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La Izquierda Diario
25 de décembre de 2018 Twitter Faceboock

Guerre en Syrie
Quand le retrait des troupes américaines de Syrie dévoile les faiblesses de la France
Jade Ruiz

En déplacement au Tchad, Emmanuel Macron a condamné le retrait américain de la Syrie, annoncé par Donald Trump le 18 décembre dernier. « Un allié se doit d’être fiable » a-t-il déclaré. Mais derrière les petites phrases, c’est bien l’affaiblissement de la France qui se cache ainsi que son incapacité à maintenir ses enjeux géopolitiques dans la région sans le géant américain, au sein d’un conflit qui implique plusieurs grandes puissances impérialistes.

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Crédit photo : AFP

En déplacement à N’Djamena (Tchad), Emmanuel Macron a cherché à revêtir son costume de Chef des armées aux côtés du président tchadien Idriss Déby, réaffirmant l’engagement de la France dans les opérations militaires de la région du Sahel (symbole de l’influence française sur le continent africain) et cherchant à courtiser les troupes françaises sur place. Une volonté de redorer l’image de la France comme puissance impérialiste mondiale, alors qu’Emmanuel Macron traverse en interne une crise sans précédent liée au mouvement des gilets jaunes, et que sa faiblesse apparaît clairement à l’échelle internationale.

Trump annonce le retrait des troupes américaines de Syrie

Le Président en a profité pour revenir dimanche 23 décembre sur l’annonce faite par Donald Trump d’un retrait des Etats-Unis de la guerre en Syrie. Ces derniers disposent de quelques 2000 effectifs maintenus en Syrie sous prétexte d’un soutien tactique et conjoncturel aux forces kurdes (YPG). Ces forces, qui seraient alliées au Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) sont cataloguées par la Turquie « d’organisation terroriste ». La décision américaine aura ainsi des conséquences géopolitiques importantes à commencer par la situation et l’avenir des milices kurdes présentes dans la région, laissant le champ libre à la Turquie pour mener une escalade répressive. Le ministre turc de la Défense, Hulusi Akar, a d’ailleurs d’ores et déjà assuré, quelques heures après l’annonce du retrait des Etats-Unis, vouloir enterrer les membres de la milice kurde du YPG qui se maintiennent dans les zones limitrophes de la Turquie.

Pour justifier le retrait de leurs troupes, les Etats-Unis parlent de victoire face à l’Etat Islamique : pour sa part, la porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Sanders, a déclaré dans un communiqué « nous avons commencé à renvoyer les troupes américaines chez nous alors que nous passons à la phase suivante de cette campagne », rappelant « qu’il y a cinq ans, l’EI était une force très puissante et dangereuse au Moyen-Orient, et maintenant les États-Unis ont vaincu le califat territorial. » Pourtant, il faut y voir également l’affaiblissement de l’hégémonie des Etats-Unis, principale puissance impérialiste en déclin, à maintenir sa domination dans la région. Celle-ci garde malgré tout une présence en Irak à la frontière avec la Syrie. D’autres y voient également une réorientation de la politique de sécurité nationale vers les tensions avec les puissances chinoises et russes, reléguant au second plan la lutte contre le terrorisme.

Malgré tout, cette décision n’a pas fait l’unanimité au sein de l’administration américaine, mettant en lumière les désaccords en interne. Jim Mattis, secrétaire à la défense, a en effet démissionné suite à l’annonce de Trump jugeant que cette décision prise de manière unilatérale donnait le champ libre à la Russie ainsi qu’à l’influence iranienne, et jetterait le trouble auprès des alliés des Etats-Unis ; « il faut traiter les alliés avec respect » a-t-il affirmé, rappelant que la puissance américaine se fonde également sur des partenariats solides.

Un camouflet pour la France

Emmanuel Macron a par ailleurs salué la démission de Jim Mattis : « je veux ici rendre hommage au général Mattis et aux propos qui ont accompagné sa décision, depuis un an avons constaté comment il a été un interlocuteur fiable », ajoutant que « un allié se doit d’être fiable ». Le retrait unilatéral des Etats-Unis sans aucune concertation avec leurs alliés est tout d’abord ressenti comme une humiliation pour la France, qui démontre son insignifiance aux yeux de la 1ère puissance impérialiste mondiale sur la scène géopolitique. Ce traitement à l’égard de la France s’était déjà confirmé par le retrait de Donald Trump de l’accord sur le nucléaire iranien et le rétablissement des sanctions économiques envers l’Iran, pénalisant des entreprises françaises et européennes (Renault, Airbus, Total, Volkswagen, PSA, Carrefour…), et ce alors même que la stratégie diplomatique de Macron avait été de faire de la France l’interlocuteur privilégié des Etats-Unis sur les questions européennes. Emmanuel Macron, représentant martial de l’impérialisme français essuie donc une humiliation de plus. En effet, la décision unilatérale des Etats-Unis de quitter la Syrie met en lumière le peu de poids dont dispose Macron sur des questions internationales majeures.

Par ailleurs, cette décision affaiblit un peu plus l’image de la puissance française à l’échelle internationale. En effet, sans les Etats-Unis, la France est incapable de maintenir ses objectifs dans la région, d’autant plus dans une situation où le gouvernement traverse une crise importante liée au surgissement du mouvement des gilets jaunes, qui a pour conséquence collatérale le renvoi d’une image d’affaiblissement de l’impérialisme français à l’internationale.

L’influence de la France en Syrie est d’ailleurs minoritaire en comparaison aux autres puissances présentes sur le territoire. L’Allemagne et la Grande-Bretagne, quant à elles, affrontent également des crises en interne, Angela Merkel cherchant à maintenir la stabilité de son gouvernement, et Teresa May affrontant les négociations autour du Brexit. Ces dernières se sont également montrées inquiètes face au retrait américain. Et pour cause, bien que ces pays demeurent des puissances impérialistes, et qu’on ne saurait remettre en cause la puissance française en termes de fabrication d’armes, celles-ci n’ont pas la capacité de mener l’intervention extérieure syrienne jusqu’au bout sans leur allié américain. Car ce qui se joue en Syrie, c’est bien un affrontement dangereux dans lesquelles se sont engouffrées les puissances régionales et internationales, au prix du sacrifice des populations locales.

 
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