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Algérie. Le régime, acculé par la mobilisation : Bouteflika renonce à son 5ème mandat

Dans un courrier en sept points publié en fin d'après-midi, Abdelaziz Bouteflika explique renoncer à un cinquième mandat, reporter les élections présidentielles et la formation d'un "gouvernement de compétences nationales" pour assurer l'organisation des futures élections. Après une première manœuvre visant à faire reporter d'un an, cette démission, le régime est acculé par l’énorme mobilisation populaire dans une dynamique de massification, des millions de personnes manifestaient vendredi 8 mars, tandis qu’une grève générale de 5 jours a démarré ce dimanche.

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Dans le courrier publié par Algérie Presse Service, le président explique ainsi : "Il n’y aura pas de cinquième mandat et il n’en a jamais été question pour moi". Par ailleurs, le courrier annonce le report des élections présidentielles.

Afin d’assurer la transition, Bouteflika a annoncé "procéder tout prochainement à des changements importants au sein du Gouvernement", mais également la création d’une Conférence Nationale "dotée de tous les pouvoirs nécessaires à la discussion, l’élaboration et l’adoption de tous types de réformes devant constituer le socle du nouveau système que porte le lancement du processus de transformation de notre Etat-nation" avec à sa tête "un président qui sera une personnalité nationale indépendante, consensuelle et expérimentée". Cette Conférence nationale devra proposer un projet de Constitution.

Par ailleurs une "commission électorale indépendante" devrait être créée pour préparer l’échéance présidentielle. Enfin, "il sera formé un Gouvernement de compétences nationales bénéficiant du soutien des composantes de la Conférence nationale" afin de contribuer à la préparation des élections présidentielles.
En somme, après la manœuvre ratée du mini-mandat, il semble que le régime a pris conscience que la mobilisation est bien plus profonde qu’il n’a bien pu le penser au premier abord. Acculé par la mobilisation, il s’agit ainsi de circonscrire la colère à la seule mobilisation anti-Bouteflika pour tenter de diviser et de coopter des secteurs de la mobilisation massive de millions de personnes dans la rue. Il s’agit, ainsi de tenter de désamorcer la mobilisation populaire, qui avec la grève générale entamée dimanche, risquait de s’élargir à des secteurs clés de l’économie.

Mais pour le régime, l’objectif reste le même : tenter de sauver l’essentiel à savoir le régime, et les intérêts de certaines factions des classes dominantes, qui commençaient par ailleurs à se retourner contre Bouteflika et le régime lui-même, de sorte que des franges du ... patronat ont appelé à soutenir la mobilisation. Signe s’il en fallait, que le régime est acculé y compris dans son camp. Et signe, que pour la jeunesse, le monde du travail, il s’agit d’enfoncer le clou pour obtenir bien plus que le renoncement d’un cinquième mandat, qui, de fait, était déjà en sursis. C’est bien par l’approfondissement de la mobilisation en cours, de ses tendances à la grève générale, pour une issue ouvrière et populaire, qu’il s’agit d’approfondir cette crise d’un régime en phase terminale.

Le pas de côté de Bouteflika est un recul. C’est le produit des mobilisations historiques qui secouent l’Algérie depuis deux semaines. Mais Bouteflika reste au pouvoir, manœuvre pour gagner du temps, mettre un gouvernement "d’union nationale" avec les différentes fractions des forces politiques institutionnelles, de la bourgeoisie et du patronat et de la bureaucratie syndicale. Une façon de "blinder" le régime et le système, que les manifestants veulent pourtant voir dégager.

Pour se débarrasser de la caste corrompue au pouvoir, du système pourri au service des milliardaires algériens et des multinationales étrangères, loin de baisser la garde, le mouvement devrait s’approfondir et s’étendre, à travers les manifestations et la grève, pour refuser toute idée de trêve avec le régime qui veut demobiliser, avec la collaboration de ses alliés, directs ou objectifs, au sein du mouvement ouvrier et populaire.

C’est tout le système qu’il faut renverser. Les marxistes révolutionnaires, en Algérie, dans la région et de ce côté-ci de la Méditerranée sont convaincus que seul un gouvernement des travailleurs, des déshérités des villes et des campagne pourrait mener, jusqu’au bout, ce printemps algérien qui ne devrait jamais être que l’acte final concluant, pour de bon, la guerre de libération nationale et sociale initiée en 1954 et qui a été détournée par le FLN.

Dans l’immédiat, pour refuser les manœuvres de l’exécutif, ses "Conventions" et "Commissions électorales" soi-disant indépendantes qui devraient organiser et superviser des élections que Bouteflika et les siens veulent reporter pour rester au pouvoir, il faudrait convoquer l’élection d’une Assemblée Constituante Révolutionnaire qui devrait se créer sur les bases de l’abolition du régime actuel, pour pouvoir mettre au centre des discussions un certain nombre de questions cruciales, à commencer par la question de la souveraineté nationale et de l’avenir de la jeunesse, de l’élargissement et de la défense des droits démocratiques bafoués depuis trop longtemps par le FLN, les généraux et leur Sécurité militaire, la question de l’accès aux terres et au logement.

La seule façon de garantir que ce ne soit pas un gouvernement sorti de la pourriture du régime, repeint aux couleurs du pluralisme et de la "démocratie", qui s’empare des rênes du pays, et qu’une Assemblée Constituante Révolutionnaire voit le jour pour débattre de l’ensemble des problèmes qui frappent les masses d’Algérie, il faudra continuer sur le chemin de la mobilisation, de la grève et de son auto-organisation, dans les entreprises, les administrations, les universités, les lycées et les quartier. Si pour la dynamique à la grève générale reste inscrite dans le cadre la désobéissance civile, il faudra pour amplifier le mouvement que cette grève générale soit relayé et mises en oeuvre par des structures syndicales à la base, comme cela a pu être le cas chez SONATRACH. La crainte du régime à voir un mouvement de grève générale se développer dans des secteurs clés de l’économie s’exprime aussi par la très forte répression de la grève des travailleurs de la zone rouiba hier par la gendarmerie nationale.

Bouteflika et le régime viennent de reculer. Ce n’est pas maintenant qu’il faut s’arrêter. Il faut déboulonner dès aujourd’hui les oligarques et politiques, les Bouteflika petits et grands qui depuis trop longtemps se sont appropriés le pouvoir né de la Guerre de libération et du renversement du pouvoir colonial français.


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