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20 de juillet de 2018 Twitter Faceboock

Couac chez le géant de la logistique
Madrid. Trois jours de grève chez Amazon face au capitaliste le plus riche de l’histoire
Arthur Nicola
La Izquierda Diario.es

Entre lundi et mercredi, une grève de 72h a paralysé le centre Amazon de San Fernando, à 20km de Madrid. Une grève exemplaire dans une des entreprises les plus répressives qui montre un renouveau des luttes ouvrières dans les secteurs les plus précaires, notamment en Espagne. Avec notre journal partenaire IzquierdaDiaro.es.

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Depuis plusieurs mois, les salariés d’Amazon du centre MAD4 de San Fernando, à 20km de Madrid, sont dans un combat historique face à l’entreprise transnationale, pour défendre leurs conditions de travail et leurs salaires. Un combat qui a trouvé son apogée en début de semaine avec une grève de trois jours consécutifs, réprimés par l’entreprise et la police, durant laquelle près de 90 % des travailleurs ont arrêté le travail en plein « Prime Day », c’est à dire une des journées lors de laquelle Amazon fait le plus de vente. Retour sur trois jours de grève qui changent la donne face au « pire employeur du monde ».

Face aux attaques d’Amazon, un conflit de longue durée

Le combat des salariés de San Fernando n’est pas nouveau : depuis la mi-mars, les débrayages et les grèves se multiplient, face aux annonces de la direction. En effet, celle-ci a annoncé au début du printemps sa volonté de changer son accord d’entreprise et de le remplacer par l’accord de branche de la communauté de Madrid, ce qui entrainerait la perte de nombreux acquis pour les salariés. En plus de supprimer certaines qualifications, et avec elles la possibilité de promotion professionnelle en interne pour les salariés, le nouvel accord voulait geler les salaires et compliquer les démarches liées aux congés maladies. Cette dernière clause fait partie de celles les plus largement rejetées par les salariés. En effet, le mode d’exploitation d’Amazon entraine de très nombreuses blessures et accidents du travail, et les troubles musculosquelettiques sont omniprésents chez les salariés.

Dès le 21 et le 22 mars, les syndicats de l’entrepôt, et notamment la CGT, le syndicat majoritaire aux côtés de la CCOO et de l’UGT CSIT, ont appelé à des grèves particulièrement suivies chez les salariés dans ce centre où travaillent 2000 salariés, dont 900 intérimaires. Le 1er mars, 75 % des salariés avaient voté en faveur de la grève, d’où des journées très suivies par les salariés. C’est ainsi que ce combat historique a été initié par 98 % du personnel, particulièrement réprimé par l’entreprise, qui a par la suite licencié une centaine d’intérimaire liés de près ou de loin au mouvement de grève.

Si l’accord de branche a finalement été imposé le 1er avril par Amazon, cela n’a été en rien la fin du combat, les débrayages se poursuivant en mai et juin : le 18 mai, 600 travailleurs ont décidé de faire une journée de grève, suivi d’une seconde journée le 1er juin, durant laquelle la participation à la grève est passée de 60 % à 65 %. Dans leurs manifestations, les grévistes avaient alors prévenu : « sans accord, pas de Prime Day ! ».

Trois jours de grève cruciaux pour l’avenir des salariés madrilènes

Face au refus d’Amazon de retirer le nouvel accord, la menace des grévistes a été mis à l’exécution, avec la préparation d’une grève de 72h en début de semaine, lors du « Prime Day », c’est-à-dire une des journées de l’année où l’entreprise réalise ses plus gros chiffres. Suivie par 80 % du personnel permanent, elle s’est étendue sur trois jours avec instauration de piquets de grève. Une grève réussie : pratiquement aucun camion n’a pu sortir de l’entrepôt, et l’entreprise a dû faire face à des clients mécontents du retard de leurs colis.

Face à eux, les salariés grévistes ont trouvé la police nationale, qui a durement réprimé en frappant les grévistes. Un d’entre eux a même été envoyé par l’hôpital : « il a été jeté par terre par quatre policiers et lorsque nous sommes allés leur parler, ils ont commencé à porter des accusations fallacieuses. Ils nous ont matraqué, et ont blessés des camarades, alors que cette grève est pacifique » a expliqué un gréviste à Diego Lotito, correspondant madrilène pour le réseau international LaIzquierdaDiaro, auquel appartient Révolution Permanente.

Une répression dénoncée par les syndicats, pour lesquels la police n’a été rien d’autre que les chiens de garde de l’entreprise : « quand le changement d’équipe s’est approché, la police s’est opposée au piquet d’information et a arrêté trois personnes. C’est un véritable abus d’autorité », dénonce Marc Blanes, délégué de la CGT au comité d’entreprise. Une répression organisée par le gouvernement de la communauté madrilène, et notamment le « socialiste » du PSOE (socialiste) José Manuel Rodríguez Uribes.

Solidarité et internationalisme, deux clés du succès de la grève

Ce qui frappe dans cette grève exemplaire, c’est le formidable soutien apporté par de nombreux syndicalistes ainsi que de groupes étudiants de l’État espagnol, symptôme de l’espoir créé par cette lutte qui renoue avec les traditions de la grève et des piquets, à contre-courant dans la situation espagnole, marquée par un fort recul de la combativité ouvrière. Ainsi, des délégations des groupes Coca-Cola et Telepizza ou encore des étudiants du groupe ContraCorriente et Pan y Rosas.

Une autre composante importante de cette grève, c’est la solidarité internationale qui a entouré les grévistes, notamment via des délégations venues d’Allemagne et de Pologne, qui ont suivi le mouvement à l’international depuis le début. En Allemagne, où 25 000 travailleurs sont employés par Amazon, des grèves ont touché sept centres logistiques : les deux de Bad Hersfeld, Graben, Leipzig, Rheinberg, Werne et Coblence. Par ailleurs, la mobilisation a été aussi suivie avec attention par les travailleurs polonais.

Pour l’instant, la direction du centre refuse encore et toujours de retirer son accord scélérat. Mais la remontée des luttes, et surtout la confiance en leurs propres forces créée par ces trois jours de grève, peut permettre aux salariés d’Amazon d’arracher ce qui serait une victoire historique pour la classe ouvrière madrilène.

 
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