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« pa man nye kweol an nou ! » (Touche pas à mon créole)

A la Poste Paris 15, interdiction de parler créole et mise au pas des salariés

La Poste, actuellement acculée pour ses méthodes de gestion du personnel et la multiplication des suicides de ses employés, regorge d’imagination et d’inventivité pour mener la vie dure à ses salariés. Dans le centre de distribution de Paris 15ème arrondissement qui compte entre 150 et 200 employés, la direction locale doit être bien fière de sa nouveauté : une nouvelle « charte du respect », tout en émoticon et en gros caractères illustrés, vient rappeler aux postiers qu’il est nécessaire de « dire bonjour », d’être « correctement habillé » et de parler bon « français », au risque, sinon, d’être sanctionnés.

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« Nous sommes tous créoles ! »

 
Un pouce bleu tourné vers le ciel précède le commentaire suivant : « je m’exprime correctement, sans porter de jugement, et en français  » ; « Je dois avoir une tenue correcte et propre, adaptée à mon travail ». Le pouce rouge, tourné vers le bas, vient sanctionner le fait de s’exprimer « en dialectes locaux ou dans une langue étrangère ». Rien à redire pour le côté pédagogique qui aurait de quoi inspirer n’importe quel enseignant d’une classe de primaire. Sauf qu’il s’agit de la nouvelle charte « du respect » que la direction de La Poste de la plateforme de distribution de Paris 15 vient d’adresser à ses employés.

Ce document, inspiré de la charte établie dans le bureau de Paris 16ème, est une succession de règle qui vise à régir les manières de s’habiller, se comporter, mais aussi la langue utilisée. Des règles de « savoir-vivre » qui cherchent à imposer la déférence à l’égard de la hiérarchie, mais également à régir les formes de sociabilité entre collègues en interdisant l’usage d’une autre langue que le français, c’est-à-dire, dans le contexte local, l’usage du créole par certains facteurs. Pas si loin le temps des colonies, avec cette circulaire qui remet au goût du jour à La Poste, les codes de bonnes conduites dignes de l’administration coloniale…

C’est contre cette infantilisation et ce qui relève de l’ingérence patronale dans la sociabilité ouvrière, que les représentants syndicaux de Sud-PTT et de la CGT vont s’opposer lors du passage du texte au Comité Hygiène Sécurité et Conditions de Travail (CHSCT) ce mercredi. Avec l’appui de SUD PTT Gwa et SUD PTT Guyane, une campagne sera menée dans la journée sur l’établissement avec distribution de tract et de badge « Pa Man nye kweol an nou  » (Touche pas à mon créole) visant à dénoncer le diktat patronal que cherche à imposer la direction face à laquelle ils répondent : «  nous sommes tous créoles ! »

Nouveau moyen de pression

 
En vérité, comme le confirme le militant Sud-PTT de Paris 15 que nous avons contacté, ce que cherche la direction à travers ce règlement, c’est de «  créer de nouveaux moyens pour mettre la pression sur les salariés  » et de nouveaux arguments « pour les mettre en faute, voire les licencier ». Dernièrement, raconte-il, « pour le cas d’un salarié passé en conseil de discipline, le fait qu’il portait des survêtements a été évoqué, histoire de charger la barque,  ».
En effet, ce nouveau « code de conduite » cherche uniquement à créer des précédents permettant à l’entreprise de multiplier les cas de sanctions à l’encontre des employés de La Poste. Humilier, faire plier, casser toute velléité d’irrévérence, et raboter le nombre de salariés fonctionnaires ou en CDI en les remplaçant par toujours plus de précaires…Voilà l’objectif de la direction à deux ans de la précédente grève contre la réorganisation des tournées qui avait été longue et très suivie sur la plateforme, et alors que la direction en prévoit une nouvelle à l’horizon 2017.

Pousser à bout les salariés et précariser

 
Depuis la réorganisation de 2014, les conditions de travail n’ont cessé d’empirer : surcharge des tournées pour les facteurs piétons, distribution des colis et objectifs chiffrés de vente de produits La Poste. Des situations qui poussent certains à la faute et contre lesquels la direction locale est sans pitié : « cet été, deux facteurs ont été virés pour avoir signé eux-mêmes des recommandés. L’une venait d’avoir un enfant, l’autre était en train de perdre la vue  ».

Des conditions de travail, à Paris 15 comme partout ailleurs à La Poste, qui ,à coup de réorganisations successives, deviennent de plus en plus difficiles. «  Beaucoup craquent, cherchent absolument à partir en menant des formations pour se réorienter, pour changer de boulot ». Ils sont alors remplacés par des précaires, en intérim, en contrat aidés, ou en CDD. « Sur le bureau, il y a maintenant quasiment un quart de précaires. Avant, les intérimaires n’étaient là que l’été  ». Eux aussi subissent de plein fouet les conditions de travail désastreuses – « les tournées changent chaque semaine, et quand ils n’arrivent pas à la finir dans les temps, les heures supplémentaires ne sont pas toujours payées » - tandis que la direction compte sur leur statut de précaire pour ne pas broncher.

A Paris 15 comme ailleurs, la situation dans les centres de la Poste ne cesse de se dégrader. Ce nouveau « code de bonne conduite » élaboré par la direction de La Poste Paris 15 n’est autre qu’un énième coup de massue patronal sur les salariés. Face à la multiplication des cas de suicides qui commencent à être relayés par les grands médias, grâce au travail des militants-postiers combatifs comme l’atteste la conférence de presse menée par Sud-PTT à ce sujet, de nouveaux signes de riposte, salvateurs, se dessinent aujourd’hui.
Répondre à la direction « Pa man nye kweol an nou » et « nous sommes tous créoles » en est un autre. Le signe que l’unité des travailleurs de la PPDC 15ème est plus forte qu’une direction qui cherche à les humilier et à les diviser !


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