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Après le 17, des actions locales jusque fin décembre : un plan de bataille vraiment à la hauteur ?

A quelques jours de Noël, l’Intersyndicale continue de revendiquer le retrait de la réforme en refusant toute "trêve". Cependant, dans son dernier communiqué, aucun appel à une troisième grande journée de grève nationale interprofessionnelle n’est précisé renvoyant à des actions locales le 19 jusque fin décembre, et, en fonction du gouvernement, à une date "au-delà du mois de décembre". Après une nouvelle mobilisation historique le 17 décembre, ne s’agirait-il pas d’enfoncer le clou et d’appeler à la grève générale ?

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Crédit photo : O Phil des Contrastes

La semaine dernière, Laurent Brun déclarait déjà refuser la perspective d’une trêve de Noël. « Une grève reconductible qui fait une trêve, cela n’existe pas. Vous imaginez vraiment qu’au bout de vingt jours de pertes de salaire les grévistes vont s’arrêter comme ça ? » expliquait-il ainsi au Monde le 15 décembre, conditionnant l’arrêt de la mobilisation au retrait total de la réforme.

Le secrétaire général de la CGT-Cheminot répondait ainsi à l’attaque médiatique que cherchait à mener le gouvernement contre les grévistes en exigeant une trêve tout en restant totalement inflexible sur le projet de loi. Un chantage à la trêve de Noel rapidement rejoint par Laurent Berger de la CFDT, mais aussi par des politiques comme Marine Le Pen.

Hier, le communiqué de l’intersyndicale publié à l’issue de la mobilisation massive du 17 décembre réaffirme sans ambiguïtés : « Pas de trêve jusqu’au retrait ! », expliquant notamment « Sans annonce de retrait, il n’y aura pas de retrait. Nous appelons à organiser des actions de grève et de manifestations partout où c’est possible, notamment le 19 décembre par des mobilisations locales et ce, jusqu’à la fin de l’année. » Une position qui affirme que la mobilisation continuera par des « actions locales » pendant les fêtes mais qui ne s’accompagne pourtant d’aucune perspective claire, comme pourrait l’être notamment l’appel à une nouvelle grande journée de grève nationale interprofessionnelle qui puisse permettre d’accélérer le tempo alors même que le gouvernement tente de jouer la montre.

Un communiqué de l’intersyndicale sans véritable plan de bataille

Ainsi, en guise de « plan de bataille » le communiqué de l’intersyndicale appelle à des « mobilisations locales et ce jusqu’à la fin de l’année » avant de conclure : « sans réponse du gouvernement dans les heures qui viennent, elles décideront des suites nécessaires, au-delà du mois de décembre. » Pas de trêve donc… mais en guise de perspectives pour le mouvement pour le mois de décembre, ce n’est qu’à des « mobilisations locales » que l’intersyndicale fait référence.

Un plan de bataille qui remet donc au mois janvier la prochaine grande journée de grève nationale, l’intersyndicale lui préférant des « actions locales ». Ce type de « mobilisation locale » appelée le 19 décembre ressemble à s’y méprendre au type de plan dessiné par l’intersyndicale le 10 décembre dernier, à savoir des « actions de grève et de manifestation [appelées] localement, le 12 décembre, puis le week-end ». Or cette dernière journée locale appelée le 12 décembre n’avait pas mobilisé les foules, qui lui préfèrent les « temps forts » comme aiment à le dire les directions syndicales.

Seulement, pour l’instant, ce n’est que ce type de journées qui sont promises aux grévistes pour décembre. Un plan qui, loin de s’appuyer sur les nombreux acquis de nouvelle journée historique du 17 décembre, avec 1,8 millions de manifestants dans la rue selon la CGT reporte les « suites nécessaires, au-delà du mois de décembre ». Si le gouvernement joue le temps long, tentant de reprendre le contrôle du calendrier avec ces appels à la « négociation » avec les syndicats, il s’agirait plutôt que de temporiser, d’enfoncer le clou en augmentant le rythme qui comme on l’a vu monte crescendo de même que la détermination des grévistes.

Non seulement ces journées risquent fort d’être insuffisantes pour durcir le rapport de force avec le gouvernement, mais elles risquent également de ne pas donner aux grévistes mobilisés depuis 14 jours maintenant la possibilité d’exprimer leur lutte sur le terrain de la rue et des manifestations - terrain des plus politiques. C’est notamment ce qu’on a pu voir ce 17 décembre avec les liens tissés entres grévistes de la RATP et cheminots convergeant tous ensemble dans un cortège de tête auto-organisé regroupant des milliers de grévistes.

En clair, ce plan de bataille proposée par l’intersyndicale devrait être plus offensif pour ne pas seulement « maintenir » le rapport de force mais permettre au mouvement de passer à un stade supérieur et obliger le gouvernement à reculer.

Un véritable plan de bataille pour gagner : appeler à la grève générale !

Si le refus de toute « trêve » de Noël est une position juste, la porter de façon inconséquente à la manière de l’intersyndicale ne peut permettre de faire un saut dans le rapport de force. Mais plus encore, au-delà des appels à « à poursuivre et renforcer la grève, y compris reconductible là où les salariés le décident », l’intersyndicale ne mène aucune politique pour une extension véritable du mouvement à tous les secteurs et notamment au privé.

S’il est évident que la grève ne se décrète pas, une intersyndicale décidée qui appellerait à la généralisation de la grève, pour construire la grève générale donnerait un tout autre moral aux travailleurs. Pour convaincre des secteurs aussi centraux que l’automobile, pas encore entrés pleinement dans le mouvement du fait d’un rapport de force quelque peu dégradé, c’est un plan à la hauteur qu’il convient de proposer.

Cette nécessité invite à s’interroger sur qui doit diriger la grève. Alors que l’intersyndicale, si elle revendique le retrait total, continue de s’inscrire dans une stratégie de négociations, en contradiction avec ce qu’exigent toute une partie des travailleurs du mouvement, la faiblesse des Assemblées Générales ne leur permet pas actuellement de jouer pas un rôle de pression voire même de se poser en direction alternative à l’intersyndicale. En ce sens les différentes initiatives d’Interpro ont permis de faire ressortir la radicalité des travailleurs et leur envie de contrôler le mouvement, mais aucune n’a permis d’atteindre un développement suffisant pour exercer une pression sur l’intersyndicale et l’obliger à généraliser la grève et à mettre fin à toute négociation.

Or, donner confiance, montrer qu’il est possible de gagner et d’atteindre la victoire, c’est aussi et surtout proposer un plan de bataille qui ouvre cette perspective. C’est aussi une des conditions à l’extension du mouvement à ces secteurs qui pourrait permettre de passer un cap et de lutter contre l’isolement des locomotives que constituent la RATP, la SNCF et l’Education Nationale. Ainsi, après cette journée historique, il convient de continuer à enfoncer le clou alors même que le gouvernement est dos au mur, face à un front uni qui s’oppose à tout ou partie de sa réforme

En ce sens, la conclusion de Damien Bernard et George Camac la semaine dernière reste valable : « Pour avoir le retrait de la réforme comme cadeau de Noël, il n’y aurait donc pas de raccourci : il s’agit de construire réellement la grève générale illimitée en se servant du tremplin de la date du 17 décembre pour faire rebondir les taux de grévistes et généraliser la grève, y compris à des secteurs du privé. La question de l’auto-organisation et d’une grève contrôlée à la base, avec des AGs démocratiques et des coordinations est également clé. C’est ce type de coordinations, capable d’impulser une orientation distincte des directions syndicales, où la reconductible était votée jour après jour, qui avait permis en 1986 de faire durer le conflit et de mettre un coup d’arrêt au gouvernement. Il s’agit d’ailleurs, non sans hasard, de la dernière grève de la SNCF qui ait réussi à passer l’épreuve difficile des vacances de Noël.

Pour cela, il faut aussi en finir avec les appels du pied à négocier avec le gouvernement que ce soit sur des problématiques sectorielles comme sur la question des retraites. Il n’y en effet rien à négocier hormis le retrait de la réforme ! Pour vaincre Macron, il faut que les directions syndicales appellent à la grève générale ! »


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