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« Aujourd’hui, le gouvernement fait courir un danger réel à toute la population »

Normandie. Contre Valls et Total, les raffineurs en grève tiennent bon !

En milieu de journée, à la CIM, troisième dépôt d’Europe, les grévistes ont reconduit le mouvement pour 48 heures à 85 %. Du côté de la raffinerie de Normandie de Gravenchon-L’Orcher, les salariés de Total en grève ont reconfirmé à chaque quart la poursuite de leur mouvement jusqu’au retrait de la loi travail. Malgré les pressions et les menaces du gouvernement et de la préfète de Seine-Maritime, « l’état d’esprit est à la détermination », confie Thierry Defresne, délégué CGT Total en poste sur la raffinerie.

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Après un bras-de-fer qui s’est étendu pendant toute la journée de vendredi, entre 5 heures et 20 heures, la direction de Total a fait marche-arrière et a renoncé à faire sortir des produits stockés de la raffinerie avec du personnel non-gréviste ou des personnels non-formés. « Jusqu’à vendredi, les copains grévistes effectuaient les quarts pour des questions de sécurité. Quand la raffinerie est à l’arrêt, les risques de fuites, que les joints ne lâchent, sur les colonnes ou les pompes, par exemple, sont plus importants. Les grévistes effectuaient donc les relèves. Mais quand on a su que la direction voulait sortir du produit avec des non-grévistes et en se fichant de la sécurité, on s’est retirés du site. Toute l’intersyndicale havraise était à nos côtés, avec les dockers. Du coup, à 20 heures, ils ont dû renoncer à leur projet, raconte Defresne ».

Les pressions sont énormes, d’autant plus que le dépôt du Havre et les raffineries de Normandie alimentent la région parisienne et les deux terminaux de Roissy et d’Orly. « La préfète de Seine-Maritime a demandé que du produit soit poussé par pipeline en direction de Paris. À la CIM, ce sont des cadres non-grévistes à qui on a demandé de prendre la main. Ils ont pris deux bacs. Ils ont ouvert les vannes à 25 % en direction de la raffinerie ExxonMobil de Gravenchon, qui n’est pas en grève mais qui ne disposait plus que deux jours de réserves pour ses opérations de raffinage. L’activité aurait pu être stoppée, même si l’établissement n’est pas en grève. Les non-grévistes ont fait de même pour le kérosène, à destination des aéroports parisiens, qui auraient pu être à sec dès [mardi] soir. C’est absolument délirant, souligne Defresne, inquiet. En termes de sécurité, ce sont des personnels qui ne savent pas quelle est la conduite à tenir en cas de fuite, en cas d’incendie, voire même en cas d’orage. Ce qui se passe actuellement est dangereux, car le risque n’est plus du tout maîtrisé et on est sur des sites Seveso 2. Pour nous, la sécurité est primordiale. Aujourd’hui, le gouvernement fait courir un danger réel à toute la population de Normandie ».

Les patrons de l’industrie pétrolière qui ont été reçus par le gouvernement vendredi sont vent debout. En raison de la grève sur sept des huit raffineries du pays, les pertes se chiffrent en dizaines de millions d’euros par jour et l’enjeu est de faire reprendre le travail coûte-que-coûte. « Mais chez nous, à Gonfreville l’Orcher, même si on a connu des mouvements avec davantage de grévistes chez les travailleurs postés, ça ne prend pas. Même si on était moins de 50 % de grévistes, on ne lâcherait pas. Et sur les autres raffineries, les grévistes sont à 70 ou 80 %. Total comptait sur un effet domino, s’ils nous faisaient céder. Mais ça n’a pas marché, ils ont échoué ».

Reste le risque de la réquisition, que les raffineurs de Grandpuits(77) ont déjà connu, en 2010. « La décision prise par le gouvernement Sarkozy à l’époque a été cassée à l’OIT, qui a notifié à la France qu’on pouvait envisager de réquisitionner des salariés pour assurer la continuité d’une production pour des questions de sécurité, pour les hôpitaux ou les pompiers, mais qu’on ne pouvait pas les réquisitionner pour servir les clients de Total. J’imagine que le gouvernement veut exploiter ce vide juridique-là, en invoquant des problématiques liées à la sécurité. Chez les grévistes, la question des réquisitions passe mal. C’est six mois de prison qui sont encourus si on ne respecte pas une notification, mais chez les grévistes, il y a des gars qui disent qu’il est hors de question qu’on soit réquisitionné. Qu’ils peuvent bien envoyer les gendarmes à la maison. Ils ne ne bougeront pas ».

Le mot d’ordre reste celui du retrait, ratifié en AG. « De ce qu’on a pu faire remonter, au sein de la fédération, c’est que dans les échanges entre Philippe Martinez et Manuel Valls, le gouvernement cherche une porte de sortie et commence à parler d’une suspension de la loi, en évitant le mot retrait. Bien sûr que ça changerait les choses, si le texte, en l’état, était suspendu. Ce serait vécu comme une victoire. D’ici là, on ne lâche rien, parce que la semaine qui commence va être décisive ».

Propos recueillis par Jean-Patrick Clech


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