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Chili

Au Chili, des policiers et militaires accusés de violences sexuelles contre les manifestant.e.s

Des dizaines de cas de violences sexuelles commises par la police et l’armée, dans le cadre du soulèvement populaire qui embrase le pays, sont dénoncés par des associations féministes et LGBT ainsi que des organisations de défense des droits de l’homme.

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Crédit photo : DR

Alors que de nombreuses plaintes déposées décrivent des actes de torture et de violences sexuelles, la ministre chilienne de la femme et de l’égalité de genre, Isabel Plá, n’a pas eu honte de parler de « Tolérance zéro envers les violences faites aux femmes. », dans un tweet publié ce lundi 11 novembre. En quelques secondes, un déferlement de colère s’est propagé sur le réseau social : « Combien de femmes agressées sexuellement par la police avez-vous accompagnées ? », régit une utilisatrice ; « Rendez-nous service et démissionnez », s’indigne une autre. Ce n’est pas pour rien qu’on trouve le portrait de la ministre placardé sur les murs avec l’inscription « Plá dehors ! ».

Une répression brutale en réponse à la grande rébellion populaire qui secoue le Chili

Lucia Dammert, sociologue à l’université du Chili spécialisée dans les questions de sécurité explique dans les colonnes du Monde : « La police chilienne a toujours réprimé les mouvements sociaux plus fortement que dans les autres pays de la région, mais le niveau de violation des droits de l’homme auquel on assiste aujourd’hui est sans précédent depuis la dictature militaire ».

Pour ne citer que quelques exemples de ces derniers jours, à Coyhaique, ville située au Sud du Chili, la police-militaire (carabineros) a demandé aux autorités des lycées de fournir une liste avec les noms des étudiants participant aux manifestations. A Villa Alemana, ville proche de Valparaiso, cinq jeunes de moins de 14 ans ont été violemment réprimés et embarqués dans un fourgon de la police-militaire, mercredi soir, a dénoncé la commission de droits de l’homme de la ville.

Depuis le commencement de la rébellion populaire il y a un mois, on dénombre 18 personnes qui auraient été tuées, 2 000 blessées, dont 200 éborgnés, ainsi que plus de 10 000 personnes arrêtées.

Une répression particulière pour les femmes et diversités de genre

L’Institut national des droits humains (INDH), un organisme public indépendant, a dénoncé, parmi les nombreux cas de violation de droits de l’homme, une explosion de victimes de violences sexuelles : au moins 93 personnes, dont 23 mineures, ont dénoncé auprès de l’organisation des « traitements cruels, inhumains et dégradants avec violence et connotation sexuelle » commis par la police-militaire et par l’armée. Plusieurs femmes ont disparu.

L’INDH a déjà présenté une cinquantaine de plaintes pour violences sexuelles devant la justice. « Certaines pratiques illégales reviennent régulièrement dans les témoignages, et ce à travers tout le pays. C’est comme si la police les avait institutionnalisées », explique dans Le Monde Danitza Pérez Cáceres, membre de l’Association des avocates féministes (Abofem). « Les manifestants arrêtés par la police sont souvent forcés de se déshabiller entièrement. C’est quelque chose de complètement interdit, tant au niveau international que national », explique Camila Troncoso, membre de la même association. Les avocates parlent aussi des scènes d’humiliation racontées par leurs clientes : des jeunes femmes auxquelles on aurait interdit de remettre leurs sous-vêtements alors qu’elles avaient leurs règles, par exemple. 

Une femme détenue a dénoncé avoir été plaquée au sol et qu’un membre de l’armée l’a menacé de la tuer si elle bougeait ; il l’a pointée avec un fusil et lui a dit qu’il allait "la pénétrer avec l’arme". La plainte a été reprise par l’INDH. Une autre plainte connue est celle de Pamela Maldonado, détenue et menacée d’agression sexuelle par un policier, au cours de son transfert dans un commissariat : "Voyons si ça te plaît dans le cul", lui aurait-il dit. Josué Maureira, 23 ans, étudiant en médecine, raconte dans un poignant témoignage comment il a été victime d’insultes homophobes pendant qu’on le torturait, violait et menaçait de mort.

La discipline du genre est devenue un outil de la violence de l’État à l’égard des femmes et diversités de genre. Les agressions sexuelles perpétrées par les membres des forces répressives ont pour objectif de marquer les corps, de les punir et de discipliner, tant physique, psychologique que politiquement. Car ces violences ne cessent pas avec les abus mais se poursuivent ensuite par l’étouffement des dénonciations, le fait de réduire les victimes au silence par peur de représailles, comme l’explique l’avocate Danitza Pérez Cáceres, d’Abofem au Monde « Beaucoup ont peur. Les policiers disent souvent aux manifestants qu’ils savent où ils habitent, qu’ils peuvent les retrouver, les tuer »

Le gouvernement chilien ne finit pas de s’enfoncer dans les mensonges. Lundi dernier, il y a eu une audience spéciale des représentants du gouvernement chilien devant la Cour interaméricaine des droits humains à Quito, Equateur. Ils ont nié toute violation des droits de l’homme sur leur sol et se sont contentés, sans vergogne, de condamner les dommages matériels causés par les manifestants.


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