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La Izquierda Diario
9 de juillet de 2018 Twitter Faceboock

Malbouffe et mal-être
L’amour de ma vie vaut-il un bon hamburger ? Sur une publicité du Burger King
Max Demian

Il y a, dans la vie, des moments particulièrement importants, qui nous émeuvent et nous marquent durablement, des premières fois qui ne reviendront jamais. Parmi eux, les premiers pas d’un enfant, ou encore notre premier amour. Mais Burger King en a découvert un autre : votre premier Burger King.
Ou comment le (premier) amour de ma vie a été comparé à un steak entre deux tranches de pain de mie.

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Hier, j’ai en effet appris que loin de se réduire aux premiers pas ou au premier amour, il existait une autre expérience susceptible de rejoindre le panthéon des « premières fois ».
Cette nouvelle étape fondamentale de notre vie, c’est Burger King qui l’a découverte. Et elle consiste, bien entendu, à se rendre au Burger King pour y bouffer leur bouffe de merde.

Sur une encarte publicitaire de l’enseigne Burger King, on aperçoit une jeune fille d’une dizaine d’années, son regard froid et retouchée au logiciel informatique ressemble vaguement à un bonheur enfantin, comme leur burger de merde ressemble vaguement à de la nourriture ; à la droite de cette jeune fille, une échelle graduée. On peut y lire, de bas en haut, par ordre d’importance, ou chronologique, mais peu importe, puisque dans tous les cas le "burger king" est au sommet, on peut y lire, sur cette échelle graduée, annotée d’une fine écriture manuscrite au feutre noire, d’une écriture qui rappelle celle de nos parents sur les murs de nos salons pour prendre notre mesure,on peut y lire les jalons déterminants qui marquent la vie de cette jeune fille : « premiers pas », « premier amour », « premier burger king. »

Et alors, la chose qui m’était le plus chère, que je chérissais tant, cette fille que j’ai aimée en cours de classe préparatoire, qui s’appelait Valentine, et qui m’a laissé tomber pour un autre garçon (ça ne s’invente pas) qui s’appelle Valentin, cette fille-là qui m’a rendue si triste pour la première fois, voilà qu’elle est comparée, avec la même abomination qui transforme les animaux vivants en junk-food, voilà que cette fille et son précieux souvenir est broyé, passé à la sulfateuse de la culture de masse, et mis à égalité avec… un hamburger.

J’ai vaguement la nausée en regardant cette publicité.

Dans le capitalisme, il est un principe universel qui touches toutes les classes, qui traverse de façon transversale les rapports sociaux et définit durablement les relations sociales : c’est le principe de réification ; le fait que, sous le capitalisme, toutes les relations sociales, et les êtres humains eux-mêmes, et donc tout ce qu’ils vivent, ressentent, éprouvent et désirent, tout ce qui fait notre humanité est transformée en choses, en marchandises, et ici, dans notre exemple, en objets de publicité : nos corps (et surtout celui des femmes, et ici d’une toute jeune fille), nos émotions, notre intimité, tout cela est aspiré, noyé puis nivelé dans la vaste entreprise de réduction marchande du capitalisme qui transforme tout ce qu’il touche en marchandises, en merde susceptible d’être vendue. Et tous nos désirs les plus profonds sont enrégimentés au service du capital, et manipulés pour faire de nous des êtres dociles, tout est jeté à l’encan, mis au service du profit, dégradé universellement et intégré comme s’il s’agissait d’une forme de "normalité".

Tout ce que le capitalisme touche, de près ou de loin, se transforme irrémédiablement en merde.
Même le sourire d’une enfant.
Et cette raison devrait suffire en soi à justifier le désir irrépressible de transformer radicalement et totalement la société.

Nos émotions ne valent pas mieux qu’un hamburger.
Notre amour est mis à égalité avec une tranche de jambon (un animal mort, soit dit en passant).

Société de merde. Bouffe de merde. Vie de merde.
Aujourd’hui, cette simple publicité devrait suffire à justifier à elle seule le communisme, c’est-à-dire, ainsi que le définissent Marx et Engels dans l’idéologie allemande, "le mouvement réel qui abolit l’ordre établi."

Et je me demande sérieusement ce que cela dit du capitalisme qu’un amour d’enfance soit ainsi mis sur le même plan qu’un hamburger, de ce que cela dit sur la possibilité, ou plutôt impossibilité, dans cette société de merde qui n’hésite à pas à cyniquement dégrader ce que nous avons de plus cher, l’impossibilité, donc, de vivre une vie digne, une vie humaine.
Car même une publicité aussi « anodine » recèle en soi toute l’aliénation que subissent les êtres humains dans le capitalisme - la partie contient le tout, c’est une des lois de la dialectique. Alors, évidemment, refuser cette publicité, refuser la marchandisation des humains et de leurs émotions, refuser que le sourire et le bonheur d’une enfant soit dégradée pour en faire une publicité, refuser toute cette merde, c’est refuser intégralement et radicalement la société qui l’a rendue possible.

 
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