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La Izquierda Diario
28 de septembre de 2018 Twitter Faceboock

Après la CFDT
Négociations sur l’assurance chômage : Force Ouvrière jouera le jeu de la régression sociale
Arthur Fontane

Sans grandes surprises, le Comité Confédéral National (CCN) de Force Ouvrière a donné un mandat à son secrétaire confédéral pour aller aux négociations sur l’assurance chômage qui s’annonce être un énième recul pour le droit des chômeurs.

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Laurent Berger avait ouvert le bal en annonçant le premier que la CFDT ferait partie de la négociation sur l’assurance chômage que le gouvernement a lancé en envoyant il y a quelques jours sa lettre de cadrage aux organisations syndicales et patronales. Il est maintenant suivi par son homologue de Force Ouvrière, Pascal Pavageau, qui a réussi à convaincre la direction de son syndicat d’aller négocier, malgré quelques oppositions internes qui rappellent l’ambiance houleuse qui avait caractérisé le Congrès de la Confédération en avril dernier. Malgré la faiblesse du gouvernement, qui manque de plus en plus de ressources pour faire avancer ses plans, la troisième centrale syndicale du pays a choisi, plutôt que de profiter des faiblesses de Macron pour s’engouffrer dans ces brèches, de les colmater en jouant au bon « partenaire social ».

L’enjeu est pourtant de taille quand on regarde de plus près le contenu de la lettre de cadrage signée par Edouard Philippe, qui doit servir de base à la négociation entre le patronat et les syndicats. Pour l’instant, la CFDT, la CFE-CGC, la CTFC et FO d’un côté et la CGPME et l’U2P (artisans) se sont dit favorables à la négociation, le Medef et la CGT n’ayant pas encore pris de décision, alors que la les négociations devraient courir jusqu’à fin janvier.

Dans sa lettre de cadrage, le gouvernement a d’ores et déjà fixé, pour quiconque pensait que les « partenaires sociaux » étaient au centre de la discussion, les contenus des négociations, et notamment le fait que l’Unédic, l’organisme public en charge de l’assurance chômage, allait devoir économiser entre 3 et 4 milliards d’euros sur trois ans pour « désengorger » la dette de l’organisme. Soit une réduction de près de 3,2 % du budget de l’organisme, qui devra alors couper ou bien dans les allocations chômages, qui représentent 85 % de son budget, ou bien sur les autres droits qu’il finance (aides favorisant le retour à l’emploi notamment) ainsi que sur Pôle Emploi, que l’Unédic finance à 64 %. Ces mesures de découpes dans le budget de l’Unédic viennent s’ajouter aux précédentes réformes qui ont déjà restreint son budget, qui avait notamment été grévé de 800 millions suite aux négociations de 2016.

Mais comment faire ? Si, dans sa lettre de cadrage, le gouvernement semble pointer de nombreux faits incontestables, comme le fait que l’augmentation des activités précaires, des CDD et des périodes d’intérim favorisent le chômage, ses conclusions n’ont qu’une seule logique : faire porter la responsabilité du chômage sur les employés en faisant croire qu’ils choisiraient leurs conditions de travail.
Par exemple, la lettre de cadrage demande aux partenaires sociaux de revoir le calcul du salaire journalier de référence, qui est selon elle source d’inégalités, car un salarié avec plusieurs contrats courts plutôt qu’un seul long pouvait toucher, pour le même salaire et le même temps de travail, une indemnisation plus importante. Pour faire des économies, le gouvernement veut que les salariés qui sont dans des contrats courts touchent moins, supposant que cela va changer l’attitude des employeurs… En somme, le gouvernement rend responsable les travailleurs précaires, qui sont loin de choisir des situations professionnelles précaires où chaque semaine, le renouvellement de leur CDD est une incertitude.

De la même manière, le gouvernement souhaite aussi attaquer les plus précaires en imposant un changement de la règle dite de « l’activité conservée ». Dans certaines branches, comme les pigistes ou les assistantes maternelles, certains salariés ont plusieurs employeurs, et, s’ils en perdent un, ils peuvent avoir droit à une allocation leur permettant de conserver une partie de leurs revenus. Le gouvernement sous-entend, dans son habituel discours sur « l’assistanat », que de nombreux salariés profiteraient de cette mesure pour éviter de retrouver une autre activité salariée. Une autre manière de faire des économies sur les plus précaires en somme.


Finalement, le gouvernement tente d’imposer une mesure qui pour l’instant n’a réussi à passer : la dégressivité des allocations chômage. Prétextant les inégalités face au retour à l’emploi entre les moins diplômés et les plus diplômés, s’insinue dans la lettre de cadrage des formulations qui proposent de prendre en compte le contexte économique et les diplômes de l’ayant droit pour calculer ses allocations. S’il se limite pour l’instant à dire que cela ne concernerait que les cadres, il faut cependant voir qu’un changement sur ce plan, même minime, ouvrirait une boîte de Pandore, permettant de mettre en place une logique selon laquelle un salarié travaillant dans un secteur très dynamique de l’économie n’aurait que très peu de droits au chômage sous prétexte que certaines entreprises embauchent (même si ces dernières le refuse). Ceci pourrait ainsi affecter de nombreux secteurs et réduire considérablement les droits de millions de salariés, sous prétexte de plus de flexibilité et de lutte contre le chômage.

Une logique prime donc pour Macron : celle de l’économie à tout prix, et pour ce faire, insinuer, systématiquement et à large échelle que les chômeurs sont responsables de leur chômage. Ou bien parce qu’ils ne seraient pas incités suffisamment à retrouver du travail, ou bien parce qu’ils préféreraient vivre aux crochets de l’assurance chômage. Cette logique politique, celle de l’assistanat, n’est qu’un verbiage de droite qui incarne la vraie volonté du gouvernement, qui est tout simplement de détruire un peu plus les droits des salariés. Après la loi travail XXL et la réforme de l’apprentissage, cette réforme est censée être la troisième grande réforme du monde du travail lancée par Emmanuel Macron. Une chose a cependant changé dans la situation politique : Jupiter est descendu de l’Olympe, et pendant ce temps, le mouvement ouvrier reste l’arme au pied.

Crédits Photo : Pierre DESTRADE

 
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