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La Izquierda Diario
21 de mai de 2018 Twitter Faceboock

Corruption au Portugal
Jusqu’où vont s’arrêter les scandales du Sporting Club de Lisbonne ?
Nicolas Rossel

Depuis une semaine, les scandales du club omnisport le Sporting de Lisbonne n’en finissent pas de faire la Une des journaux portugais, révélant une fois de plus les véritables ressorts du système sportif brassant des millions d’euros, dans un pays où le SMIC atteint les timides 580 euros.

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Le scandale en 6 épisodes

Comme dans une série TV, à chaque jour son rebondissement. Tout commence mardi dernier, lorsque les joueurs de foot du Sporting, ainsi que son staff, se font violement agresser par des supporters, vraisemblablement des membres de la Juventude Leonina, l’un des plus important groupes de supporters du pays. Les images des agresseurs cagoulés, des joueurs blessés et des vestiaires saccagés ont fait le tour du monde. Mais pourquoi donc des supporters agresseraient les joueurs qu’ils soutiennent ?

En réalité il faut remonter au mois dernier pour comprendre cette histoire.

Épisode 1 : le 5 avril dernier l’équipe de foot du Sporting perd son match contre l’Atlético de Madrid (2-0), lors du quart de finale aller de la Ligue Europa. Furieux, son président connu pour ses excès de colère, Bruno de Carvalho, critique ses joueurs devant les médias.

Épisode 2 : dès le lendemain, le gardien Rui Patricio (champion d’Europe 2016) publie sur les réseaux sociaux une réponse collective de 19 joueurs à leur président (17 au final suite au désistement de deux joueurs), remettant en cause la déclaration de leur président et lui demandant de les soutenir plutôt que de les enfoncer. « Nous souhaitons faire part de notre mécontentement à travers ce texte après avoir eu vent des déclarations de notre président et qui a manqué de soutien dans ce moment difficile. » peut-on lire dans cette lettre, comme le rapporte Le Monde du 07/04/2018

La tension monte entre les joueurs et leur président.

Épisode 3 : quelques minutes plus tard, Carvalho réplique, « Je suis fatigué de ces gamins immatures qui ne respectent personne, comme par exemple les supporters », et annonce la suspension immédiate des signataires de cette lettre, avant de revenir sur cette décision 48h plus tard.

Épisode 4 : Un mois plus tard, la semaine dernière donc, le Sporting perd sa qualification pour la Ligue des champions. On imagine alors la colère de Carvalho. Fruit du hasard (?), ses joueurs se font agresser deux jours plus tard. Le Ministère Public prend aussitôt l’affaire en main et va jusqu’à mettre en avant le chef d’accusation d’acte terroriste.

Épisode 5  : Vendredi dernier, le journal Publico révèle que l’entraineur du Sporting, Jorge Jesus, détiendrait la preuve que Carvalho aurait commandité l’agression de ses propres joueurs en contactant des membres de la Juventude Leonina dans le but de leur donner une leçon, avant que Jesus démente ces propos quelques heures plus tard.

Épisode 6 : alors que cette histoire d’agression anime quotidiennement les débats TV, toujours ce même vendredi, la police judiciaire révèle l’opération Cashball, une enquête initialement tournée vers une affaire de corruption dans la section handball du Sporting, mais qui dévoile finalement également des corruptions de match de foot. Les bureaux du club sont perquisitionnés et quatre dirigeants du Sporting sont arrêtés et placés en garde à vue. On croirait revivre l’opération Lava Jato au Brésil mais à l’échelle du monde du sport au Portugal. Concernant le handball, la corruption consistait en des trucages de plusieurs matchs via le soudoiement d’arbitre durant la saison 2016/2017, alors que le club avait remporté le championnat national. Concernant le foot, il s’agit de soudoiements de gardiens et de défenseurs adverses, payés entre 3000 et 5000 euros afin de laisser passer quelques ballons.

Un système pourri généralisé

Pas sûr que le Sporting se relève de sitôt de ces scandales. On peut même s’attendre à une saison 2 avec de nouveaux rebondissements qui continuent d’entacher non seulement le Sporting mais aussi d’autres clubs, d’autres disciplines sportives, voire même qui révèlent l’implication de politiciens, comme c’était déjà le cas sous la dictature de Salazar entre 1939 et 1942 avec le scandale des qualifications du FC Porto. Alors que Carvalho accusait les autres clubs concurrents de corruption, c’est le sien qui est pris la main dans le sac. Pour autant, le FC Porto et le Benfica (l’autre club de Lisbonne) sont eux aussi loin d’échapper à la règle que semble être le trucage de matchs. En début d’année ils étaient eux aussi visés par des enquêtes judiciaires. Rappelons aussi l’affaire du « sifflet doré » qui avait valu au FC Porto l’exclusion de la Ligue des champions 2008/2009 suite à la corruption active de plusieurs arbitres soudoyés avec des femmes prostituées et du cash.

Dans le pays du soi-disant « miracle économique », ces scandales révèlent l’une des face sombre de l’économie portugaise et font tache. Pas étonnant que le président de la République lui-même, Marcelo Rebelo de Sousa, s’inquiète de l’image de son pays à la veille de la saison touristique et dans un contexte où le Portugal tente de redorer son image suite à la crise économique, au moment où il est en train d’attirer des capitaux étrangers avec son faible coût salarial et ses réformes du marché du travail effectuées par le précédent gouvernement austéritaire de droite mais que le gouvernement PS maintient. Le Président déclarait, suite à l’agression des joueurs : "Je me suis senti vexé par l’image projetée par le Portugal dans le Monde. Vexé car le Portugal est une puissance dans le football professionnel et vexé par la gravité de ce qui s’est passé."

 
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