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« Pas de prison pour Gaëtan et tou-te-s les condamnés pour avoir manifesté »

Une vaste campagne pour réaffirmer notre droit à la révolte

Comité de rédaction Le 1er avril dernier, notre camarade Gaëtan a été condamné en appel à 6 mois de prison dont quatre avec sursis, soit deux fermes, et 1100 euros d’amende, pour avoir participé à une manifestation interdite par la préfecture, le 8 novembre 2014, contre les violences policières et en mémoire de Rémi Fraisse. Mais s’il a revendiqué cette participation au nom de ses convictions politiques, c’est aussi pour des « violences volontaires » et des « outrages » à agents, qui n’existent en revanche que sur le papier de la police et de la justice bourgeoises, qu’il a été condamné. Depuis ce jour, une campagne exemplaire de solidarité s’est lancée pour le soutenir, et à travers lui, non seulement tous les autres condamnés pour avoir manifesté, mais plus largement tous ceux qui sont victimes de la répression multiforme de l’Etat bourgeois. Télécharger l'article en PDF :

27 mai 2015

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Une campagne internationale, nationale et toulousaine pour la défense des droits démocratiques

Près de 10000 signatures pour la pétition de soutien signée sur internet et sur papier lancée début avril, une page Facebook remplie de messages et de photos de solidarité envoyées de France et de l’étranger, des motions de soutien d’organisations syndicales, politiques et associatives, des déclarations de députés d’extrême-gauche, le soutien de dizaines d’intellectuels, deux rassemblements unitaires, à Paris et Toulouse… autant de signes d’une campagne qui s’est progressivement amplifiée pour la défense d’un droit démocratique le plus élémentaire, celui de ne pas se résigner, de relever la tête et de descendre dans la rue pour manifester sa colère. La presse a rapidement relayé ce mouvement, au travers de multiples articles, dans l’Humanité, Bastamag, Reporterre, Les inrocks, ou encore Mediapart, jusqu’à une tribune publiée dans Libération le 17 avril signée par plusieurs dizaines d’intellectuels et personnalités dont Ken Loach, Jacques Rancière, Judith Butler, Slavoj Zizek et Frédéric Lordon, condamnant le fait que « Manifester, en France, c’est risquer de finir en prison ».

Par-delà le soutien de multiples personnalités politiques et syndicales françaises, mais aussi d’artistes comme Saïdou du groupe ZEP et Kash Leone, ancien ouvrier gréviste de PSA Aulnay, la compagnie Jolie Môme et la comédienne Audrey Vernon, le vaste succès de cette campagne ne peut se comprendre que par le rejet exprimé par des milliers de travailleurs et de jeunes contre la politique brutale d’un gouvernement qui cherche à masquer l’impopularité de ses réformes et avait eu beau jeu, dans les semaines suivant le 11 janvier, de se prétendre le héraut de la liberté d’expression et le défenseur de la démocratie.

Unis contre la répression, et pour un mouvement ouvrier qui relève la tête

Le vendredi 17 avril, deux premiers rassemblements de soutien se sont tenus en simultané à Paris et à Toulouse. À Paris, lors d’une conférence de presse « contre la répression et contre la criminalisation du mouvement social », Eric Coquerel secrétaire national du PG, et Olivier Besancenot pour le NPA, ont relayé l’appel lancé également par le NPA Jeunes, Alternative libertaire, les Jeunes écologistes, Alternative et autogestion, l’OCML-VP, Ensemble, Ensemble Jeunes, Solidaires EtudiantEs, Sud PTT et Solidaires. 200 personnes se sont ainsi mobilisées à Paris, place Saint-Michel, insistant sur le fait que Gaëtan est l’un parmi de nombreux cas de répression dont sont victimes les travailleurs et la jeunesse. Ainsi notre camarade Yann Le Merrer [voir ENCADRE 2], révoqué pour avoir défendu ses collègues et dénoncé les conditions de travail à La Poste.

Du côté toulousain, c’est aussi suite à une réunion unitaire associant FSU 31, Sud-Education 31, Unef, Solidaires étudiantEs, Copernic, NPA, Alternative libertaire, CNT, OCML-VP, Lutte ouvrière, CSR31, Attac, le Strass, le Collectif des précaires et le collectif féministe du Mirail, et finalement le PG, que 150 personnes se sont rassemblées place Jean-Jaurès pour un double rassemblement de soutien aux prisonniers palestiniens, à Gaëtan et aux camarades condamnés pour avoir manifesté. Quant à l’AG des étudiants et personnels du Mirail du 16 avril, qui avait réuni 170 personnes et relayé l’appel toulousain, elle a créé un Collectif contre la répression qui s’emploie depuis à élargir la campagne et notamment à construire des liens de solidarité entre tous les condamnés.

Plus largement, à l’image des points fixes lors des manifs du 9 avril et du 1er Mai, à Paris et Toulouse, c’est en liant défense des intérêts des travailleurs, des libertés syndicales et des droits démocratiques, qu’une telle campagne pourra servir d’appui plus large. Dans cet esprit, une première réunion unitaire accueillie par Sud PTT à Paris le 11 mai, a associé les cadres respectifs des campagnes de soutien à Yann et à Gaëtan, lors de laquelle fut notamment pointé le renforcement de la répression visant directement les résistances syndicales et politiques. L’objectif de transformer ce cadre en collectif durable, entre autres en lien avec l’Observatoire de la répression, va dans l’immédiat se concrétiser par de nouveaux points fixes aux prochaines échéances de rue, outre celles du 19 mai (grève de l’éducation nationale) et du 21 mai pour la santé (en défense de l’APHP), en mémoire de Clément Méric le 6 juin, contre la ferme géante des mille vaches le 17, et enfin lors de la Marche des Fiertés le 27 juin. Un tract unitaire, un débat à la fête de Lutte Ouvrière fin mai, et enfin la perspective en juillet d’un meeting concert contre la répression sont en marche.

Face à la répression, il est évident que la riposte ne peut pas se mener seul-e, isolé-e face aux tribunaux ou aux conseils de discipline. Tous ensemble, réaffirmons notre droit à manifester notre colère contre ce gouvernement et cet Etat, sa justice et sa police au service des patrons ! Plus largement, le grand mouvement de masse contre la criminalisation des luttes et la loi sur le renseignement, que ces démarches unitaires esquissent, pourrait permettre de répondre présents face à ces agressions en règle contre les travailleurs, les jeunes, militants ou non, et toutes celles et ceux qui vivent dans ces quartiers populaires fliqués depuis des décennies, et plus que jamais pour condamner l’impunité des policiers et gendarmes responsables de la mort de Malik, Rémi, Zyed et Bouna, Wissam et tou-te-s ceux qui sont morts victimes de cette répression !

Face à la répression qui sévit dans le monde entier, solidarité internationaliste !

Des centaines de messages de solidarité ont été adressés à Gaëtan par des salariés, jeunes, militants ou non, mais aussi des organisations politiques, des syndicats, de multiples pays, de la Palestine à la Russie en passant par l’Allemagne, l’Italie, l’Etat Espagnol mais aussi la Turquie, le Mexique, le Brésil, le Chili. D’Argentine ce sont plusieurs députés nationaux et provinciaux du FIT, mais aussi le Parlement provincial de Buenos Aires et la Législature de Mendoza eux-mêmes, qui ont adressé déclarations et motions de soutien à Gaëtan. D’Italie, Erri de Luca, écrivain de reconnaissance internationale, lui-même poursuivi en justice pour avoir soutenu le mouvement NO TAV contre la LGV Lyon-Turin, lui a apporté son soutien, rappelant combien « le droit de manifester n’est pas négociable ». Et surtout, de partout, de tous ces combattants du quotidien qui, de leur anonymat, témoignent de la même voix que la solidarité internationaliste de la classe mondiale des travailleurs est la seule réponse au système capitaliste qui, exploite, opprime et tue partout sur la planète.

Yann, Postier révoqué pour fait de grève. Du jamais vu depuis 1951

Pour avoir pris la parole dans les locaux de La Poste en 2014, dans les Hauts-de-Seine et s’être adressé à des non-grévistes, pour être allé voir ses collègues dans leurs bureaux « sans autorisation », notre camarade Yann a subi un véritable acharnement de la part de la direction de la Poste. C’est toute une équipe syndicale combative qui a fait face à sa révocation, et à une douzaine de procédures disciplinaires, à quatre licenciements prononcés et cassés par l’inspection du travail ou les prud’hommes.

En 2014, après 173 jours de grève sur cinq communes des Hauts de Seine (92), la victoire des salariés de la Poste contre la précarité, contre les réorganisations désastreuses, a laissé une porte ouverte à la résistance : une brèche insupportable pour les dirigeants du plus gros licencieur de France (100 000 postes depuis 2000). Depuis la démonstration de détermination et de courage des postiers du 92, de nombreuses luttes ont fleuri à La Poste dont celle, historique et exemplaire de Basse-Normandie qui a entraîné plus de mille travailleurs et travailleuses dans la grève dans une zone réputée peu combative. Leur lutte est d’autant plus un précédent qu’ils ont fait reculer la direction, dans la plupart des bureaux, sur l’arnaque de la pause méridienne.

Un rassemblement unitaire de 300 personnes s’est tenu le 5 mai à Paris en soutien à Yann, à l’initiative du syndicat SUD PTT 92, réunissant des délégations de nombreux syndicats SUD mais aussi CGT, du NPA, de Lutte Ouvrière et Ensemble (FdG). L’ensemble des organisations présentes étaient également appelées à s’organiser pour poursuivre et amplifier la campagne actuelle. Au-delà de la campagne pour la réintégration de Yann, c’est la solidarité entre syndicats à la base, dans les luttes, entre différents secteurs, qui est ressortie comme une nécessité face aux attaques du patronat du privé comme du public ainsi que du gouvernement et face au niveau incroyable d’acharnement répressif que celui-ci orchestre. Cette campagne contre la criminalisation du mouvement social s’est notamment traduite lors du rassemblement par des prises de parole soulignant les expériences des différents secteurs par rapport à la pression patronale et judiciaire, et par l’évocation du cas de Gaëtan, de même que lors des rassemblements à ce dernier, le cas de Yann est systématiquement évoqué dans le même esprit.
Comme le soulignait Olivier Besancenot (porte-parole du NPA) lors du rassemblement, à l’heure de la loi de renseignement qui promet des mesures policière extrêmes contre ceux qui inquiéteraient les « intérêts économiques de la France », c’est tout le mouvement social et ouvrier qui est ciblé. C’est uni et déterminé qu’il doit se lever massivement et montrer aux classes dominantes et au gouvernement qu’il ne se laissera pas faire.

L’Etat s’acharne sur le Comité invisible : Julien Coupat, Yildune Lévy et Gabrielle Hallez renvoyés en correctionnelle pour terrorisme

L’Etat policier a une mémoire et une vocation répressive bien plus profonde encore que celles des gouvernements qui se succèdent. Son acharnement sur ceux que le gouvernement Sarkozy et sa ministre Alliot-Marie stigmatisèrent en 2008, à grands renforts de médias et au prix d’un véritable fiasco politico-judiciaire, comme de dangereux membres d’une « cellule invisible » de la « mouvance anarcho-autonome » et de « l’ultra-gauche », le Comité invisible et en particulier Julien Coupat, qui a déjà subi à l’époque 6 mois de détention provisoire, se poursuit. Celui-ci ainsi que Yildune Lévy et Gabrielle Hallez sont aujourd’hui de nouveau dans la ligne de mire du parquet de Paris, qui vient de demander leur renvoi en correctionnelle pour « association de malfaiteurs en relation à une entreprise terroriste » (cinq autres militants libertaires étant également dans le collimateur pour des chefs d’inculpation moins graves), toujours accusés, malgré un dossier vide, d’avoir saboté des lignes SNCF en novembre 2008. Une fois de plus, le gouvernement PS démontre qu’il rivalise en tous points en matière répressive avec ses prédécesseurs UMP. Notre solidarité avec eux, contre l’Etat et sa justice, est totale.


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