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Liberté de la presse

Utilisation d’armes françaises au Yémen : 3 journalistes français auditionnés par la DGSI

Ce mardi 14 mai, trois journalistes ont été convoqués et entendus dans les locaux de la Sécurité Intérieure pour une enquête publiée le 15 avril dernier concernant l'utilisation d'armes françaises par l'armée saoudienne dans le conflit yéménite. Face à cette attaque contre la liberté de la presse, 17 ONG et 37 rédactions ont publiquement dénoncé les « menaces pesant sur la liberté de la presse ».

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Le 15 avril dernier le média Disclose publiait une enquête révélant l’utilisation massive d’armement français par l’Arabie Saoudite dans sa guerre atroce contre le Yémen. À partir d’une note à caractère « confidentiel défense » de la Direction du Renseignement Militaire (DRM), uniquement transmise aux plus hautes sphères de l’État, le média d’investigation révélait que les armes vendues par la France à l’Arabie Saoudite étaient directement utilisées dans le massacre de milliers de Yéménites. La note explique notamment que les diverses pièces d’artillerie usinées en France « appuient également les troupes loyalistes épaulées par les forces armées saoudiennes, dans leur progression en territoire yéménite » en plus d’être déployées de manière défensive à la frontière.

Ces révélations faites par Disclose ont tout de suite dénotées avec les déclarations des plus hauts représentants français, à commencer par Florence Parly, ministre des Armées qui déclarait le 30 octobre 2018 : « À ma connaissance, les armes qui ont été vendues récemment ne sont pas utilisées contre les populations civiles ». Ou avec encore la déclaration du 13 février 2019 de Jean-Yves Ledrian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, lorsqu’il affirmait devant l’Assemblée Nationale : « Nous ne fournissons rien à l’armée de l’air saoudienne. Il vaut mieux que les choses soient dites de manière définitive pour éviter qu’il y ait de la répétition sur le sujet. »

Des déclarations de ministres français qui vont totalement à l’encontre de la note du CRM dévoilée par Disclose, et qui leur a été transmise le 3 octobre 2018, donc bien avant qu’ils se prononcent sur le sujet.

Emmanuel Macron lui-même a cherché à couvrir les exactions commises contre les Yéménites avec le soutien direct de l’impérialisme français, en affirmant jeudi 9 mai dernier « assumer » ces ventes d’armes, car il aurait la « garantie  » qu’elles « n’étaient pas utilisées contre des civils ».

On voit clairement que l’État français, par la bouche de ses représentants, s’enfonce dans le mensonge et tente à tout prit de garder la face, dans le but de protéger les profits tirés des ventes d’armes, au prix de nombreuses vies yéménites.

Afin de se dédouaner des massacres perpétrés au Yémen et dans lesquels l’État français est directement impliqué, le secret défense est invoqué, en opposition à la liberté de la presse. Un secret défense qui apparaît bien utile lorsqu’il permet de laisser dans la confidentialité les pires crimes commis avec l’aval de l’impérialisme français, dans un contexte où Macron est particulièrement affaibli, à l’approche des Européennes.

Dans la droite lignée de l’escalade répressive menée par le gouvernement envers l’ensemble de celles et ceux qui portent une voix contestataire – grâce à un arsenal législatif renforcé par la loi anti-casseur ou encore la nouvelle loi contre les « Fake News » qui vise directement les médias – une enquête préliminaire a été ouverte le 13 décembre 2018 par le parquet de Paris. Elle charge la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure) d’investiguer contre les journalistes pour « compromission du secret de la défense nationale ». Les trois journalistes, Geoffrey Livosi et Mathias Destal de Disclose ainsi que Benoit Collombat de Radio France, encourent jusqu’à 5 ans de prison.

Mathias Destal déclarait notamment : « La seule raison de nous convoquer aujourd’hui, c’est celle de connaître les sources qui nous ont permis de publier cette première enquête de Disclose ». La protection des sources est en principe un droit inaliénable de la presse, que l’avocate de Disclose, Virginie Marquet, compte bien défendre : « Nous serons très fermes sur la protection des sources de nos journalistes ».

Cette enquête et la convocation des droits journalistes constituent donc directement une attaque contre la liberté de la presse. Face à la répression subie par les trois journalistes, 17 ONG et 37 rédactions officielles de médias français ont apporté leur soutien à Disclose et ont dénoncé le caractère liberticide de cette enquête. On retrouve parmi les signataires France2, l’Humanité, Médiapart ou encore BFMTV, qui indiquent dans un communiqué : « Nous exprimons notre pleine et entière solidarité avec nos confrères, qui n’ont fait que leur travail : porter à la connaissance des citoyens des informations d’intérêt public sur les conséquences des ventes d’armes françaises ».

En pleine période de campagne pour les élections européennes, où Macron voudrait jouer la carte des progressistes en rempart contre la réaction, cette affaire vient montrer que le gouvernement n’a jamais été le défenseur des droits démocratiques. Au contraire, il réaffirme son rôle dans la protection les intérêts des grands groupes, quitte à sacrifier la vie de milliers de personnes, dans ce qui s’avère être l’une des plus grandes catastrophes humanitaires à l’échelle internationale.


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