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MACRON II

49.3. Bousculé à l’Assemblée, le gouvernement prêt à passer en force sur la loi du Budget 2023

A l’occasion de l’examen du budget 2023, les députés de la majorité encaissent revers sur revers, infligés parfois par leur propre camp. Des défaites qui restent symboliques et que le gouvernement balaiera très probablement par l’utilisation du 49.3.

Seb Nanzhel

14 octobre 2022

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Crédits photo : CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Cette semaine l’examen du projet de loi de finances pour le budget 2023 démarrait à l’Assemblée Nationale . Mais cette année, le gouvernement Macron II n’est pas doté d’une majorité absolue et l’examen des textes à l’Assemblée, qui définissent l’ensemble des recettes et des dépenses de l’Etat ainsi que les trajectoires budgétaires sur les années à venir, est semblable à un chemin de croix pour le camp présidentiel.

Celui-ci subit en effet débâcle sur débâcle et voit même son propre camp se diviser sur plusieurs amendements, symptôme que la crise politique ouverte par les législatives est loin d’être résolue. Si les oppositions à l’Assemblée jubilent face à la fébrilité de la macronie, le gouvernement n’en est pas moins résolu à garder le contrôle et à sortir de cette impasse grâce au 49.3. Un passage en force qui ne devrait toutefois pas être immédiat, le gouvernement étant forcé de temporiser face aux grèves dans la pétrochimie et à leur élargissement à d’autres secteurs.

Une semaine de camouflets pour la macronie

Tout a commencé dans la nuit de mardi à mercredi, lorsque la NUPES, Les Républicains et le Rassemblement National ont rejeté 7 articles centraux des 26 que comporte la Loi de Programmation des Finances Publiques 2023-2027.

Le reste de la semaine n’a pas été plus glorieux pour la -toute relative- majorité présidentielle. Le vote du Projet de Loi de Finances a en effet débuté par le rejet de son premier article. « Je n’ai jamais vu une majorité démarrer un projet de loi de finances avec le premier article rejeté », commente le député du PCF Sébastien Jumel, cité par Le Monde. Le vote s’est poursuivi avec l’adoption de plusieurs amendements à l’encontre du projet du gouvernement, souvent avec la participation de certains députés macronistes.

Mercredi, c’est un amendement concernant la taxation temporaire des dits « superdividendes » proposé par le Modem, membre de la majorité, qui a été adopté. Certains députés macronistes ont même voté pour alors que le camp présidentiel tente de maintenir une ligne dure sur les profits monstres accumulés notamment par les géants de l’énergie dans la période.

Cependant, qu’on ne s’y trompe pas : cet amendement n’est en réalité que de la poudre aux yeux. Ce seraient seulement 200 millions d’euros qui seraient récupérés au travers de cette mesure, alors que les profits des ces entreprises se comptent en dizaines de milliards. « Ce n’est pas non plus le grand soir fiscal », reconnaît lui-même le député Modem à l’origine de l’amendement.

Les épisodes du genre se sont succédés dans la semaine, avec par exemple l’adoption d’un amendement réhabilitant l’« exit tax ». Une mesure mise en place par Sarkozy permettant en théorie de taxer rétroactivement l’exil fiscal des contribuables, et supprimée par Macron en 2018. Autant de camouflets qui, en écoutant les oppositions, constitueraient une « attaque en règle des symboles du macronisme », comme le titre Le Monde.

Une débâcle symbolique face à la menace du 49.3 qui se confirme

Mais si dans le journal L’Insoumission, la France Insoumise savoure des « victoires pour le peuple », les réjouissances risquent d’être de courte durée. En effet, le gouvernement ne cache pas sa volonté d’utiliser le 49.3 pour faire passer son texte en force et faire le tri parmi les amendements adoptés cette semaine. C’est Olivier Veran, le porte parole du gouvernement, qui a averti mercredi que la grenade était dégoupillée et que le conseil des ministres avait autorisé le gouvernement à utiliser le fameux article qui lui permettrait de considérer le texte comme adopté. Son usage est aujourd’hui considéré comme « inéducable » par le Monde.

Les députés de la NUPES sont par ailleurs les premiers au courant que ces amendements risquent de sauter dès le moindre faux geste et que le projet passera en force : ils ont passé la semaine à implorer le gouvernement à ce sujet. « Vous engagez-vous devant la représentation nationale à respecter au moins les modifications qui auront été occasionnées dans ce budget ? » a ainsi questionné Alexis Corbière. Clémentine Autain a quant à elle déclaré : « Qu’est-ce qu’on fait, là, si vous ne gardez rien de ce qu’on vote avec le 49–3 ? ».

Avec la perspective de l’utilisation du 49.3, le revers parlementaire subi par la macronie apparaît plus comme un symbole et un symptôme de sa difficulté à s’adapter à la majorité relative dont elle dispose à l’Assemblée que comme un « coup d’arrêt » à ses politiques antisociales. Une défaite symbolique sur laquelle surfent même les camps les plus réactionnaires à l’instar du RN, qui tente de se refaire une nouvelle image « sociale » quelques jours après avoir proposé des mesures anti-ouvrières pour la réforme de l’assurance-chômage

Si l’utilisation du 49.3 n’est à priori plus qu’une question de temps, le gouvernement ne devrait pas le dégainer avant la semaine prochaine. « Ce ne sera pas aujourd’hui, ce ne sera pas demain et ce ne sera pas cette semaine le 49.3 », a ainsi déclaré le ministre de l’économie Bruno Le Maire. Le gouvernement ne voudrait en effet pas ajouter de la vapeur à la vapeur en paraissant trop brutal avec une utilisation précoce du 49.3 par peur de la réaction qu’elle pourrait susciter. Car si le duo Macron-Borne a durci le ton cette semaine avec l’annonce de la réquisition des grévistes dans les raffineries, cette attaque contre le droit de grève a été à double tranchant puisqu’elle a entraîné en réponse une mobilisation de nombreux secteurs du monde du travail.

Alors qu’une date interprofessionnelle est prévue mardi contre cette attaque et pour les salaires et que plusieurs secteurs, comme les cheminots, commencent à construire la grève ce n’est pas encore le moment pour le gouvernement de dégainer le fameux article. Car cette colère qui s’organise et s’exprime dans les entreprises en grève et dans la rue pourrait lui infliger, elle, un revers tout autre que symbolique.


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