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La Izquierda Diario
12 de septembre de 2017 Twitter Faceboock

La gronde interne affaiblira les directions syndicales conciliatrices ?
Le collaborationnisme de Berger ne fait pas vraiment l’unanimité à la CFDT
Sadek Basnacki

On se rappelle tous des déclarations de Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT en juin dernier, « les mobilisations sont ringardes ». La solution , la négociation. On voit ce que ça donne avec les ordonnances Macron. Malgré sa nouvelle amitié affichée avec Jupiter, les militants de la CFDT commencent à montrer les crocs face aux nouvelles attaques sur le code du travail.

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Crédit photo : vu sur Rebellyon.info

Des directions syndicales qui trahissent

Rien ne va plus dans les directions syndicales, FO qui ne veut pas mobiliser pour le 12, la CFDT qui ne veut pas mobiliser du tout, les militants syndicaux grondent contre leurs directions.
Berger explique qu’il est « déçu » par certains aspects de la nouvelle loi travail mais que pour autant cela n’est pas un recul et qu’il ne voit pas pourquoi la confédération devrait descendre dans les rues. A la publication des ordonnances, jeudi 31 août, il l’avait dit clairement sans sourciller, « la CFDT ne sera pas dans la rue le 12 septembre ».

Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO, qui veut concurrencer la CFDT dans le syndicalisme « réformiste », a également signalé que son syndicat n’allait pas appeler au 12. La numéro 2 de la CFDT, Véronique Descacq, a déclaré qu’elle ne voyait « pas comment manifester ferait reculer le gouvernement, par exemple sur le barème aux prud’hommes ». Il faudra peut être expliquer à Véronique Descacq que si la question des barèmes aux prud’hommes a disparu de la première loi travail, c’est grâce aux manifestations et aux grèves qui ont secoué le pays lors du printemps dernier.

Quelle serait la stratégie de la CFDT alors ? Les négociations ? Cette stratégie ne semble pas enthousiasmer et convaincre l’ensemble des militants cédétistes même si sa direction dit le contraire. Marc Besnault, membre du bureau national et secrétaire général pour l’Aquitaine dit ceci : « j’ai vécu des épisodes de mécontentement, notamment contre la loi El Khomri. Je peux vous dire que l’on n’est pas sur cette tonalité aujourd’hui ».

Une base qui commence à gronder

Véronique Descacq confesse tout de même que les tenants d’une stratégie plus offensive « ne sont pas zéro, mais ils ne sont pas nombreux ». A y regarder de plus près pourtant, il y a bien une colère qui couve. En ordre dispersé, plusieurs secteurs syndiqués à la CFDT ou FO défileront partout en France.

Les chasubles oranges de la CFDT ont parcouru les rues de Paris, Lyon, Besançon, Brest ou Châteauroux. Des secteurs comme l’automobile, la santé, la grande distribution ou l’enseignement supérieur et de la recherche ont décidé d’aller à l’encontre de la direction du syndicat. Le secrétaire général de la CFDT métallurgie du Rhône, Khaled Boughanmi « assume totalement » cette mobilisation.

« J’ai été élu pour refuser les reculs sociaux. On connaît le contenu des ordonnances et il n’y a rien de gagnant dedans. En matière de dialogue social, elles ne font qu’affaiblir les sections syndicales. »

La colère des militants ne s’arrête pas à la réforme et va également à l’encontre de la direction du syndicat. Khaled Boughanmi explique que « les militants que je croise trouvent inadmissible que la confédération n’appelle pas à manifester ». Un délégué syndical d’un groupe de l’industrie chimique observe que « les ouvriers sur le terrain ne sont plus du tout d’accord avec la ligne attentiste de la CFDT ».

Son exemple montre la désillusion de certains militants de la CFDT. Lui, militant depuis 27 ans, « attendait des mots forts » de Berger mais ceux-ci ne sont jamais venus. Il a alors poussé un coup de gueule sur Facebook qui lui a valu « des centaines de messages de soutien ». Un autre délégué syndical mais cette fois du secteur informatique a souligné que « se dire "déçu" dans un contexte aussi grave, ça semblait léger ». Le secrétaire d’une section d’Ile-de-France va plus loin en expliquant qu’ « on est assez furieux. Nos adhérents ont découvert à la rentrée que ce qui devait être un texte d’équilibre est bien pire qu’annoncé. Pour beaucoup, la communication de la confédération n’a pas été à la hauteur. ». Pour certains, c’est même vécu comme une trahison.

Ces derniers jours, beaucoup de syndiqués on relayé sur les réseaux sociaux des appels à manifester. « On essaie de s’organiser par la base, sur les réseaux. Sinon on est mort, on va perdre des salariés. », explique le délégué d’Ile-de-France qui se voit pousser par sa base. A la CFDT Santé Sociaux du Finistère, les coups de fil affluent. « Les adhérents nous demandent d’exprimer un désaccord plus ferme envers les ordonnances », constate Denis Théréné, son secrétaire général adjoint. Il met en avant l’une des trahisons de Berger dans les négociations, alors que le syndicat mène « un travail de proximité pour développer le mandatement dans les petites entreprises » le fait que le patronat puisse négocier sans les syndicats détruit tout ce travail.

« Si on ne se montre pas plus virulent maintenant, qu’est-ce qui nous attend pour les prochaines réformes, comme l’assurance chômage ? »

Cette vision du délégué, inquiet par la possible perte d’adhérents et sous pression des militants est l’expression de émergence d’une fissure entre la base et la direction de la CFDT.

Vers un rapprochement avec la CGT ?

Bien que de nombreux militants cédétistes contestent l’aplatissement de sa direction devant Macron, un rapprochement de la base du syndicat avec la CGT reste assez éloigné. La faute à qui ? A la direction de la CFDT bien sûr. Elle n’a eu de cesse de mettre ses syndiqués en garde. Manifester mardi reviendrait à répondre à la « convocation » de la CGT, ce qui est jugé « inopportun ». Inopportun ? L’alliance dans l’action des syndicats pour défendre nos droits et nos acquis ? Cette politique de division de notre classe menée par la direction de la CFDT et de FO ne peut être que dramatique dans les luttes à venir. Luttes qui seront intenses si l’on se fie aux déclarations successives du gouvernement.

Lorsque Marc Besnault explique que « l’état de nos relations empêche d’aller sur une action commune » ce n’est pas vrai. Berger et la bureaucratie de la CFDT ont beau être bien au chaud dans leurs bureaux du boulevard de la Villette, les syndiqués CFDT n’échapperont pas à cette réforme du code du travail. Et pour défendre leurs intérêts et leurs droits, une seule solution semble aujourd’hui s’imposer : manifester aux côtés de la CGT, de Solidaires et des sections de FO qui appellent à la grève et des autres syndicats et sections syndicales ; construire l’auto-organisation à travers d’assemblées dans les lieux de travail et discuter d’un plan bataille commun pour battre le gouvernement.

Si, comme le révèle Denis Théréné, « le fait de s’associer à la CGT gênait beaucoup de monde » dans le syndicat c’est bel et bien parce que la bureaucratie fait tout pour empêcher un rapprochement entre les syndiqués. Pour autant, cela n’empêche pas du tout certaines sections de pousser à cette alliance nécessaire pour mettre en déroute le gouvernement.

En Meurthe-et-Moselle, autour des hauts fourneaux de Florange, les adhérents de la CFDT métallurgie, qui ont de « grosses inquiétudes sur les ordonnances », « ont besoin d’action », admet Vianney Louis, secrétaire général du syndicat et membre du bureau départemental.

« Il faut agir vite pour montrer aux politiques et au patronat que l’on est en mesure de mobiliser contre la réforme ».

Le secrétaire général de la métallurgie explique qu’en revanche, « les militants ne sont pas pour y aller le 12, car la CGT a politisé le débat et refusé de travailler en intersyndicale ». Son syndicat réfléchit à différents moyens d’action comme des actions « coup-de-poing » dans les chambres patronales, blocages ou tractages.

Il serait erroné de faire porter la faute sur la CGT sur le fait d’avoir refusé l’intersyndicale, ce n’est pas la CGT qui a négocié et trahit lors de la conception de la nouvelle loi travail, ce n’est pas la CGT qui a refusé d’appeler à se mobiliser contre la loi travail XXL. Il est vrai que la CGT a appelé seul pour prendre la couverture à elle mais c’est basé sur la base du syndicat qui souhaite se battre contre cette loi scélérate. Cela arrange les différentes bureaucraties syndicales. La CGT passe pour le seul syndicat de lutte, la CFDT et FO se positionnent comme des syndicats de « partenaires sociaux », des syndicats raisonnés, interlocuteurs principaux du gouvernement. Alors si les syndicats de la CFDT n’ont « aucune contre-indication de la part de la confédération du moment que l’on n’y va pas mardi » cela pousse inévitablement à la division du mouvement social qui ne peut que servir les intérêts du patronat, du gouvernement et des bureaucraties syndicales.

Des bureaucratie sous tensions ?

A l’image de la commission exécutive confédéral de Force Ouvrière qui a publié un communiqué qui s’exprime contre les ordonnances de Macron tranchant ainsi avec les prises de positions de son secrétaire général et les prises de positions de certains délégués cédétistes, la base de FO et de la CFDT poussent les bureaucraties à mettre de l’eau dans leur vin.

Jean-Claude Mailly estime qu’il ne faut pas « user » ses forces maintenant, car « on en aura peut-être besoin demain », en ayant en ligne de mire la réforme de l’assurance-chômage, ne fait pas que des émules dans son syndicat, bien au contraire. N’approuvant pas la position de Jean-Claude Mailly, plus de la moitié des unions départementales FO, soit une cinquantaine, et au moins sept de ses fédérations ont décidé de passer outre et de défiler aux côtés de la CGT.

La CFDT a une échelle moindre se voit obligé de penser la « suite » à donner aux ordonnances. En milieu de semaine dernière, la direction de la CFDT a diffusé un document qui liste ses propositions pour aborder la suite. Signe que la colère est remontée jusqu’aux hautes sphères prenant acte de la « nécessité d’organiser l’expression du mécontentement des militants vis-à-vis de la réforme ». Une série de dates sont prévues pour « mobiliser dans les entreprises ».

Mais c’est là qu’est toute la stratégie du syndicat réformiste, il veut couper sa base de l’ensemble du mouvement social en l’appelant à se mobiliser dans des actions minoritaires et isolées sans prendre en compte l’ensemble de la mobilisation contre la loi travail XXL. Cette tactique qui enverrait ses syndiqués au casse pipe n’est pas une fin en soit puisque dores et déjà la base de la CFDT a réussi à pousser sa bureaucratie à réfléchir à un plan pour après.

Sa tâche à venir sera de la pousser à se mobiliser aux côtés de l’ensemble des syndicats et des organisations politiques qui veulent combattre et vaincre la politique de Macron. Le 3 octobre prochain, doit être une datte centrale pour la base de la CFDT pour se faire entendre. Initialement, le meeting appelé « Le progrès en tête ! » devait célébrer devant 10 000 cédétistes réunis à Paris la place de premier syndicat de France dans le privé, ravie en mars à la CGT. Il devait notamment servir à galvaniser les troupes, pour tenter de rafler à la CGT la première place dans le public lors des élections professionnelles de décembre 2018. Mais d’ores et déjà des militants ont prévenu qu’ils n’auront pas le cœur à la fête et envisagent plutôt d’interpeller la direction sur la politique menée par la CFDT au niveau des ordonnances et de leur non-mobilisation. La direction a tremblé et a finalement décidé de consacrer une bonne partie de la journée à des « mini-agoras » d’échanges sur les ordonnances afin de calmer sa base et essayer de la convaincre que la négociation est la seule solution dans l’état actuel des choses. Pas sûr que les centaines de militants ayant bravés les consignes du syndicats à propos du 12 se laissent convaincre aussi facilement. Et il faut espérer que cette base désireuse de se battre contre Macron et son monde pousse la direction de la CFDT à adopter une autre stratégie pour les mois à venir.

 
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