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justice patriarcale

Battue et violée, Valérie Bacot risque la perpétuité pour avoir tué son mari : procès de la honte !

Victime d'inceste depuis l'âge de 12 ans, après un énième viol, Valérie Bacot tombe enceinte de son beau-père, il deviendra son mari puis son proxénète. Aujourd’hui commence le procès de cette femme accusée du meurtre de son agresseur, à la suite d’un énième viol, en mars 2016. Elle risque la prison à perpétuité.

Prune Fabre

21 juin 2021

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Crédits photo : AFP

Le 13 mars 2016, Valérie Bacot, 36 ans, abat son mari Daniel Polette, mettant fin à près de 20 ans de calvaire. Cet homme, tout d’abord compagnon de sa mère, l’a violé quotidiennement dès ses 12 ans. Dénoncé par sa tante, lors de son adolescence, il est emprisonné pour deux ans, pour agression sexuelle sur mineur. Néanmoins à la fin de sa peine, il rejoint le domicile familiale et les viols reprennent. A 17 ans, à la suite d’un énième viols Valérie Bacot est enceinte, sa mère l’a met à la porte, elle souhaite continuer sa grossesse, son beau père la persuade d’emménager avec lui, les viols quotidiens continuent.

Les violences conjugales s’accélèrent, Valérie Bacot témoigne au moment de son procès : « Au départ, c’était des claques, puis c’est devenu des coups de pied, des coups de poing et il m’étranglait. Au fil du temps, il y a eu des menaces avec l’arme »

Puis c’est au tour de la prostitution forcée, Daniel Polette l’oblige à faire de nombreuses passes par mois, et pendant qu’elle se faisait violer par d’autres hommes dans un camion qu’il réserve à ces violences, il observe la scène, grâce à un trou à l’arrière du camion. Ainsi, il contrôlait si elle faisait "ce qui fallait". Le cas contraire, il lui glisse des "instructions" par des oreillettes, qu’elle devait réaliser. Durant leur vie commune, Valérie Bacot donne naissance à trois autres enfants.

Le matin du jour du meurtre, sa fille âgée de 14 ans lui confie que son père la questionne sur comment elle est "sexuellement", Valérie Bacot craint que son mari veuille prostituer leur fille. Le soir, après un énième viol d’un client régulier extrêmement violent, elle abat son mari pour mettre fin à toutes ces années de tortures et pour protéger ses enfants. Elle l’enterre ensuite avec l’aide de ses fils et du petit copain de sa fille. Un an plus tard, la mère de ce dernier dénonce les agissements. Les aveux suivront rapidement.

Face à ce récit d’une femme victime, Valérie Bacot est renvoyée aujourd’hui et ce jusqu’à vendredi devant la cour d’assise car selon le juge d’instruction : « Les violences conjugales et la prostitution qui lui auraient été imposées par la victime éclairent tant la personnalité de Valérie Bacot que les circonstances de son passage à l’acte, mais ne sauraient en aucun cas caractériser un état de légitime défense tel que défini par l’article 122-5 du code pénal ». Voilà la conclusion actuelle de la justice alors même que Valérie Bacot n’a pas été la seule victime de Daniel Polette, en effet, sa sœur a également déclaré avoir été violée par ce dernier.
Ses anciennes compagnes pour leur part ont toutes décrit un individu agressif, jaloux et brutal. Les enfants du couple ont également fait part des violences verbales et physiques quasi quotidiennes de leur père, sur eux et sur leur mère.

Si Valérie Bacot en est arrivée là, c’est parce qu’ elle n’a jamais été écoutée. D’après le porte-parole du comité de soutien, Valérie Bacot et ses enfants ont tenté « par deux fois d’alerter la gendarmerie » sur la situation de la famille, « sans être jamais entendus ». De plus à la suite de l’emprisonnement de son beau père lors de son adolescence, aucun suivi des services sociaux, ni de la justice n’avait été mis en place Elle a tué son mari car elle n’avait pas d’autre choix, et cette justice qui l’a toujours laissée seule face à cet homme violent, la menace aujourd’hui de la prison à perpétuité. Elle a, par ailleurs, déjà effectué un an d’emprisonnement. Comme l’a dit Lucas.G, petit-ami de l’époque d’une des fille de Valérie Bacot, aujourd’hui lors de l’audience : « Elle s’est sauvée la vie et j’ai aidé à dissimuler le corps et ça nous a emmené ici ».

Le procès de Valérie Bacot rappelle celui de Jacqueline Sauvage, condamnée pour le meurtre de son mari violent en 2014. Ce sont d’ailleurs les avocates de cette dernière qui assurent la défense de Valérie Bacot. Elles avaient déclaré avec justesse que « ce dossier est emblématique d’une concentration de violences physiques, sexuelles et psychologiques ayant conduit une femme victime de son époux à passer à l’acte. »

La terrible histoire de Valérie Bacot est l’expression extrême du sexisme structurel.
Depuis le #MeTooInceste crée à la suite de l’affaire Duhamel, les chiffres de l’inceste sont maintenant bien connus, c’est un crime qui concernerait un enfant sur 10, ces chiffres prouvent qu’il s’agit bien d’une réalité structurelle et non d’individus marginaux. De plus rien n’est fait dans cette société patriarcale pour libérer ces femmes de leurs agresseurs, Valérie Bacot après avoir subit des années d’inceste s’est retrouvée forcée d’emménager avec son violeur car elle n’avait pas les conditions matérielles pour survivre autrement. En effet pour lutter contre l’inceste, il faut briser le silence, mais aussi et surtout briser les conditions matérielles qui permettent de tels rapports de domination. Aujourd’hui, la famille est le seul cadre social dans lequel l’enfant est soutenu matériellement. Vouloir échapper à ce cadre social dans lequel il subit des violences veut donc dire se retrouver sans soutien matériel, comme ça aurait été le cas pour Valérie Bacot .

Pour qu’aucune femme ne se retrouve dans la situation de Valérie Bacot, de Jacqueline Sauvage et de leurs enfants, isolés face à un mari violent et une police insensible à leurs souffrances, pour qu’aucune femme ne se retrouve seule face aux mépris de cette justice de classe, c’est toutes et tous ensemble que nous devons nous battre.

Exigeons aujourd’hui la relaxe de Valérie Bacot !, victime du sexisme structurel et de l’inaction de la justice.


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