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La Izquierda Diario
11 de janvier de 2018 Twitter Faceboock

Les femmes bourgeoises sont-elles des femmes comme les autres ?
Une tribune de femmes bourgeoises en défense du « droit d’importuner »
Nima Santonja

Ce mardi 9 janvier 2019, une tribune a été publiée dans Le Monde « en défense du droit d’importuner et de la liberté sexuelle ». Portée par la figure de Catherine Deneuve, mais aussi signée par des personnalités telles que Catherine Millet ou la directrice de la rédaction de Causeur Elizabeth Levy, la tribune dénonce ce qu’elle appelle le féminisme de la « haine des hommes » et oppose ce « droit d’importuner » à une « vague purificatoire » du mouvement Metoo, qui serait une nouvelle forme de « puritanisme ».

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« Le viol est un crime. Mais… »

C’est donc à contre-courant que cette tribune paraît, en opposition à la vague de libération de la parole des femmes sur les violences de genre et au mouvement engagé autour du hashtag #Metoo et de l’affaire Weinstein. En effet, dès les premiers mots de la tribune, s’engage une remise en cause de ce mouvement de libération de la parole des femmes sur les violences de genre : « Le viol est un crime. Mais… »

Cette rhétorique, que le mouvement MeToo a tenté de combattre, est donc réhabilitée par cette tribune, soutenue par un curieux discours, qui trouble délibérément la frontière entre ce qui serait appelé de la « drague maladroite » et les violences de genre - frontière que les féministes, par excès de zèle, franchiraient désormais sans limite par la « délation », au risque d’instaurer un « climat de société totalitaire » (!).

Avec beaucoup d’emphase, donc, ces anti-féministes assumées vont jusqu’à comparer la demande de justice des milliers de femmes victimes de violences de genre à une forme de censure artistique ou à un régime totalitaire. Elles referment ainsi avec virulence la boîte de Pandore ouverte par le mouvement Metoo qui avait mis en évidence un fait auparavant tabou : la violence du patriarcat à échelle mondiale, dont toutes les femmes pouvaient se reconnaître victimes d’une manière ou d’une autre.

Les femmes bourgeoises contre le féminisme

Bien sûr, une telle tribune ne surprend pas tellement de la part d’une personnalité telle que Peggy Sastre qui a écrit un livre intitulé Le mythe de la domination masculine, ou encore celle de l’écrivaine Catherine Millet qui déclarait lors d’une interview regretter ne pas avoir été violée pour pouvoir démontrer « que du viol, on s’en sort ». On se rappelle bien sûr aussi la défense de Roman Polanski par Catherine Deneuve dans les médias alors qu’il était accusé par plusieurs femmes de viol.

Ce qui fait se rejoindre toutes ces femmes dans cette tribune, au fond, c’est globalement une appartenance à une même classe bourgeoise - supérieure, blanche et privilégiée. Rien d’étonnant donc dans l’incompréhension qui peut naître face à des femmes qui, pouvant échapper à certaines violences patriarcales de par leur statut social, décident de défendre leur vision fantasmée d’une sexualité soi-disant libérée, d’un imaginaire violent de la séduction, de ce que les féministes appellent plus généralement l’imaginaire de la culture du viol.

Si les femmes bourgeoises sont aussi victimes du patriarcat, cette tribune montre assez significativement que l’expérience qu’elles en font n’est clairement pas la même. Bien sûr, on peut distinguer plusieurs franges de cette bourgeoisie : l’une, d’apparence plus progressiste, à l’instar d’une stellaire Oprah Winfrey au discours encenseur du mouvement Metoo lors d’un grand rassemblement du gratin de Hollywood, les Golden Globes ; et l’autre, réactionnaire, à l’instar d’une Catherine Deneuve rassemblant autour d’elle le gratin français de l’élite intellectuelle et culturelle regrettant la disparition de certaines valeurs patriarcales archaïques… Mais ces deux pôles ne seraient-ils pas les deux faces d’une même pièce ? C’est-à-dire cette même catégorie de femmes qui tirent quotidiennement de leur métier, de leur célébrité et même de leurs discours lors d’un des plus grands shows d’Hollywood, des millions d’euros. Des femmes qui ont tout intérêt à ce que se maintienne ce système qui leur apporte célébrité et argent, à elles, à Hollywood, à l’élite de la sphère culturelle et artistique française, tandis que ce même système expose des millions d’autres femmes, soit la majorité, aux violences sexuelles dans la rue, au travail, au sein du foyer, aux violences économiques et impérialistes.

 
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