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La Izquierda Diario
22 de mai de 2018 Twitter Faceboock

Avec des délégations de province
En Inter-gares, 350 cheminots discutent des perspectives de la grève
Arthur Nicola

Alors que le 22 ne devait pas être une journée de grève des cheminots, l’inter-gares de région parisienne en avait décidé autrement. À cette occasion, ils avaient aussi invité des cheminots de plusieurs villes de province pour discuter du conflit en cours. Une rencontre réussie, qui a débouché sur le vote d’un appel interpellant l’intersyndicale et qui décide de s’inscrire dans une nouvelle journée de grève hors-calendrier pour le 26 mai, jour de manifestation nationale à l’appel des organisations syndicales, associatives et politiques.

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Après les premières rencontres inter-gares qui s’étaient déroulés sur la Région Parisienne, ayant réuni jusqu’à 250 cheminots en grève, ces derniers avaient décidé d’élargir le cadre de leur réunion en invitant les cheminots de toute la France à monter à Paris pour discuter du mouvement en cours, des perspectives et des difficultés que chacun rencontre sur son chantier. Une rencontre réussie, qui a amené autour de 350 cheminots, venus des gares de région parisienne, habituellement présentes en inter-gares, ainsi que des cheminots venus de Toulouse, Metz/Nancy, Strasbourg/Mulhouse, Bordeaux, Nice/Cannes, Béziers, Chambéry, Limoges, Tergnier/Laon, Le Mans et Amiens. Partout, des équipes de grévistes motivés racontent comment ils construisent la mobilisation : les actions péage gratuit montrent un fort soutien de la part des usagers, tandis que les actions de convergence, notamment avec les étudiants ou encore avec d’autres secteurs en lutte sont organisées, comme à Bordeaux ou Nancy.

Rémi, militant à la CGT Saint Lazare, rappelle le cadre : « c’est une rencontre de tous les grévistes, quelles que soient les organisations syndicales », complété par Gauthier, militant FO à Paris Nord qui tient à rappeler que « chaque gréviste a sa voix pour décider où va la grève ». Car une des questions que se posent beaucoup de grévistes, c’est la question de la démocratie du mouvement et la façon dont est décidée la politique et les suites de la grève. Beaucoup de délégations de régions dénoncent le verrouillage de leurs assembles générales par les dirigeants syndicaux, qui pour certains ne soumettent même pas au vote la question de la reconductible.

Ici, beaucoup rejettent la politique de la grève perlée, qui semble insuffisante pour créer un rapport de force à même de faire tomber la réforme ferroviaire. « Ce n’est pas la grève perlée qui fait que les cheminots sont déterminés ; ils se battraient sur un autre calendrier ; ils se battent pour le retrait de la réforme. Une seule chose nous anime : c’est la gagne  » explique Anasse, délégué syndical Sud Rail au Bourget (Paris Nord). Car au cœur des discussions, le bilan contre la grève perlée est dur : malgré 20 journées de grève, le gouvernement n’a reculé sur aucun aspect de la réforme. D’où la nécessité pour les grévistes de bousculer le calendrier, et de passer à la vitesse supérieure. « La grève perlée, elle permet de durer, mais pas de gagner. Et on ne fait pas un mois de grève juste pour le plaisir de faire grève. S’il y a un message à faire passer, c’est de ne rien lâcher. Il existe une alternative à la grève perlée. » conclut un syndiqué Force Ouvrière.

Ainsi, la reconductible est pour beaucoup la solution pour gagner. Parmi les soutiens, il y a le même sentiment : « on doit dénoncer toutes les stratégies perdantes qui disent que la reconductible n’est pas possible. On a perdu en 2003, 2010, 2016, mais on a gagné en 1995, par la reconductible. La stratégie du 2/5 elle n’est pas gagnante.  » assène Gaël Quirante, syndicaliste de Sud PTT 92 licencié par la Poste et Pénicaud, en grève avec ses 150 collègues depuis le 26 mars. D’autres sont venus en soutien, notamment des étudiants, des grévistes de la RATP, des enseignants, ainsi que le réalisateur Yvan le Bolloch, qui tourne un film sur la grève.

Avancer vers la reconductible : voilà l’objectif de beaucoup de cheminots, dont certains sont en grève depuis le 3 avril. Certains chantiers, comme celui du Landy (technicentre du nord de Paris), ont déjà adopté un calendrier alternatif. « Avec le « Vot’action », on nous consulte pour savoir si on veut de cette réforme, alors que 90 % des cheminots ont déjà fait une journée de grève  » nous confie un cheminot.

Et la réalité est que dans de nombreux endroits, des grévistes commencent à se poser des question sur l’efficacité de la grève perlée, après une première étape où beaucoup se sont inscrits dans cette modalité. D’où l’idée d’aller interpeller l’inter-fédérale sur la stratégie de la grève, en proposant de durcir le ton et d’appeler à la grève le 26 mai. Qui d’autre que les grévistes pour interpeller leurs directions ? Il ne s’agit évidemment pas pour les grévistes de laisser dans les mains de l’inter-fédérale l’organisation et la réussite de la grève.

Tous les cheminots présents étaient d’accord pour dire qu’il faut construire des initiatives, locales, au niveau régional et aussi national, et proposer une alternative face à la politique actuelle de l’inter-fédérale. C’est à cette tâche qu’ils s’attellent quotidiennement. Par ailleurs, pour la majorité de cheminots présents à l’Inter-gares ce 22 mai, il est nécessaire également de s’adresser à l’ensemble des collègues qui aujourd’hui regardent les propositions des organisations syndicales, pour leur montrer qu’un certain nombre de cheminots commencent à exprimer une alternative. Une motion a donc été adoptée en ce sens, de la part des grévistes de l’inter-gares pour interpeller l’inter-fédérale :

Notre avenir est en jeu !

Motion adoptée par la Rencontre Intergares Paris-Province à l’adresse de l’Interfédérale cheminote

(La Rencontre Intergares de ce 22 mai a réuni environ 350 cheminots et a accueilli des délégations venant de Amiens, Béziers, Bordeaux, Chambéry, Limoges, Metz-Nancy, Nice-Cannes, Strasbourg-Mulhouse et Tergnier-Laon, en plus des cheminots de Gare d’Austerlitz, du Bourget, des technicentres de Chatillon et du Landy, Juvisy, Mantes-la-Jolie, Paris Est, Paris Nord, Paris Saint-Lazare et Vaires )

Depuis le 22 Mars les cheminots par milliers sont engagés dans cette bataille du rail contre la réforme et le pacte ferroviaires proposés par le gouvernement. Depuis 2 mois maintenant les cheminots suivent à la très grande majorité le calendrier proposé par l’Interfédérale comme moyen de faire reculer le gouvernement.

Force est de constater que cette stratégie qui cumule 20 jours de grève n’a rien permis pour l’heure d’obtenir. Le chemin semble encore long et semé d’embûches notamment avec les attaques répétées de la direction pour pénaliser durement les cheminots et le futur vote au Sénat que le gouvernement utilisera pour sceller un peu plus la contestation cheminote.

Nous jouons notre avenir, celui de nos familles et celui du service public. Nous ne pouvons continuer le combat avec un plan et une grève passive auxquels l’entreprise et les usagers se sont habitués. Nous tirons donc le signal d’alarme et appelons l’Interfédérale à réagir d’urgence et à bouger le calendrier, pour rendre coup pour coup au gouvernement Macron.

Si les 20 jours de grève perlée à des taux historiques n’ont pas fait bouger d’une virgule la réforme du gouvernement, ce n’est pas en ajoutant 12 jours supplémentaires en juin avec des taux plus faibles que nous allons faire reculer le gouvernement.

Car il s’agit bien de cela, de faire reculer le gouvernement définitivement et non pas de négocier ou d’amender le pacte ferroviaire. Les cheminots l’ont encore montré à travers le Vot’action et la journée sans cheminot du 14 mai, ils sont déterminés à faire retirer la réforme.Il nous faut donc un nouveau plan de bataille pour donner un second souffle à notre mouvement !

Les cheminots réclament également de la part de l’Interfédérale un appel ferme à la grève le 26 mai prochain pour la manifestation « marée populaire ».

Au-delà de la question de la stratégie de la grève, c’est aussi le suicide de l’un de leurs collègues, hier matin, qu’ont dénoncé les grévistes : « le suicide qui a eu lieu hier matin : on pourrait dire que c’est presque un assassinat. Plus de 50 cheminots se sont suicidés depuis un an. Si la réforme ferroviaire passe, et la privatisation passe, il y en aura d’autres malheureusement. Il faut se battre pour Julien et tout ceux qui sont morts avant lui  » continue Anasse, rappelant les exemples de France Télécom et de la Poste. Face à ce suicide, beaucoup réagissent et font part de leur émotion. L’inter-gares a d’ailleurs commencé avec une "minute de bruit" en hommage au collègue, et avec l’invitation des cheminots de Paris Est à venir à un rassemblement devant le Technicentre de l’Ourcq, lieu où Julien s’est donné la mort. Le rassemblement aura lieu ce jeudi 24 à 10h, RER E, station Pantin. Une caisse de soutien à la famille a également été proposée par un gréviste de Saint Lazare.

 
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