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La Izquierda Diario
28 de novembre de 2017 Twitter Faceboock

Un enjeu politique ?
Suppression de postes à France Télévisions. Envoyé spécial et Complément d’enquête dans le viseur
Maly Drazkami

Avec une baisse de budget pour France Télévisions de 50 millions d’euros, annoncée par le gouvernement fin septembre, la direction du groupe public songe sérieusement à sa restructuration. Différentes options sont discutées, dont certaines affectant sévèrement les émissions Envoyé Spécial et Complément d’Enquête, ce qui a fait réagir les journalistes. À l’heure des négociations, la tension monte.

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Baisse de budget chez France Télévisions : une crise à rebondissements

Face aux coupes budgétaires, la direction de France Télévisions avait annoncé la suppression de 66 équivalent temps pleins (ETP) sur un total de 1300 journalistes, chiffre revu à la baisse lundi soir : ce serait toutefois plus de trente postes supprimés d’ici septembre 2018. Après la réunion de lundi avec la direction, les journalistes ont annoncé que la piste envisagée affecterait directement les équipes d’Envoyé spécial, qui passerait de 14 à 4 reporters et celle de Complément d’enquête qui verrait ses effectifs réduits à 2 journalistes, au lieu de 12. La semaine dernière, une des options était la réduction du nombre de programmes, l’autre « solution » qui s’était dessinée lundi étant la réduction de la durée des deux émissions.

Le jeudi 23, le principe d’un vote d’une motion de défiance contre Delphine Ernotte avait été adopté à une très grande majorité lors d’une assemblée générale de la Société des Journalistes (SDJ ) regroupant entre 150 et 200 journalistes des magazines et JT du groupe, ce qui a permis de convoquer une réunion entre la présidente du groupe, alors réfractaire aux discussions, et dix membres de la SDJ de France 2. Les différents journalistes ont par ailleurs largement alerté sur le processus en cours à France Télévisions.

Jouant la carte de la contention, Yannick Letranchant, directeur exécutif en charge de l’information de France Télévisions avait déclaré dans le courant de la semaine dernière qu’aucune décision n’était prise. « On ne sabre pas les magazines, défendait-il. Ce n’est pas parce qu’il y a un petit peu moins, qu’il n’y a plus d’investigation. Cela ne se mesure pas au kilo mais à la qualité ».

S’il semble après la réunion d’aujourd’hui être acté que les deux émissions ne subiraient « qu’une » suppression de trois postes, ce ciblage de la direction sur les journalistes d’investigation interroge.

La disparition du journalisme d’investigation, un enjeu politique

Une lettre adressée à Delphine Ernotte avait déjà été envoyée mercredi 22, de la part des reporters de Complément d’Enquête et d’Envoyé spécial, alertés par le manque de moyens matériels qui découleraient de cette « restructuration », et rappelant l’intérêt de ce service public : « Une rédaction des magazines de service public, c’est la possibilité de pouvoir enquêter sur Bygmalion sans être censuré, c’est la possibilité d’envoyer une équipe en Erythrée sans être accusé de sous-traiter le risque, c’est la possibilité de dévoiler les dessous de la communication d’Emmanuel Macron sans payer les mécontentements du Château […], c’est la possibilité d’être la seule rédaction suffisamment indépendante pour pouvoir enquêter sur Vincent Bolloré et de remporter ainsi le prestigieux prix Albert Londres. »

Bien que ces deux émissions – Envoyé spécial et Complément d’enquête – ne soient pas indépendantes de l’idéologie dominante, elles sont néanmoins un outil pour révéler au grand jour des affaires de corruption, de société, etc. Bien que les sujets traités soient assez hétérogènes et ne revêtent pas tous la même qualité d’information, il est révélateur que ce soit ces deux émissions d’investigation – et particulièrement Envoyé spécial ayant sorti quelques grandes affaires, et revêtant un aspect subversif – que la coupe budgétaire touche le plus, proportionnellement aux autres services.

Ce que cette crise de France Télévisions a aussi mis en lumière, c’est le recours de plus en plus régulier à une externalisation des enquêtes, dû à un désengagement progressif de l’État dans ce service public. Moins d’investigation directement effectuée par des journalistes du service public qui ont une plus large (même si relative) liberté d’enquête ; plus de recours à la « sous-traitance » de l’information effectué par des entreprises cherchant avant-tout à faire du chiffre. Il s’agit donc de mettre en concurrence l’information.

Crédits photo : (JPDN / SIPA)

 
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