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ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Une licence universitaire financée par BNP Paribas : premier pas avant la généralisation ?

Ce projet marque aussi une nouvelle étape dans la structuration du rapport de dépendance des universités au monde de la finance.

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C’est une association surprenante qui s’est nouée, jeudi 21 février, entre la plus grande banque de France et un établissement universitaire parisien. Lors de la tenue, ce jour-là, du conseil d’administration de l’université PSL (Paris-Sciences-et-Lettres), un projet est voté à 19 voix contre trois : celui du large financement d’une nouvelle licence par BNP Paribas “avec pour ambition de former une nouvelle génération de décideurs aux enjeux de transition écologique, économique et sociale [avec] un cursus d’excellence fondé sur les 17 Objectifs de Développement Durable de l’ONU.”

Sans doutes BNP Parisbas manque-t-elle cruellement de nouveaux cadres capables ne seraient-ce que de lire le rapport du GIEC ou plus récemment celui d’Oxfam, pointant du doigt cette banque “à l’iniative de 30 % des soutiens accordés aux énergies fossiles, avec des financements supérieurs à l’en‐semble des financements renouvelables de toutes les autres banques françaises étudiées sur la période 2016-2017.” Mais au-delà de cette hypocrisie criante, qui ne trouve des raisons que dans une vulgaire campagne de greenwashing, dénoncée par des étudiants de l’ENS, ce projet marque aussi une nouvelle étape dans la structuration de ce rapport de dépendance des universités au monde de la finance.

Dans Le Monde, Camille Stromboni relève le franchissement d’un nouveau palier dans ce processus : “Si le mécénat est une pratique désormais courante dans le monde universitaire, l’investissement d’une entreprise en direction d’une licence classique apparaît relativement inédit. Plusieurs éléments ont fait craindre aux élus un empiétement sur les libertés académiques, telle la présence d’un « comité de pilotage », composée pour moitié de représentants de la banque, initialement prévu dans la convention. Ou encore une clause de « non-dénigrement » entre les deux parties.”

Cette intrusion sans fards d’une banque dans la gestion d’un établissement universitaire n’est que la pointe avancée d’une tendance de fond. Elle trouve ses racines dans l’appauvrissement progressif des moyens alloués à l’enseignement supérieur susceptible de garantir son indépendance. Mais entre 2008 et 2018, “le budget par étudiant a chuté de près de 10 % en France” rappelle Thomas Piketty. Dès lors, les universités sont plus que jamais exposées aux ambitions des grands groupes. Lesquels s’efforcent, à travers les nombreuses places qu’ils occupent déjà dans les conseils d’administration et, dorénavant, en versant dans le “mécénat”, d’indexer les savoirs, les formations proposés et la recherche à la bonne valorisation de leurs capitaux.

Toutefois ces offensives du privé ne se font pas sans provoquer quelques résistances, côté étudiants comme côté enseignants. Le conseil d’administration en question n’avait par exemple pu se tenir au sein de l’université et fut délocalisé au rectorat de Paris “à la suite d’une tentative de blocage d’étudiants, mobilisés sur cette question.” Aussi, parmi les profs, les mises en garde fusent, comme celle de Baptiste Cecconi, également élu Snesup-FSU à l’Observatoire de Paris : “On ne peut pas dire que nous serons indépendants alors que BNP Paribas peut, à tout moment, arrêter son mécénat, et signer ainsi l’arrêt de la formation puisqu’il n’y a aucun autre mécène”.


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