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Grève des avocats

Blocage du tribunal de Paris : Durcissement du mouvement des avocats

Dans le cadre de leur 7ème semaine de grève, une centaine d’avocats a bloqué le tribunal de grande instance de Paris ce lundi 24 février. Ce blocage a eu lieu quelques heures avant l’ouverture du procès de François et Pénélope Fillon qui comparaissaient pour détournement de fonds publics et abus de biens sociaux. Leurs avocats ont demandé le renvoi symbolique en solidarité avec le mouvement de grève.

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Crédits photos : Christophe Petit Tesson / AFP

Un jour historique, pour les avocats car jamais le palais de justice n’avait été bloqué. Ils l’ont fait pour que « la population ait encore des avocats dans dix ans ». La mobilisation a été particulièrement démonstrative, avec fumigènes, banderoles, chants, drapeaux du syndicat des avocats de France. Ils ont repris la chanson des gilets jaunes qu’eux même avaient emprunté aux cheminots : « Pour l’honneur des défenseurs et pour un monde meilleur, même si Belloubet veut pas nous on est là ».

Autour de 11h30, les CRS sont arrivés pour mettre fin au blocage. Ces derniers se sont dispersés après une mêlée aux cris de « ils vous ont retiré le projet, vous n’êtes pas impactés par cette réforme », écho à l’intervention de Nicole Belloubet ce matin sur RTL : « Vous comprenez bien qu’il ne peut pas y avoir un système universel pour 70 millions de Français, sauf pour 70.000 avocats ».

Une grève corporatiste ?

Pour rappel, les avocats s’opposent à la réforme des retraites qui va mettre fin à leur régime autonome. Selon eux, la réforme des retraites va entrainer la fermeture de la moitié des cabinets et restreindre l’accès à la justice pour les plus démunis. Ils dénoncent une volonté de détruire un système « qui marche », en le remplaçant par « un système qui va augmenter les cotisations et réduire les pensions ». Les avocats fixent leurs honoraires en fonction de la situation financière de leurs clients. Ce sont ceux qui défendent les plus modestes qui se retrouveront asphyxiés. Il faut aussi rappeler que les avocats qui exercent au titre de l’aide juridictionnelle le font aujourd’hui à perte.

Le manque à gagner suite à la destruction des petits cabinets va entrainer une augmentation des charges sur les cabinets moyens, qui seront contraints d’augmenter leurs honoraires. Une avocate déclare : « la justice a toujours été inégalitaire mais elle risque de le devenir encore plus ». Aujourd’hui, les négociations sont au point mort, les amendements ne convainquent pas. Plus encore, de nombreux avocats dépassent aujourd’hui les revendications avancées par le Conseil national des barreaux pour exiger le retrait pur et simple de la réforme, au delà de leur cas particulier. 

Une grève particulièrement active

Comme tous les jours depuis le début de leur grève, les avocats ont continué leur mouvement de contestation à l’intérieur du tribunal. Après le blocage, place à la défense massive. Vers 14h, dans la 23e chambre, chambre des comparutions immédiates, une douzaine d’avocats sont présents pour appuyer une consœur qui demande le renvoi de son audience dans le cadre du mouvement de grève. Ils courent de chambre en chambre à l’appel de leurs confrères et consœurs. Certaines personnes seront tout de même jugées sans avocats du fait de l’absence de commis d’offices, eux aussi en grève. Depuis deux mois, les avocats s’activent pour assurer un renvoi systématique de toutes les audiences.
Lors des défenses massives, les avocats au lieu d’arriver à 3 pour 12 cas en tant que commis d’offices arrivent à 30, et soulèvent tous les moyens d’irrecevabilité, de nullité, tous les moyens juridiques en leur possession pour bloquer les rouages de la justice et faire libérer des personnes quand cela est possible. Ce samedi, ils étaient plus de 300, en défense massive, leur plaidoiries successives n’ont permis le traitement que de 4 dossiers en 12 heures.

Des attaques contre leur droit de grève

Les avocats, comme les autres secteurs, font aussi face à une volonté de délégitimer leur mouvement et doivent répondre aux atteintes contre leur droit de grève. Le 12 février, le président du tribunal judiciaire de Paris ainsi que le procureur de la république de Paris, ont déclaré que le mouvement de protestation des avocats contre la réforme des retraites provoquait « une dégradation importante de l’action judiciaire ». Le bâtonnier de Paris s’est déclaré solidaire de ses confrères, déclarant : « le blocage des avocats est à l’image du blocage du gouvernement qui ne veut rien entendre ». La semaine dernière, la garde des sceaux avait aussi condamné le mouvement des avocats leur attribuant la responsabilité de la dégradation du service public.

Une mise en lumière d’un système à bout de souffle

Le syndicat de la magistrature dénonce l’hypocrisie et les tentatives de divisions de cette dernière attribuant la déliquescence judiciaire à la grève des avocats. Dans sa lettre à la garde des sceaux, le SDM a effectivement rappelé que la dégradation des conditions de l’exercice des fonctions des magistrats et leur surcharge de travail n’était pas chose nouvelle. Il dénonce la politique de réduction budgétaire et la logique de rentabilité soutenu par le gouvernement Macron qui oblige les magistrats à arbitrer entre « qualité de de la décision rendue et gestion des flux ».

L’année dernière, la loi de programmation de la justice a fait l’objet de fortes contestations autant chez les magistrats que les avocats dont le but selon eux est « de fermer l’accès au juge, de gérer à moyens constants les flux de procédure, au détriment de la proximité et de l’humanité de la justice, de sa qualité, de l’égalité de traitement des justiciables er de l’exercice de ses droits ».

Un mouvement qui va se poursuivre

Les avocats ont multiplié les actions spectaculaires dans bon nombres de villes : haka, dépôt de codes devant le ministère, interpellation de membres de l’exécutif, envahissement de salles d’audiences. Ils ne sont pas près de s’arrêter et commencent à mettre en place des caisses de grèves. Durant les vacances, ils avaient un peu assoupli leurs méthodes de grève, mais la rentrée marque le retour d’une mobilisation de plus en plus forte et qui touche l’ensemble des barreaux de France, un secteur supplémentaire qui descendra à nouveau dans la rue, aux côtés de tous ceux que Macron a réunis. 


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