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Construire le rapport de force

Assurance-chômage. Les syndicats envisagent un recours, c’est dans la rue qu’on fera retirer le texte !

Avec la réforme de l'assurance-chômage, Macron veut faire payer la crise aux chômeurs. Face à cette attaque historique contre les travailleurs, les directions syndicales envisagent de déposer un recours devant le Conseil d’État, mais ne proposent toujours pas l'ombre d'un plan de bataille dans la rue.

Margot Vallère

5 avril 2021

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Philippe Martinez (CGT), Laurent Berger (CFDT) et Yves Veyrier (FO).

Entrée en vigueur depuis le premier novembre, la réforme de l’assurance-chômage s’inscrit dans la droite lignée des nombreuses réformes de casse sociale que le gouvernement Macron s’efforce de mettre en place depuis 2017. Selon un rapport de l’UNEDIC la réforme devrait toucher 840.000 personnes dès la première année de sa pleine mise en œuvre, à partir de juillet prochain.

C’est le mode de calcul des indemnités journalières qui semble être au cœur de la réforme : Alors que le montant de l’allocation était jusqu’ici calculé à partir des jours travaillés sur une période de 12 mois, désormais une période de 24 mois sera prise en compte, incluant les jours travaillés ou non. Pour les chômeurs, cela signifie que leurs allocations risquent de drastiquement baisser et accéder à leurs droits sera plus difficile. La réforme prévoit également qu’il faudra désormais avoir travaillé et cotisé six mois sur les 28 dernier mois plutôt que quatre mois sur 24 comme prévu actuellement.

La réforme de l’assurance-chômage, dont les premières dispositions avaient déjà été prises en 2019, fait suite à la promesse de campagne de Macron et repose sur trois objectifs majeurs selon vie publique dont « faire en sorte que le travail paye plus que l’inactivité en établissant de nouvelles règles d’indemnisation qui incitent à la reprise de l’emploi » considérant que le chômage est une solution de facilité pour les 3,816 millions de chômeurs recensés en mars 2021. La prétendue solution du gouvernement pour « encourager la reprise de l’emploi » constitue en réalité une réelle attaque contre les chômeurs, privés d’emploi et dont le nombre ne fait qu’augmenter avec la crise et les suppressions d’emplois en cascade, dont les indemnisations baisseront significativement.

Dans un contexte de crise sanitaire et économique d’ampleur et alors que les chiffres du chômage ne cessent d’augmenter, Macron « n’entend pas renoncer à la réforme majeure de l’assurance chômage », affirmait Jean Castex à l’issue de la dernière consultation avec les partenaires sociaux.

Si les directions syndicales se positionnent contre : aucune perspective de lutte

Si l’ensemble des organisations syndicales avaient affirmé dans un communiqué commun le 23 février leur « profond désaccord » avec ces mesures, l’intersyndicale n’a jusque-là présenté aucun plan de bataille à la hauteur de la précarisation qu’engendrera une telle réforme. Au contraire, la CGT comme les autres organisations syndicales ont parfaitement joué le jeu du dialogue social en participant à toutes les concertations ayant pour objet la forme que prendrait la réforme, s’attardant sur le détail du calendrier de la mise ne place des mesures faute de pouvoir réellement se concentrer sur le fond.

Une seule fois, Philippe Martinez était sorti de son mutisme à Valence lorsqu’interrogé, il avait dû se prononcer ouvertement sur la réforme. Ce dernier avait alors affirmé « C’est une réforme qui est absolument scandaleuse et qui contribue à essayer de culpabiliser les chômeurs ». Depuis, le secrétaire général de la CGT ne s’est plus exprimé sur le sujet.

Dès le mois de mars, le retrait de la réforme semblait déjà être un combat perdu pour les directions syndicales, Denis Gravouil, le négociateur de la CGT semblait pessimiste à la veille d’une rencontre entre syndicats et le gouvernement allié au MEDEF : « On s’attend à être mis devant le fait accompli, avec un gouvernement qui va faire passer en force la réforme qu’il voulait faire passer. Les concertations depuis septembre étaient du pipeau, ils n’ont rien voulu entendre ».

Face à l’impossibilité de négocier avec le gouvernement qui ne semble en rien reculer dans son agenda de casse sociale, le seul horizon que nous donne les directions syndicales serait la possibilité de déposer un recours devant le Conseil d’Etat, une instance qui joue en dernière instance un rôle tampon pour le régime. Dès le début du mois de mars, le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger évoquait sur Europe1 la possibilité de saisir le conseil d’État comme seul moyen de lutter contre le gouvernement ou plutôt de temporiser ou de soutirer des miettes sans jamais remettre en jeu l’entièreté de la réforme.

Ce dernier tout comme Philippe Martinez ou encore Yves Veyrier ont beau versé des larmes de crocodiles, qualifiant cette réforme comme « politique » et « injuste », l’intersyndicale ne propose pas l’ombre d’une initiative pour construire la riposte dans la rue et dans les entreprises. En effet, si Les nouvelles mesures de la réforme de l’assurance chômage sont critiquées à l’unisson de la part des syndicats à l’instar de François Hommeril qui dénonce « une punition collective » pour les chômeurs considérer comme « pas suffisamment motivé pour rechercher un emploi », la CFDT soit le premier syndicat de France en terme d’adhérents dit toujours « étudier le texte ». De son côté, Force Ouvrière est décidée à attaquer le décret selon FranceInter. Si les syndicats formaliseront ensemble ou individuellement leur décision la semaine prochaine pour déposer un recours, la direction confédérale de la CGT n’a pour sa part proposé aucune initiative jusque là.

Alors que les syndicats sortent doucement de la torpeur dans laquelle ils étaient pourtant plongés depuis des mois, le seul horizon de lutte donné aux travailleurs et aux chômeurs est la possibilité de saisine du conseil d’État, donnant la perspective d’un combat qui se mène par le haut et par les institutions. Pourtant, les intermittents et précaires qui occupent les lieux de culture notamment contre cette réforme montrent qu’il est possible de se battre. C’est dans la rue et dans les entreprises , à la base, qu’il faudra lutter et construire le rapport de force contre les attaques du gouvernement, à l’image de l’appel à manifester contre le chômage et la précarité le samedi 20 mars 2021 qui était à l’initiative du mouvement national des chômeurs et précaires. Il s’agit de construire le front le plus large possible pour construire la riposte à la base contre le projet anti-social de Macron, car ce n’est pas aux travailleurs de payer la crise.


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