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La Izquierda Diario
22 de janvier de 2018 Twitter Faceboock

Halte à l’agression d’Erdogan !
La Turquie lance une offensive à Afrin. Washington face à ses contradictions
Lili B

Véritable tournant dans le conflit syrien, la Turquie a lancé ce samedi une offensive militaire au nord de la Syrie, à l’encontre de la population kurde. Cette attaque, qui a déjà engendré morts et blessés, est une riposte d’Erdogan suite à la décision récente de Washington de créer, en alliance avec les combattants kurdes, une « force de sécurité frontalière » pour lutter contre Daesh, à l’heure où les milices kurdes sont désignées comme « terroristes » par l’Etat turc du fait de leurs liens avec le PKK. Une opération qui sème le trouble au niveau des relations internationales et qui témoignent des faiblesses et contradictions de la stratégie américaine en Syrie.

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« Rameau d’olivier » est le nom donné à l’opération militaire lancée ce week-end par Ankara à l’encontre des kurdes de Syrie. Une offensive au sol de l’armée turque et des forces rebelles syriennes, accompagnée de raids aériens et de bombardements, qui ont déjà engendré des morts et des blessés. A ce jour, dix-huit personnes au moins, pour la plupart des civils, ont été tuées affirme l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

Cette opération criminelle est une riposte face au récent projet de Washington qui vise à créer une force de sécurité entre la frontière turque et syrienne. Une force de 30 000 hommes, visant à empêcher l’expansion de Daesh, dont la moitié sera à priori composée de milices kurdes (YPG : Unités de Protection du Peuple) qui évoluent dans les Forces Démocratiques Syriennes (FDS). Du fait de la présence de ces combattants kurdes, Erdogan avait promis de « tuer dans l’oeuf » cette force frontalière, accusant les Etats-Unis de « constituer une armée terroriste à notre frontière ». Encore une fois, la référence au terrorisme étant ici convoquée et instrumentalisée par Erdogan pour justifier ses politiques meurtrières ainsi que mieux réprimer.

Cette alliance avec les kurdes scellée par les Etats-Unis est pour Erdogan tout simplement « inacceptable » et contre les intérêts de la Turquie, qui redoute la formation d’une enclave kurde aux portes de ses frontières : « C’est un combat national. Et dans ce combat nous allons écraser tous ceux qui se lèveront contre nous. Nous allons en finir avec le PKK et ses alliés ».

Avant même la constitution de cette force de sécurité, Erdogan a dès lors anticipé et tenté de couper l’herbe sous le pied de Washington en lançant cette offensive militaire dans la région d’Afrin, territoire syrien contrôlé par les milices kurdes. Après celle d’août 2016, il s’agit de la deuxième offensive turque menée dans le nord de la Syrie dans le but de freiner l’expansion territoriale des milices kurdes.

Outre cet aspect, cette opération militaire est également un moyen permettant à la Turquie de démontrer sa puissance et de marquer un rapport de force et ce dix jours avant la prochaine réunion du Congrès du dialogue national Syrien, qui se tiendra le 30 janvier prochain, à Stotchi en Russie.

Bien évidemment, toute opposition et soutien au peuple kurde est aujourd’hui interdite et fortement réprimée en Turquie : ceux qui oseraient dénoncer l’énième politique meurtrière d’Erdogan à l’encontre du peuple kurde, « en paieraient le prix », avait-il prévu. Ce dernier a mis ses menaces à exécution : 12 personnes ayant manifesté pour la paix à Istanbul ont été arrêtées.

Une opération qui dévoile des contradictions sur le plan international, notamment sur la stratégie de Washington en Syrie

Cette opération met Washington dans une situation délicate, mettant à nu les contradictions de sa politique étrangère au Moyen Orient et les tensions émergentes entre les Etats-Unis et son historique allié turc.

La situation en Syrie a en effet pour conséquence de mettre en lumière ce que l’on commençait à voir ces derniers mois, à savoir la crise importante entre la Turquie et les Etats-Unis, dont l’une des causes est la politique de Washington en Syrie. En effet, après la victoire d’Assad et ses alliés (notamment, la Russie et l’Iran) dans la première phase de la guerre civile en Syrie, les Etats-Unis ont eu comme stratégie de créer des enclaves pro-américaines en Syrie pour limiter le recul et éventuellement avoir des positions pour une hypothétique contre-offensive.

La seule force sur laquelle les États-Unis peuvent compter sur le terrain de bataille sont les kurdes. Un allié de circonstance, utilisé pour protéger la frontière des menaces terroristes mais également comme appui afin de gagner davantage de terrain face au régime syrien, comme lors de la reprise de Raqqa. Cependant, cette politique d’alliance avec les kurdes entre en contradiction avec les intérêts de la Turquie, membre de l’OTAN et alliée historique des Etats-Unis.

Ainsi, cette attaque turque affaiblit la stratégie des Etats-Unis en Syrie. Face à cette situation, l’administration américaine a joué l’apaisement, tentant de calmer la colère d’Ankara, en usant notamment de langue de bois, avec une minimisation de ses précédentes déclarations à propos des forces de sécurités frontalières.

Cette situation crée également des contradictions et des tensions au sein du camp occidental de l’OTAN, qui ne veut surtout pas que la Turquie entre en conflit avec les Etats-Unis et d’autres impérialismes occidentaux. Les puissances européennes, et la France en première ligne, redoutent en effet qu’un tel conflit ait pour conséquence une rupture de l’accord entre la Turquie et l’Union Européenne en terme d’immigration, et une ouverture des frontières du côté turc, qui entrainerait de nouvelles « vagues » d’immigration. Ainsi, la France, via la ministre des armées, Florence Parly, et le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a appelé à un cessez-le-feu et à la tenue d’une réunion urgente du conseil de sécurité de l’ONU, qui a eu lieu ce lundi.

Côté russe, aucune condamnation claire, mais un langage subtil invitant « l’ensemble des forces antagonistes à la modération ». Un discours qui masque à peine l’alliance de la Russie à Erdogan. De plus, malgré les condamnations officielles tenues par le régime syrien, il est possible que cette agression turque puisse profiter à Bachar Al Assad, lui permettant de reprendre plus facilement le contrôle de Damas sur les zones reprises aux Kurdes.

Dans cette situation complexe, les suites sont troubles. Il n’est pas certain que le conseil de l’ONU vote un cessez-le-feu, ni même que, contrairement à ce qu’il peut penser, cette offensive militaire soit une opération victorieuse pour Erdogan. En effet il n’est pas impossible que les kurdes puissent une nouvelle fois bénéficier de soutiens de défenses populaires. De plus, l’expérience des combats contre l’Etat islamique n’a fait qu’accroître l’efficacité des milices kurdes.

Cette situation montre où les alliances avec les puissances impérialistes amènent. En effet, alors que les forces kurdes espèrent, sans trop d’illusions cependant, une aide de Washington, leurs prises de position témoignent du fait que ces derniers ne sont encore pas prêts à entrer en conflit avec leur allié turc. Leurs positions étant en effet très « molles ». Cela démontre que l’impérialisme, même comme alliés, reste le principal ennemi de l’auto détermination des peuples et amène à la trahison et à la défaite des populations. Il faut d’ailleurs rappeler que, même si les Etats-Unis scellent des alliances avec les combattants kurdes syriens, ils ont comme l’Union Européenne et la Turquie, i désigné le PKK, mouvement séparatiste kurde de Turquie, comme organisation terroriste. Une contradiction de plus dans leur politique étrangère...
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