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Levée de boucliers

Affiche de la CGT. Tout le monde déteste la police ?

Crédit Photo : Geoffrey Froment Fibre sensible, tabou républicain. Un pilier de l’Etat français a été attaqué : la police est critiquée pour ses actes de violence lors des manifestations contre la Loi Travail. Campagne « honteuse », « immonde ». Scandale. On ose dire que les forces de police frappent et que c’est illégitime ? Il faut porter plainte !

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Une grande polémique agite toute la presse hexagonale. La cause ? Une affiche du syndicat Info’Com CGT qui dénonce les violences policières. On y voit une flaque de sang, un écusson de CRS et une inscription : « la police doit protéger les citoyens et non les frapper ». Un message pas si subversif que ça en réalité. Juste une réaction d’un syndicat face à la vague de violences policières qui s’abat sur les opposants à la Loi Travail, particulièrement sur la jeunesse.


Cependant cela a été suffisant pour scandaliser les représentants de l’Etat, à commencer par le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve, mais aussi des représentants des principaux partis du régime jusqu’au Front National. Ainsi, Eric Ciotti, député Les Républicains (LR), a demandé au « ministre de l’Intérieur de déposer plainte contre la CGT » après avoir dénoncé une affiche « scandaleuse, indigne, honteuse ».

Florian Philippot, bras droit de Marine Le Pen, a dénoncé une « affiche immonde » qui d’après lui a été faite avec « l’argent de l’Etat ». Le trésorier du FN, Wallerand de Saint-Just, semble même avoir fait une découverte : « la CGT dévoile son vrai visage : être toujours la courroie de transmission d’une extrême gauche (…) souvent ultra-violente ». Alors que le FN se trouve embourbé dans des affaires pour détournement de fonds publics et évasion d’impôts, entre autres, l’hypocrisie de ces déclarations rejoint le ridicule. Mais une chose est sûre : le parti soi-disant antisystème, au moment où il faut défendre le régime et ses institutions, notamment ses forces répressives, est toujours en première ligne, aux côtés du si décrié « UMPS ».

Le gouvernement s’est exprimé surtout par la voix du ministre de l’intérieur B. Cazeneuve qui a écrit une lettre au secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, indiquant que ce visuel met « gravement en cause la police nationale » et qu’il s’agit d’une campagne « violente » et « choquante ». Le premier secrétaire du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis a quant à lui dénoncé une « gauchisation » de la CGT qui ne chercherait désormais qu’à se regrouper « autour de quelques personnalités qui sont en confrontation frontale avec l’ensemble de la société ». Le député écolo François de Rugy a exprimé sur Twitter son « soutien aux policiers qui font un métier particulièrement dangereux ».

Les syndicats de la police, y compris la CGT-Police, ont également dénoncé l’affiche. Le SCSI-CFDT et Synergie, majoritaires chez les policiers, parlent respectivement « d’injure aux milliers de policiers et gendarmes blessés ou tués dans l’exercice de leur fonction » et d’un « appel abject à la haine » et à la « violence » envers les forces répressives de l’Etat. La CGT-Police déclare se sentir « insultée ».

Un tapage médiatique pour légitimer la répression policière

Tout ce « cirque médiatique » révèle en réalité le caractère profondément réactionnaire et pro-répression du personnel politique du régime. Il s’agit pour eux de renforcer l’idée que l’usage de la violence par les forces répressives est toujours légitime, qu’en dernière instance l’Etat a toujours une ou des raisons « justes » de réprimer. En ce sens, il n’est pas étonnant que face aux cas de brutalité policière on les entende beaucoup moins crier au « scandale » ; que quand la « justice » laisse en liberté les assassins des jeunes des banlieue ou des manifestants, comme dans le cas de Rémi Fraisse, on ne parle pas « d’injure contre les familles » des victimes. Ceux-là mêmes qui parlent aujourd’hui de « honte » et de « campagne immonde » à propos d’une affiche, se réjouissent quand les assassins de Zyed et Bouna, Amine Bentounsi et tant d’autres sont relaxés !

La réalité c’est que « l’esprit du 11 janvier », quand la foule applaudissait les gendarmes et les CRS, l’armée et les différents corps répressifs, semble loin aujourd’hui. Au cours de la lutte contre la Loi El Khomri, de plus en plus de salariés et de jeunes sont en train de faire leur expérience avec la brutalité et l’arbitraire policier, sans aucun doute encouragés par le ministère lui-même. Et c’est cette dynamique de remise en cause de la légitimité de la répression par une partie de la jeunesse et des travailleurs que l’ensemble des représentants du système essayent de briser.

La confédération de la CGT reste prudente

L’affiche d’Info’Com CGT est l’expression du rejet des violences policières, notamment contre les jeunes, qui émane à la base des syndicats. C’est pour cette raison que Philippe Martinez n’a pas pu se dissocier ouvertement des auteurs de l’affiche, même s’il a tenu à prendre ses distances en affirmant que celle-ci « émane d’un syndicat de la CGT et elle n’apparaît pas, vous l’avez remarqué, sur le site de la confédération (…) [Elle n’engage] ni la CGT-Police ni la confédération ».

En prenant ses distances de la sorte, Martinez affaiblit la position de la CGT Info’Com et la laisse plus vulnérable face à d’éventuelles représailles politiques et judiciaires. Cette attitude de la direction de la CGT s’inscrit dans la même ligne que sa politique visant à isoler le mouvement de la jeunesse, le laissant seul face à la répression et aux violences policières (coups, gazages, arrestations, mises en examen et condamnations arbitraires, entre autres).

La répression, c’est le travail de la police !

Nous soutenons inconditionnellement le droit de la CGT Info’Com et de tous les syndicats à critiquer et dénoncer les forces répressives de l’Etat. L’affiche en question est une réaction face à la violence policière de plus en plus forte contre ceux et celles qui se mobilisent. Cependant, nous ne partageons pas la position exprimée sur l’affiche selon laquelle la police pourrait être au service de la « protection de l’ensemble des citoyens ». L’Etat capitaliste étant un instrument des classes dominantes, et les forces répressives étant le principal outil du pouvoir d’Etat, la police comme l’armée ne peuvent en aucun cas être au service de « l’ensemble des citoyens ». La police, ainsi que toutes les institutions répressives (l’armée, les différents corps répressifs, la Justice), sont au service des classes dominantes, des capitalistes. Justifier et légitimer la répression policière est donc pour eux une tache idéologique fondamentale, afin de maintenir la domination capitaliste.

Alors, tout le monde déteste la police ?

Non. Le patronat, ses représentants politiques et ses courroies de transmission dans le mouvement ouvrier et de la jeunesse (les bureaucraties syndicales) non seulement ne détestent pas la police, mais ils sont adeptes de la répression, fanatiques de l’ordre d’une société d’exploitation et d’oppression. Les exploités et les opprimés connaissent très bien ce que leur « ordre » veut dire en termes de répression. Et la mobilisation actuelle montre concrètement comment les gouvernants et le patronat s’en servent. Et si le mouvement venait à se radicaliser, cela pourrait être pire. C’est inévitable. C’est pour cette raison que face à la violence policière, nous défendons la dissolution de tous les corps de répression, ce qui pourra être mis en œuvre par les exploités et les opprimés en lutte pour le pouvoir politique et le renversement du système capitaliste.


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