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La Izquierda Diario
25 de septembre de 2018 Twitter Faceboock

Face à la crise, réveil ouvrier et populaire ?
Argentine. Journée de grève générale contre les plans d’austérité de Macri et du FMI
Iris Serant

Lundi déjà avaient lieu de nombreuses mobilisations contre les plans d’ajustement prévus par Macri et le FMI. Ce mardi, c’est une journée de grève générale qui a été convoquée par les principales organisations syndicales et politiques d’un mouvement ouvrier qui pourrait commencer à faire son entrée en scène.

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Depuis plusieurs mois, une crise économique sans précédent depuis plus d’une décennie touche de plein fouet l’Argentine. Affecté directement par la baisse des taux d’intérêts de la FED, la banque centrale américaine, le peso argentin s’est effondré, entraînant une fuite énorme de capitaux qui a précipité une crise financière.

Aujourd’hui l’inflation a déjà dépassé les 25 % et pourrait atteindre les 40 % à la fin de l’année. L’État argentin, avec Mauricio Macri à sa tête, a répondu à la crise en appliquant des plans d’ajustement dictés par le FMI. En échange d’un prêt exceptionnel du FMI pour faire face à ses dettes, l’état argentin devra mener des réformes anti-populaires et faire payer la crise des capitalistes aux travailleurs et aux classes populaires, faisant craindre à la population des épisodes de famine, comme c’était déjà le cas en 2001.

Alors que lundi et mardi, des milliers de travailleurs, de jeunes et de retraités se mettaient en grève et descendaient dans les rues contre Macri, celui-ci était aux États-Unis… pour rassurer les investisseurs et discuter avec Christine Lagarde. Cette réunion avait pour but d’augmenter les « aides » du FMI à l’Argentine, qui atteignent déjà le montant record de 50 milliards d’euros. Des aides particulièrement coûteuses puisque c’est contre tous les acquis de la classe ouvrière argentine qu’elles sont négociées.

C’est notamment du côté des universités que les plans d’austérité se sont fait ressentir et ont attisé la colère des étudiants et des professeurs qui ont commencé à manifester avec des slogans tels que « éducation : oui. FMI : non ».

A cela s’est ajoutée la victoire historique des travailleurs du chantier naval de Rio Santiago contre sa privatisation. Mais sans appel des directions syndicales depuis le 25 juin, qui n’était qu’une journée de mobilisation nationale, cette victoire est restée isolée et peinait à mobiliser les autres secteurs de la classe ouvrière.

Des mobilisations lundi et mardi…

Lundi, différentes mobilisations, sans appel à la grève ont été organisées dans tout le pays. La ville de Cordoba notamment a été bloquée toute la journée. Mardi, c’est à une grève générale que les organisations syndicales (CGT, CTA-A et CTA-T ) et politiques ont appelé.

Il s’agissait d’une journée de grève placée sous le signe de la répression. La ministre de la Sécurité Intérieure, Patricia Bullrich avait menacé, la veille, de réprimer toutes les mobilisations qui auraient lieu, prévoyant pour se faire de très importants effectifs policiers. Mais c’est aussi des menaces de mort contre les députés d’extrême-gauche Nicolas Del Cano et Myriam Bergman qui ont été envoyées par centaines sur leur téléphone personnel provenant de différents groupes d’extrême-droite ou pro-Macri, la vieille de cette grève nationale ; tandis que la semaine dernière, une enseignante a été torturée par des groupes fascisants pour s’être mobilisée contre la coupe des budgets visant l’éducation.

C’est dans ce contexte très tendu, et malgré des menaces de répression, que de nombreuses villes ont été bloquées. Tous les vols ont été annulés, aucun transport n’a circulé, les stations services, les commerces et les administrations sont restés fermés dans les principales villes du pays. Le rassemblement, appelé par les syndicats les plus combatifs et les organisations d’extrême-gauche, qui a eu lieu à Buenos Aires a permis de bloquer le pont Pueyrredón, un axe central de la ville. Des manifestations et des piquets de grève ont aussi été organisés à Rosario, Neuquen, et dans d’autres villes du pays, par ces organisations. Les directions syndicales classiques, elles, sont restées en retrait et n’ont pas appelé à continuer la grève.

La nécessité de construire une grève active et auto-organisée

Si cette journée a été la démonstration de la force du mouvement ouvrier lorsqu’il se met en branle, c’est la question d’une grève active, auto-organisée qui doit se poser maintenant pour vaincre face aux politiques de Macri. Ces journées de mobilisation ont été appelées à demi-mots par les directions syndicales, sans faire en sorte qu’il s’agisse de journées de grève active pouvant mener à des démonstrations de force dans les rues. Cela empêche de fait que les grévistes ne s’emparent de leur lutte dans des cadres d’auto-organisation. La colère monte chez les travailleurs et les milieux les plus précaires, et le gouvernement Macri connait une crise d’une ampleur inédite, mais les directions syndicales ne proposent que des journées isolées, des « grèves du dimanche » qui ne servent qu’à canaliser le mouvement ouvrier et le démoraliser, sans plan de bataille à la hauteur de la crise monumentale qui frappe les classes populaires.

L’entrée en scène d’un mouvement ouvrier organisé à la base et combatif en Argentine est d’autant plus central au vu de l’ampleur des attaques, et compte tenu du contexte général en Amérique latine. La crise économique profonde que traverse la région entraîne une très forte polarisation sociale. A droite on assiste à des phénomènes aussi morbides que Bolsonaro, le candidat d’extrême-droite au Brésil qui grimpe dans les sondages, ou la montée de la répression étatique et para-étatique dans des pays comme le Nicaragua. Mais c’est aussi vers la gauche que cette polarisation s’exprime avec la montée du mouvement des femmes au Chili ou en Argentine, un réveil du mouvement étudiant, et l’entrée en scène du mouvement ouvrier comme c’est le cas aujourd’hui en Argentine. Cette situation implique d’autant plus de responsabilités du côté du mouvement ouvrier pour que la crise soit payée par les capitalistes et non par les travailleurs.

La responsabilité des dirigeants du mouvement ouvrier devient de fait décisive dans la suite des événements. Si la crise peut pencher à droite, ou mener à une reprise en main par les capitalistes au pouvoir, la situation peut aussi basculer à gauche si la classe ouvrière se dote d’un plan de bataille à la hauteur.

Laura Vilches, militante et députée pour le PTS (Partido de los trabajadores socialistas) dans le Frente de Izquierda déclarait ainsi que « la seule manière de mettre un frein aux attaques contre le peuple travailleur, contre les femmes et la jeunesse, ce sont des moyens à la hauteur de cette tâche. Il faut coordonner les luttes qui sont en cours, mais nous devons aussi discuter de comment organiser tout le pays en fonction des besoins ouvriers et populaires pour que ce ne soit plus à nous de payer leur crise. Depuis le PTS, nous revendiquons le non-paiement de la dette extérieure, et le fait de créer une banque nationale unique pour éviter la fuite de capitaux, entre autres. Ces débats doivent se dérouler dans le cadre le plus démocratique que ce système permet, une Assemblée Constituante où le peuple travailleur pourrait décider de son avenir. ».

 
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