, s’est attelé à l’organisation du 15 : table info la veille, tractages, banderoles et barrages filtrants le jour même rendront visible la lutte sur le campus pour appeler les étudiants et personnels à se joindre au cortège qui partira du campus pour aller rejoindre la manifestation en centre-ville. Un redémarrage dynamique donc, grâce aux contacts et aux outils d’information créés au printemps dernier ».

Léo, Toulouse Le Mirail (NPA - RévolutionPermanente) :
« À Toulouse la situation est particulière, car contrairement à pas mal d’autres universités où les cours ont déjà repris, ici on en est toujours à la phase des chaines d’inscriptions. Pour les gens que nous connaissions du comité de mobilisation, et d’après les discussions que j’ai pu avoir jusque là, il y a consensus sur la nécessité de ne pas baisser les bras et de se réunir de nouveau rapidement pour penser la suite dès la rentrée. C’est motivant de voir ce qui se fait en région parisienne où dans certaines facs des réunions regroupant plus de 40 personnes ont lieu pour organiser la poursuite de la mobilisation contre la loi travail et son monde. Sur le Mirail, les deux principaux syndicats (Solidaires EtudianteEs et UET) ont rédigé un tract d’appel à la manif du 15 pour tenter de structurer et de rendre visible la présence de la jeunesse toujours déterminée à exiger l’abrogation de la loi. Nous cherchons à faire en sorte que les cadres de discussions s’élargissent au delà des seuls militants organisés, que l’énergie de l’année dernière ne se disperse pas et que des actions soient prévues pour faire revivre ce printemps. Nous cherchons également à organiser la solidarité avec les travailleurs de la ville, que ce soit dans le combat contre la répression (plusieurs syndicalistes toulousains sont inquiétés concernant les actions du printemps, de même que des étudiants comme Anthony du Mirail) ou contre les suppressions d’emplois, comme c’est le cas à Latecoere, sous traitant aéronautique où autour de 300 emplois sont en jeu. »

Julien, Grenoble (Solidaires Etudiant-e-s) :
« A Grenoble, la mobilisation étudiante contre la loi Travail reprend assez rapidement et efficacement. Nous avons relancé un comité de mobilisation la semaine dernière ainsi que vécu notre première AG hier, mardi 13 septembre. Environ 150 personnes étaient présentes, ce qui est plus qu’honorable pour une semaine de rentrée, et qui ouvre de bonnes perspectives sur la suite. D’autant qu’il y avait une cinquantaine d’étudiants de L1, et au moins une quinzaine de personnels. Avec Solidaires Etudiant-e-s nous avons appelé dès le début du mois d’août à une inter-organisation contre le Service Civique Obligatoire et la Loi Egalité Et Citoyenneté dont ce projet fait parti. Nous pensions important de prendre l’initiative sur ce sujet car il affecte matériellement et profondément l’ensemble des étudiant.e.s. De plus l’UNEF nationalement refuse de mobiliser sur ce sujet, même s’ils sont contre en principe, ce qui force encore plus Solidaires à être en première ligne. Les étudiant.e.s se sentent très concerné.e.s sur la question du SCO et nous avons bon espoir pour la reprise d’un mouvement sur les campus cette année. Se concentrer sur les luttes réelles ne peut être que positif pour notre classe en cette année de foire électorale annoncée ! Nous espérons que le cortège jeune, étudiant.e.s, lycéen.ne.s, jeunes travailleur.se.s sera fourni ce jeudi à Grenoble ».

Océane, Bordeaux (NPA jeunes) : 
« A bordeaux, plusieurs étudiants ont redémarré dès la rentrée, et ont déjà appelé à deux AGs, qui n’ont pas rassemblé énormément de monde (50 et 10 personnes) mais qui marquent tout de même une petite dynamique au vu des délais. On y a discuté de la manifestation de jeudi, et lors de la deuxième réunion deux travailleurs sont venus, ce qui témoigne des liens qui ont été créés au printemps. L’ambiance est à ne pas lâcher, avec encore pas mal de détermination, et les gens se sont organisés sous la forme d’une coordination à l’échelle des différentes facs de la ville qui regroupent une cinquantaine de jeunes et qui se charge de la préparation des prochaines AGs et de la manif. En clair, pour l’instant, ce qui s’exprime au moins c’est une volonté forte que ça reprenne chez les militantes et militants du mouvement. A suivre ! ».


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