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24 janvier : « même si Berger ne veut pas, la base est là », scande un cortège de militants CFDT

Ce 24 janvier, un cortège de militant de la CFDT est présent dans le cortège parisien. Et son message est clair : « On est là, on est là, même si Berger ne veut pas, la base est là ». Une illustration à la base d’un phénomène plus profond remettant en cause la ligne de Berger. Une frange de militants CFDT qui récusent la « victoire de l'âge pivot » et le jeu des négociations. Les cartes déchirées commencent à s'accumuler.

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Ces derniers jours la CFDT est revenue au centre de l’attention médiatique. Et pour cause, les locaux de la centrale syndicale ont été ciblé par des grévistes. Il y a une semaine d’abord, avec l’action d’envahissement du local à Paris par les grévistes de la coordination francilienne SNCF-RATP pour rappeler que depuis le 5 décembre c’est la base qui fait grève, et qu’ils la font pour le retrait total de la réforme et qu’il est donc hors de question que des personnes comme Berger qui ne les représentent pas, aillent négocier des choses dont ils ne veulent pas, en leur nom. C’est dans la lignée de celle-ci et contre la répression et les condamnations qu’elle a engendré de la part de la classe politique et de certaines directions syndicales que les grévistes de l’énergie ont coupé l’électricité dans le local, ils ont déclaré dans le communiqué que le siège « a perdu l’électricité et c’est la collaboration de classe qui a été plongée dans l’obscurité. » Des actions qui condamnent nettement la ligne collaboratrice de la CFDT.

Et auxquelles Laurent Berger s’est empressé de répondre en disant que « C’est inacceptable. La CFDT, on n’est pas obligé d’être d’accord avec elle, mais dans une démocratie, on reconnaît qu’elle représente 620.000 adhérents ». Mais Marilyne de la CFDT métallurgie lui répond très clairement « On est le premier syndicat de France, mais si les gens partent, il n’y aura plus personne dans les équipes syndicales pour faire voter pour la CFDT aux élections professionnelles ». Berger s’appuie sur les syndiqués CFDT pour condamner ces actions -contre lesquelles il a porté plainte. Mais que pensent les syndiqués CFDT de la politique de Berger dans le mouvement ?

Nous, comme d’autres médias, les avons interrogé, et la réponse ne va pas plaire à Berger.

Il faut voir que depuis quelques temps déjà des cartes CFDT sont rendues, jetées, déchirées, « réduites en confettis » ou brûlées. Un phénomène qui ne sort pas de nulle part, et qui fait suite à des appels locaux -ou des initiatives individuelles- d’appel à la grève pour les journées du 5 et 17 décembre ou encore pour le 9 janvier. On l’ a vu par exemple dans la section de l’hôpital psychiatrique du Rouvray, à Rouen, qui s’est mis en grève et a participé pour la première fois – comme le souligne France 3 Normandie, à la manifestation. C’est le cas aussi de Michel Tanner, travailleur social à Nancy et alors syndiqué CFDT « Je participe à la grève contre la réforme des retraites. Ainsi qu’aux manifs. J’ai fait deux jours de grève en décembre et plusieurs en janvier ».

Le fait que la direction de la CFDT ait littéralement crié victoire, en collant un peu partout des petites affiches indiquant « victoire » après le « retrait provisoire de l’âge pivot » ne passe pas. C’est que dit Jean-Louis, professeur qui a rendu sa carte juste après « On a du mal à comprendre que la CFDT ait accepté ça, on va négocier avec un pistolet sur la tempe ». C’est le cas également de Jean-Louis Alfred, représentant CFDT au sein du groupe textile Vivarte, avec des responsabilités syndicales locales dans l’Indre qui s’énerve : « Mes positions sont claires, je trouve ça scandaleux. On crie victoire alors que c’était prémédité ». Et ce désaccord avec la ligne imposée par la direction d’autre comme Michel le partage également « Bien sûr, la confédération CFDT est favorable à la retraite à points et moi , pas du tout. Je suis pour le retrait de cette réforme inacceptable et qui ne doit pas passer car elle constitue un changement de société radical où la part belle serait faite au pouvoir de l’argent. » A la base de la CFDT aussi la question du retrait total, qu’on entend dans la bouche de très nombreux grévistes depuis le 5 décembre, se fait sa place ; et l’âge pivot ne convainc pas. Michel poursuit « Laurent Berger ne s’est pas contente de défendre la retraite à points, il a participé à la comédie de l’âge pivot. Et a ainsi manœuvrer pour torpiller le mouvement social auquel il n’a jamais participé. Et ça ce n’est pas loyal à l’égard des salariés et des autres syndicats ! »

Ce qui est pointé c’est le mot d’ordre mais aussi la méthode, la stratégie pour gagner. C’est « participer à la comédie de l’âge pivot », c’est en réalité toute une stratégie de collaboration de classe qui est mise à nue et vivement critiquée. Et médiapart le souligne « Sous le couvert de l’anonymat, des militants l’affirment : « La CFDT n’a pas cherché à mobiliser le privé ». Ce refus de mobiliser, d’entrer dans la bataille et de ne pas appeler à la reconductible avec un plan sérieux pour certains ça ne passe pas.

Ces sections qui font grève ou appellent dans des communiqués au « retrait du projet de loi instituant un système "universel" de retraite » à l’image du Sgen CFDT recherche ; sont à l’image de cette dynamique de rupture entre la direction et la base. Stéphanie après trente ans à la CFDT le dit tout net « le syndicat « n’écoute pas assez la base » . Jean-Louis Alfred, le représentant CFDT de l’Indre le souligne également « Chez mes adhérents, il y a le sentiment que sur cette question, le bureau confédéral ne représente que lui-même et est déconnecté de la base. » Et ce constat le pousse lui aussi à quitter la CFDT « Moi j’ai le combat Vivarte à achever mais après, je rends ma carte, c’est une évidence. »

Le décalage croissant entre la politique de collaboration de classe de Berger et les aspirations de la base à en finir avec la réforme se font sentir. Et si beaucoup nuancent en disant qu’on n’est pas encore au stade de l’hémorragie post 75, il faut voir que la CFDT n’échappe à la dynamique qui marque la grève contre la réforme des retraites : la voix de la base qui donne le ton et la couleur. Et si dans tous les syndicats un ras-le-bol des directions qui négocient sur le dos de leur grève se fait entendre, Berger n’y échappe pas et à force d’écouter le gouvernement plus que les syndiqués CFDT, l’écart se creuse et les cartes se déchirent.


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Philomène Rozan

Etudiante à l’Université Paris Cité , élue pour Le Poing Levé au Conseil d’Administration

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