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Communication contradictoire

Qui sont les irresponsables ? Quand Macron allait au théâtre pour inciter à sortir malgré le coronavirus

La population se fait rabrouer et infantiliser depuis plusieurs jours par le Premier ministre, le Président, la Première dame. On leur fait comprendre qu’ils n’auraient pas su saisir l’importance de la pandémie, qu’ils sous estimeraient la gravité de la situation. Pourtant de discours ministériels en exemple présidentiel, c’est bien par en haut que la crise a été minimisée.

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Il y a quelques jours encore tout allait bien dans le meilleur des mondes…

Il y a quelques jours encore, Emmanuel et Brigitte Macron cherchaient à nous rassurer en se rendant au théâtre, laissant penser que non, la France ne serait pas touchée, qu’il n’y avait pas de raison de s’inquiéter, que la pandémie s’arrêterait aux frontières ! C’est avec une assurance certaine que le gouvernement a déroulé la communication ; tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes ! Et il ne fallait surtout pas troubler l’ordre paisible de la consommation. 

Article BFMTV datant du 7 mars

Il y a quelques jours encore, le 11 mars, alors que la pandémie était déjà bien avancée en Europe et que la France commençait à compter quelques cas, Macron prononce un discours intitulé « Nous ne renoncerons à rien… » en hommage aux victimes du terrorisme. Dans lequel il décrit alors « la joie de vivre du peuple français ». Entende qui voudra mais pendant une pandémie planétaire, ces paroles – que Macron voulait destiner aux victimes en affirmant que face au terrorisme « nous ne renoncerons à rien » – ne pouvaient pas ne pas faire écho à une certaine forme de certitude gouvernementale que la pandémie ne passerait pas les frontières, que la France était comme intouchable. Tandis qu’au même moment se mettait en place dans les pays voisins clusters et quarantaine, le discours enjoignant à la liberté de circuler, de se promener, de chanter (et de consommer !) semblait être une invitation à faire comme si de rien n’était. Quoi d’autre alors que de l’arrogance et une certaine volonté de continuer à faire tourner la machine : « Nous ne renoncerons à rien. Surtout pas à rire, à chanter, à penser, à aimer. Surtout pas aux terrasses, aux salles de concert, aux fêtes de soir d’été. Surtout pas à la liberté. Surtout pas à notre esprit de résistance qui fait la République si grande, la France si forte. »

Alors, comme galvanisé par cette arrogance dont ils savent si bien faire preuve, c’est au ministre de l’Éducation d’apparaître comme l’homme fort que rien n’atteindra, pas même le coronavirus et de déclarer tout aussi certain que non, il n’était absolument pas question de fermer les écoles ! 

Le point de bascule

Et comme en Macronie tout est théâtre, ils se sont finalement réveillés et se sont rendu compte que le train-train quotidien ne pourrait pas continuer. Le lendemain du « nous ne renoncerons à rien », le soir du « pas de fermeture des écoles », Macron réalise un virage à 90° et s’érige en homme fort et responsable face à la pandémie.

Celui-là même qui incitait à sortir quelques jours plus tôt, découvre alors que la pandémie est finalement bel et bien là et qu’il va falloir prendre des mesures, qu’il faudra même ralentir l’économie. Alors en homme responsable, en Jupiter, il s’impose comme le garant de la sécurité et de la santé des Français et c’est à ce moment que tout bascule dans le discours ; que les responsables sont ceux d’en haut et les irresponsables les petites gens d’en bas qui continuent de sortir malgré l’allocution présidentielle. 

Le gouvernement nous parle comme à des enfants mais qui sont les irresponsables ?

Alors, depuis dimanche et ce changement brusque de positionnement du gouvernement, il a été décidé de gronder la population et de nous faire passer pour les irresponsables.

Tranquillement, Édouard Philippe a commencé à nous parler comme à des enfants : « Après les annonces du président, jeudi soir, vendredi et encore ce matin, je suis sorti et chacun a pu faire cette expérience, et nous avons vu trop de gens dans les cafés, dans les restaurants. Cela me réjouirait en temps normal parce que c’est la France que nous aimons tous mais pour quelques semaines ce n’est pas ce que nous devons faire ! »

Puis c’est au tour de Brigitte Macron de fustiger la population et de se déclarer choquée que les Parisiens continuent à se promener sur les quais. Celle-ci s’est dite « stupéfaite d’y croiser autant de monde » – elle avait déjà lors du vote pour les municipales au Touquet « été interloquée de voir les gens se masser les uns contre les autres » à la sortie du bureau de vote. Le ton est alors donné par la première dame, celui du mépris, du dégoût ; le bas peuple répand la pandémie et elle le regarde de sa tour d’ivoire !

Et lundi soir Macron de nous disputer à son tour : « Nous avons vu des gens se rassembler dans des parcs, des marchés bondés, des restaurants, des bars, qui n’ont pas respecté les consignes de fermeture, comme si au fond la vie n’avait pas changé. À tous ceux qui, adoptant ces comportements, ont bravés les consignes, je veux dire ce soir très clairement : non seulement, vous ne vous protégez pas vous … mais vous ne protégez pas les autres… ». Avec un paternalisme certain, le Président fait la leçon.

Alors Brigitte, Édouard et Emmanuel sermonnent ceux qui n’auraient pas bien appris la leçon ! Mais s’ils incarnent tout à coup cet autoritarisme, c’est qu’eux-mêmes n’ont pas su dès le départ prendre la mesure de la situation et qu’ils sont aujourd’hui dos au mur, forcés d’apparaître en responsables.

Qui sont les irresponsables ? Puisque ceux qui aujourd’hui appellent au civisme, au respect des consignes et au confinement sont ceux là-même qui ont tardé à prendre des mesures d’urgence, pour des raisons économiques essentiellement. Ceux-là encore qui aujourd’hui sont incapables de subvenir aux besoins élémentaires des soignants, en leur fournissant masques, gants et gel hydroalcoolique ; ceux-là mêmes qui ont cassé les services publics et engendré la situation où il est impossible de faire face à la pandémie par manque de lits, de personnels, de matériel… Les irresponsables ce sont encore eux qui ne rendent pas les dépistages systématiques, et même difficiles à obtenir, et ne donnent donc aucune visibilité scientifique sur la situation. Pendant ce temps les entreprises continuent à mettre la pression sur les travailleurs et notamment sur les plus précaires en jouant du flou maintenu par le gouvernement. Ce gouvernement d’irresponsables qui a même maintenu coûte que coûte le premier tour des élections municipales alors que de nombreux médecins s’y opposaient. Alors Brigitte peut bien être choquée, Édouard peut bien fustiger l’attitude de la population, Emmanuel peut bien nous gronder, les premiers à blâmer, ceux qui ont mis nos vies en danger et qui aujourd’hui appellent à l’unité pour couvrir leurs méfaits, ce sont eux !


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