Les égoutiers de Paris se préparent à partir en grève reconductible à partir du 7 mars prochain. Ce mardi, les fédérations CGT des Services Publics et des Transports, dont dépendent les secteurs de la filière déchets, du public et du privé, ont appelé à la grève « à partir du 7 mars et jusqu’au retrait du projet de loi ». Si le communiqué des deux fédérations n’évoque pas explicitement le mot d’ordre d’une grève reconductible, pour les égoutiers, l’heure est à la radicalisation du mouvement.
« Les gars en ont marre des journées isolées », témoigne Guillaume, égoutier à Paris et syndiqué à la CGT, « ces manifestations ont ramené énormément de primo-manifestants, mais on arrive au bout d’un cycle, il faut des actions et durcir le mouvement ».
Comme dans de nombreux secteurs, chez les égoutiers de Paris, la mobilisation a été importante contre les retraites avec des taux de grévistes autour de 70 %. Les égoutiers ont en effet de nombreuses raisons de se mobiliser contre la réforme de Macron. Leur métier, très physique, les expose à de nombreux dangers sanitaires.
Des études réalisées au début des années 2000 ont attesté d’une surmortalité extrêmement importante des égoutiers par rapport au reste de la population : 97 % de surmortalité avant 65 ans par rapport à la population de Saint-Denis (un département qui bat régulièrement de tristes records en terme de surmortalité et d’espérance de vie).
En janvier, Challenges reprenait les propos de Frédéric Aubisse, secrétaire général adjoint du syndicat CGT-FTDNEEA (Filière Traitement Déchets Nettoiement Eau Égouts Assainissement) : « Sur dix égoutiers qui partent à la retraite à 52 ans, la moitié décède avant d’avoir atteint 62 ans ».
Les égoutiers avaient déjà été fortement mobilisés en 2019-2020 lors de la précédente réforme des retraites. « Cela a marqué tout le monde, de voir qu’il y avait énormément de monde en dehors de nos corps de métier, des étudiants, qui venaient nous aider à tenir les piquets devant les TIRU [Traitement Industriel des Résidus Urbains] », se rappelle Guillaume.
Pour les égoutiers, l’heure est à la grève reconductible et à la coordination entre les secteurs, en premier lieu avec les agents de la Propreté de Paris, mais aussi avec les transports, l’énergie, l’éducation etc. « En ce moment, tout le monde se regarde, mais dès qu’il y a un gros secteur qui va partir en reconductible, ça va être l’étincelle qui peut faire partir beaucoup de monde ! Ce qui va fonctionner pour radicaliser les actions, c’est si on construit des liens interpro et qu’on s’aide pour tenir des piquets sur des lieux stratégiques, pour des occupations, pour se réapproprier l’outil de travail ».
La CGT Cheminots, SUD Rail et l’intersyndicale RATP ont d’ores et déjà appelé à la grève reconductible à partir du 7 mars. Pour autant, comme nous l’écrivions à propos de ces deux entreprises : « les appels fédéraux par en haut ne suffiront pas. […] Une grève reconductible dans la durée ne pourra faire l’économie de réels liens entre grévistes et d’un travail à la base, sur le terrain. »
C’est bien ce à quoi comptent s’atteler les égoutiers de Paris. Le syndicaliste CGT l’assure : « à partir du 7 mars, ça va changer de ton ! »
